Vous souvenez-vous du… Saab 9-7X?

Savez-vous où était basé le siège social de Saab? À Trollhättan, en Suède. Savez-vous où était produit le Saab 9-7X? À l’usine de Moraine, dans l’Ohio, sur les mêmes lignes que ses cousins les Chevrolet TrailBlazer, GMC Envoy, Buick Rainier, Oldsmobile Bravada et Isuzu Ascender. Déjà, vous voyez pointer le côté générique de l’engin. Et c’est ainsi que le 9-7X prendra le « sympathique » surnom de TrollBlazer.

Pourquoi, mais pourquoi General Motors a-t-il donc pris des parts chez Saab en 1989? Eh bien, juste parce que… Dans les années 80, le secteur automobile évolue beaucoup, les Japonais chamboulent plusieurs segments, y compris celui des véhicules de luxe, et la tendance est à la consolidation. En 1989, Jaguar est à vendre. Ford et GM font tous les deux une enchère et c’est Ford qui remporte la mise (si l’on peut dire…). Possiblement frustrés, les dirigeants de GM jettent leur dévolu sur Saab et se portent acquéreurs de 50% des parts pour la somme de 600 millions de dollars. L’autre moitié est détenue par Investor AB, un holding suédois appartenant à la famille Wallenberg. À ce moment, Saab est un petit fabricant qui, dans les meilleures années, produit 120 à 130 000 véhicules et a des ressources limitées. Il a dû s’associer avec Fiat, Lancia et Alfa Romeo pour développer un nouveau modèle, situé au-dessus de la 900 : la 9000. La réputation de Saab est celle d’un constructeur excentrique, un peu décalé, qui n’en fait qu’à sa tête. Ce qui est parfait dans un immense conglomérat comme celui de GM ;-).

Photo: Saab

L’intégration se passe difficilement alors que les concepts de plateformes communes et de partage de pièces semblent incongrus aux ingénieurs suédois. La marque ne dégage que de rares profits. Pourtant, en 2000, GM achète les 50% d’Investor AB… pour la somme de 125 millions, illustrant déjà la spectaculaire dégringolade de la compagnie. Malgré les « efforts » de GM, Saab plafonne toujours autour des 130 000 exemplaires par an. Le lancement en juillet 2002 de la seconde génération de 9-3 ne suffira pas à augmenter les ventes.

Chez GM, cela fait un moment que l’on se demande bien que faire de Saab. La première tentative pour améliorer la situation arrivera sur le marché au millésime 2005 sous les traits de la Saab 9-2X, une Subaru Impreza rebadgée et surnommée « Saabaru ». L’idée, quand même assez originale, est due à Bob Lutz, le vice-président responsable du développement produit de GM. Elle ne sera commercialisée que durant deux ans et ne sera écoulée qu’à 10 322 exemplaires (dont 1 038 au Canada). Heureusement, GM a une autre carte dans sa manche. Enfin, peut-être…

Photo: Saab

Saab se met à l’heure GMT

La compagnie a présenté en 2002 une nouvelle génération d’utilitaires intermédiaires : les Chevrolet TrailBlazer, GMC Envoy et Oldsmobile Bravada (sans oublier l’Isuzu Ascender, non vendu au Canada). Tous reposent sur la plateforme GMT360, qui servira aussi de base au Chevrolet SSR. Si les ventes de TrailBlazer et d’Envoy se portent plutôt bien, celles du Bravada vacillent. Ceci est dû à la disparition programmée d’Oldsmobile à la fin du millésime 2004. La production du Bravada est arrêtée le 12 janvier 2004 et la dernière Oldsmobile de l’histoire, une Alero, sortira des chaînes le 29 avril 2004. L’une des plus vieilles marques automobiles du monde s’éteignait…

Pour contrer la perte de l’utilitaire Oldsmobile, Buick lance, dès l'année modèle 2004, le Rainier (en l’honneur du mont Rainier, dans l’État de Washington), en fait un Bravada avec une nouvelle calandre comprenant le grillage Buick de l’époque. Le Rainier connaîtra une carrière très tranquille jusqu’à la fin du millésime 2007. Chez GM, on aurait dû déjà avoir la puce à l’oreille. Mais non… car une sixième variante sur base de GMT360 était en préparation.

