Bloquer la porte à un seul constructeur

La décision du gouvernement Trudeau (initiée par Pierre Poilièvre le 9 août dernier) de lourdement taxer les véhicules électriques fabriqués en Chine ne démontre pas la poigne de ce dernier. Elle découle en fait d’une forte pression provenant des constructeurs automobiles, qui investissent massivement au Canada pour y assembler et vendre des véhicules électriques.

Une chose est sûre, si Honda choisit d’investir 10 milliards de dollars dans la fabrication d’une usine de batteries à Alliston en Ontario, recevant par le fait même 5 milliards de subventions du fédéral, c’est parce quil souhaite vendre des véhicules électriques. Pareil pour Stellantis, qui a timidement amorcé la production de la nouvelle Dodge Charger EV, ou pour Volkswagen, qui créera 3 000 nouveaux emplois à St.Thomas avec son usine de batteries.

De ce fait, voilà pourquoi on impose une taxe douanière de 100% aux véhicules électriques chinois, en vigueur dès le premier octobre. Une taxe qui cause momentanément des maux de tête à Polestar, Tesla et Volvo, qui commercialisent chez nous des véhicules électriques assemblés en Chine.

Toutefois, ces entreprises seront rapidement en mesure de corriger le tir en rapatriant la production vers d’autres usines. Ce n’est par contre pas le cas de BYD, qui assemble l’ensemble de sa large gamme de modèles en Chine, et qui connaît une ascension fulgurante à l’échelle mondiale. Ce constructeur fabrique notamment la berline Seal comparable à la Tesla Model 3, mais qui pourrait être vendue ici à environ 30 000 $ (avant l’application des crédits gouvernementaux).

Mais voilà, dans un article publié le 30 juillet par Automotive News, on apprenait que BYD s’apprêtait à faire son entrée au Canada. Une nouvelle qui a aussitôt ébranlé l’industrie, ne voulant pas devoir composer avec une telle concurrence. Parce que de toute évidence, les consommateurs auraient adopté ces produits, comme c’est toujours le cas avec les nouveaux venus qui offrent de bonnes valeurs. Il y a eu Hyundai dans les années 80, Kia dans les années 2000, et on assiste actuellement à une montée en flèche des ventes de véhicules Vinfast, qui semble aussi effrayer l’industrie. Or, encore une fois, parce que les prix pourraient être très attrayants, le Canada choisit de fermer la porte à BYD.

Photo: BYD

Certains consommateurs y verront une concurrence déloyale, d’autres un choix écologique judicieux. Car il est clair que les méthodes de fabrication de BYD face aux autres constructeurs, de même que le transport de ces modèles depuis la Chine, s’accompagnent d’un sérieux impact environnemental. Cela dit, en creusant un peu plus loin, on constate que les gouvernements, par leurs généreux plafonds d’admissibilité aux crédits, incitent l’industrie automobile à proposer des véhicules électriques plus chers. Des VUS lourds, chaussés de pneus de plus grande taille, qui coûtent une fortune à assurer comme à réparer, et qui rapportent conséquemment beaucoup plus de taxes qu’un véhicule plus accessible...

En y pensant bien, la TVQ de 9,975% représente à elle seule sur un véhicule électrique de 65 000 $ la somme de 6 483,75 $, soit presque 400 $ de plus que les 6 088 $ (7 000 $ taxe incluse) de crédit provincial actuellement accordés par Québec pour l’achat d’un véhicule électrique. En quelque sorte, Québec propose donc aux électromobilistes ni plus ni moins qu’un congé de taxes, en les incitant à se procurer un véhicule plus coûteux et qui impliquera dans le futur de sérieuses dépenses...

Photo: BYD

Imaginez, BYD aurait été en mesure de commercialiser chez nous des véhicules électriques compétitifs, juste au-dessus des 20 000 $, comme l’Atto 3, dont l’autonomie est estimée à 350 kilomètres. Comme le VUS Seal-U, qui pour le prix d’un Hyundai Kona à essence, aurait offert jusqu’à 475 kilomètres d’autonomie électrique. Mais cela n’arrivera pas.

Parce que l’on souhaite protéger notre industrie (ce qui est compréhensible), mais aussi parce que l’on désire récupérer davantage de taxes découlant de la vente de véhicules électriques, permettant ainsi de compenser les taxes perdues par la vente de carburant. Une décision louable et logique, mais qui signifie aussi que le consommateur canadien continuera de payer plus cher pour son prochain véhicule automobile.

À voir : véhicules électriques, les impacts de la taxe de 100% chez les consommateurs

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