Photo: Buick

Le Saab 9-7X est présenté au millésime 2005. À l’extérieur, à part la calandre et les feux arrière, pas grand-chose n’a changé par rapport au Bravada. Pourtant, dans son communiqué, Saab met le paquet : « Le 9-7X reflète le caractère sportif et fonctionnel de Saab dans son esthétique extérieure. Des caractéristiques clés telles que la calandre triple sur le carénage avant, les glaces de custode enveloppantes et les roues spécifiques identifient immédiatement ce véhicule comme appartenant à la marque Saab. Le 9-7X offre des lignes fluides, aérodynamiques et sportives, marquées par un excellent rapport de taille entre les pneus et la carrosserie assuré par une garde au sol basse associée à des roues de série de 18 pouces. Son profil sobre coule sans interruption de l’avant à l’arrière, sans que des pare-chocs proéminents ou autres excroissances ne viennent briser l’harmonie. Montés en colonne derrière des lentilles en acrylique, les feux arrière à réflecteurs et cadres finement ciselés rendent une impression de relief et semblent résulter d’un travail d’orfèvre ». Vous n’êtes pas encore convaincu? Alors, ouvrez la porte!

Photo: Saab

Au moins, GM a eu le bon goût de débloquer du budget pour revoir l’intérieur. Parce que celui des Chevrolet, GMC, Oldsmobile et Buick était tout simplement indigne d’un véhicule de luxe, d’héritage européen de surcroît… Vous ne serez pas dépaysé, ne vous inquiétez pas. Hormis les grilles de ventilation et le porte-gobelet, on est globalement en terrain connu mais avec des matériaux plus haut de gamme. Pourtant, Saab continue de beurrer épais dans son communiqué : « À bord, l’habitacle raffiné inspiré par les cockpits aéronautiques est tout entier axé sur le conducteur. La colonne centrale du tableau de bord et la console, par exemple, sont inclinées vers lui. Comme à l’extérieur, le design est empreint de puissantes touches visuelles rattachant le 9-7X à l’héritage Saab ». Attention toutefois, le contact d’allumage a été déplacé sur la console, comme dans les vraies Saab. Vous en voulez de l’héritage? Vous êtes servi!

Photo: Saab

Pour la base technique, nous sommes encore en terrain familier. Le châssis repose sur le même châssis en échelle avec un empattement de 2 870 mm (le 9-7X n’aura jamais droit aux variantes allongées des TrailBlazer, Envoy et Ascender) et les deux motorisations disponibles au lancement sont identiques à celles de ses cousins américains. En entrée de gamme, on retrouve le 6 cylindres en ligne LL8 (ou Vortec 4200) de 4,2 litres à 4 soupapes par cylindre développant 275 chevaux à 6 000 tr/min et 275 lb-pi à 3 600 tr/min, réservé à la version Linear. La version Arc bénéficie quant à elle d’un V8 LM4 (ou Vortec 5300) de 5,3 litres développant 290 chevaux à 6 000 tr/min et 325 lb-pi à 4 000 tr/min. Les deux sont accouplés à une boîte automatique 4L60-E fiable et douce d’utilisation mais dont les 4 rapports commencent un peu à être désuets. Contrairement aux TrailBlazer et Envoy, le 9-7X vient d’office avec une transmission intégrale. La garde au sol est de 196 mm et la capacité de remorquage est de 6 500 lb (avec le moteur V8).

Il faut aller chercher des différences techniques au niveau de la suspension, qui a été recalibrée pour offrir un comportement plus sportif. Très légèrement rabaissée, elle bénéficie de bagues et d’amortisseurs plus fermes. L’épaisseur des barres stabilisatrices (36 mm à l'avant et 24 mm à l’arrière) est la même que celle des autres modèles à quatre roues motrices. Le rapport de direction (18,5:1) est celui du TrailBlazer EXT à empattement long (tandis que celui du TrailBlazer normal est de 20,5:1). À l’arrière, on retrouve un correcteur d’assiette pneumatique de série.

Photo: Saab

Les 9-7X Linear sont plutôt bien équipés : climatisation automatique, phares antibrouillards, condamnation centrale, colonne de direction ajustable en hauteur et en profondeur, système OnStar, intérieur en cuir, sièges avant électriques (réglages selon 6 directions et avec mémoire) avec support lombaire ajustable et chauffants. La version Arc ne rajoute que le V8, des roues de 18 pouces exclusives et la galerie de toit. Les options comprennent les lave-phares, la chaîne audio Bose, le changeur 6 CD, le système de divertissement DVD arrière, le système de navigation, les phares à haute intensité, la peinture métallisée et le toit ouvrant.

Cylindrée sur demande et demande de clients

Au Canada, le Saab 9-7X n’arrive qu’à l’été 2005 pour le millésime 2006. L’utilitaire profite du changement d’année modèle pour connaître quelques modifications. Les noms Arc et Linear disparaissent et il ne reste que la version de base ou la V8. Le V8, justement, est remplacé par le LH6 avec le système de cylindrée variable baptisé DoD (Displacement on Demand) qui peut désactiver la moitié des cylindres sous faible charge pour réduire la consommation d’essence. Toujours d’une cylindrée de 5,3 litres, sa puissance est de 300 chevaux à 5 200 tr/min et son couple de 330 lb-pi à 4 000 tr/min. Les chiffres du 4,2 litres progressent : 291 chevaux à 6 000 tr/min et 277 à 4 800 tr/min. Le contrôle de stabilité est installé de série et la gamme des couleurs est modifiée.

Au Canada, le modèle de base est proposé à 50 900 $ tandis que le V8 demande 53 400 $. Ses concurrents principaux sont alors le Volvo XC90 (49 995 $ en 4 cylindres turbo et 64 995 $ en V8), le Jeep Grand Cherokee (39 330 $ en V6 et 50 000 $ en V8), le Mercedes ML (55 750 $ en V6 et 72 700 $ en V8), le Lexus GX 470 (67 700 $ en V8) et l’Infiniti FX (53 200 $ en V6 et 60 800 $ en V8). Quant au Buick Rainier, il est vendu 49 350 $. S’il paraît correctement placé en termes de prix, le Guide de l’auto, dans son édition 2006 le juge pourtant cher.  Il faut dire que son image de marque est floue (spécialement auprès des « saabistes ») et que les plastiques façon GM et la boîte à 4 rapports ne le font pas reluire. Par contre, sa tenue de route saine, son habitacle confortable et ses moteurs sont appréciés.

Photo: Saab

Mais voilà, les gens ne mordent pas à l’hameçon. Les ventes restent marginales, même pour Saab et particulièrement au Canada (voir tableaux de production et de ventes canadiennes en fin de texte). Les changements du millésime 2007 (indicateur de basse pression des pneus de série, système OnStar amélioré, nouvelle couleur) et une baisse des prix (48 900 $ pour le 6 cylindres et 51 410 $ pour le V8) ne font rien pour améliorer la situation. Peut-être qu’en 2008?

Il prend l’air!

La grosse nouveauté de ce millésime, c’est la version Aero. Celle-ci bénéficie du V8 LS2 déjà installé dans le TrailBlazer SS (390 chevaux à 6 000 tr/min et 395 lb-pi à 4 000 tr/min). Par rapport au 5,3 litres, le 0 à 100 km/h passe de 8,4 à 6,1 secondes! Il n’est disponible que dans une seule couleur (carbon flash metallic) et vient de série avec des roues de 20 pouces exclusives, des sièges avec le logo Aero brodé, une barre antiroulis et des freins plus gros. De plus, à 54 950 $ (contre 49 295 $ pour le 4.2i et 52 805 $ pour le 5.3i) il s’avère une véritable aubaine! Pourtant, ses ventes resteront extrêmement confidentielles. Peut-être que la clientèle a été effrayée par sa consommation moyenne annoncée à 14,5 L/100 km…

Photo: Saab

Il n’y a pas de changements majeurs pour le millésime 2009. C’est la fin de la route pour la plateforme GMT360 alors que GM a choisi de remplacer ses utilitaires intermédiaires par des modèles avec une structure autoportante. Vu les maigres ventes, le couperet tombe également sur le 9-7X.

Millésime

L6 4,2 L

V8 5,3 L

Aero V8 6,0 L

Total

2005

1 501

498

1 999

2006

3 072

2 414

5 486

2007

3 093

1 967

5 060

2008

2 631

1 174

442

4 247

2009

1 927

455

112

2 494

Total

12 224

6 508

554

19 286

L’accueil de la clientèle canadienne sera encore plus froid qu’aux États-Unis.

Année calendaire

Ventes Canada

2005

38

2006

230

2007

266

2008

116

2009

58

Total

708

Le 9-7X ne sera pas vraiment remplacé. Dès le millésime 2006, il aurait dû être rejoint par le 9-6X, une variante restylée et rebadgée du Subaru B9 Tribeca. Mais celle-ci ne sera jamais commercialisée, GM ayant vendu ses 20% dans la compagnie japonaise en octobre 2005. Il faudra attendre l’année modèle 2011 pour voir le lancement du 9-4X, un véhicule plus petit similaire au Cadillac SRX reposant sur la structure monocoque Theta et fabriqué au Mexique. À ce moment-là, Saab n’est plus la propriété de General Motors et seuls 841 exemplaires seront produits avant que Saab ne tombe en faillite. Mais ceci est une toute autre histoire…

À voir aussi : Antoine Joubert présente la brochure du Chevrolet SSR

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