Can-Am Pulse et Origin : nous avons conduit les deux motos québécoises
Pour son grand retour sur deux roues, la marque Can-Am suit la voie de l’électrification avec deux motos différentes. Reposant sur la même base, la Pulse est une moto routière dénudée (aussi appelées naked bikes) tandis que l’Origin est une aventurière.
BRP, qui a conçu et développé ces machines, nous a invités dans son fief de Valcourt pour conduire les deux motos, et pour visiter le centre de design où ces machines québécoises ont été dessinées. Le Guide de l’auto a fait partie des quelques médias triés sur le volet qui ont pu pénétrer à l’intérieur de cet endroit qui fonctionne la plupart du temps à l’abri des regards.
- À lire aussi: Can-Am Spyder et Ryker 2024 : deux manières de rouler sur trois roues
- À lire aussi: BRP réfléchit à une voiture électrique futuriste
Plusieurs avenues ont été envisagées au départ, dont celle de miser sur le passé avec des motos inspirées des premières Can-Am vendues dans les années 70. Finalement, c’est un design moderne qui a été retenu. Parmi les inspirations ayant servi à élaborer le style, les personnes interrogées au bureau de design nous ont parlé de la chouette, notamment la forme de sa tête ainsi que celle de ses ailes déployées.
Au départ, les designers travaillent sur un ordinateur, sur du papier ou avec les deux selon les sensibilités de chacun. Le dessin des véhicules est ensuite affiné avec une modélisation en trois dimensions, afin de mieux apprécier le rendu. Certaines pièces sont fabriquées grâce à des imprimantes 3D, là encore pour mieux se rendre compte de l’aspect de ces dernières dans le monde réel.
Puis, le véhicule est modelé dans de l’argile par un sculpteur. Cette étape essentielle est faite à la main et exige une maîtrise parfaite du matériau afin de respecter les dimensions de la moto et les proportions de chaque pièce. Après avoir observé les deux motos en argile de très près, la qualité de la réalisation et la symétrie parfaite des véhicules nous ont estomaqués. Un véritable travail d’orfèvre!
En plus de ce travail presque artisanal, un autre atelier se focalise sur l’ergonomie grâce à des poutres métalliques avec un guidon et une selle réglables pour affiner la position de conduite. Et grâce à un casque de réalité virtuelle, il est même possible de modéliser la moto et de la voir alors qu’elle n’existe pas encore.
Une même base, deux interprétations différentes
Les Can-Am Pulse et Origin utilisent le même groupe motopropulseur et une batterie identique. Contrairement aux voitures qui peuvent recevoir des batteries lourdes et de grande capacité, l’augmentation du poids est problématique pour une moto. En effet, la maniabilité est rapidement réduite par une masse trop importante. Can-Am a choisi de favoriser la légèreté au maximum en optant pour une batterie de 8,9 kWh. L’autonomie annoncée s’élève à 130 km pour la Pulse (160 km en ville). Un tantinet plus lourde et dotée de plus grandes roues, l’Origin peut théoriquement parcourir 115 km (145 en ville).
Refroidie par eau, la batterie utilise deux petits radiateurs disposés face à la route. Afin de gagner du poids et de compacter l’ensemble, le chargeur, l’onduleur et le moteur partagent le même système de refroidissement que la batterie. Concernant la transmission, BRP n’a pas opté pour une courroie, comme beaucoup de concurrents, mais pour une chaîne enfermée dans un carter. Noyée dans l’huile, sa conception se rapproche des éléments employés sur les motoneiges du constructeur.
Le chargeur embarqué affiche une puissance maximale de 6,6 kW, ce qui permet de passer de 20 à 80% de la charge en 50 minutes sur une borne de niveau 2. La petite taille de la batterie fait en sorte qu'il n'est pas possible d’utiliser les chargeurs rapides de niveau 3 (BRCC).
Le moteur développe 35 kW, ce qui correspond à 47 chevaux. Une valeur qui n’a pas été choisie au hasard puisqu’elle permet à la moto d’être conduite par tous les motocyclistes en Europe, y compris les moins expérimentés qui doivent opter pour des machines ne dépassant pas les 47 chevaux (Permis A2). Le couple maximal s’élève à 53 lb-pi, ce qui se situe dans la moyenne des motos dénudées de moyenne cylindrée.
La Can-Am Pulse n’affiche que 175,5 kg sur la balance, un poids similaire à celui d’une moto à essence équivalente. Avec 187 kg revendiqués, l’Origin est un peu plus lourde, mais demeure plutôt légère elle aussi.
Est-ce que ça pulse?
Can-Am avait prévu un court galop d’essai sur route avec les deux motos ainsi qu’une session hors route avec l’Origin. Nous avons débuté notre essai avec la Pulse. La selle basse permet de poser les pieds bien à plat et met en confiance. La position de conduite est confortable, même si l’assise nous a semblé étroite et un peu ferme. Il faudra un essai plus complet pour le confirmer. Face au conducteur, la commande à droite du guidon provient du Can-Am Ryker, tandis que celle de gauche est héritée du Spyder. Bien qu’un peu chargée, cette dernière s’avère néanmoins facile à utiliser. L’instrumentation est assurée par un grand écran lisible et à la très belle définition. Comme à bord d’une voiture, il est possible de connecter son téléphone cellulaire et de modifier l’affichage des informations.
Les premiers tours de roue confirment que Can-Am a bien fait de faire la guerre aux kilos superflus. La Pulse est maniable, facile à conduire et ses performances sont conformes à celles d’une moto à essence de 600 à 800 cm3. BRP annonce un 0 à 100 km/h abattu en 3,8 secondes, ce qui est déjà rapide. Le couple immédiatement disponible permet de décoller promptement. Et en dépit d’une vitesse électroniquement limitée à 130 km/h, la moto ne s’essouffle pas jusqu’à 120 km/h.
Le confort était adéquat sur les routes des Cantons de l’Est que nous avons arpentées, et le freinage s’est montré efficace considérant la vocation de la moto. Un peu plus de mordant au levier aurait été bienvenu, mais ce choix technique a sans doute été fait pour ne pas surprendre les débutants. En plus du système de freinage traditionnel, il est aussi possible de ralentir grâce à la régénération d’énergie au freinage. Le conducteur a le choix : le désactiver, laisser la moto travailler, ou bien l’activer en tournant la poignée d’accélérateur dans le sens contraire. Nous avons aimé l’idée de pouvoir maîtriser la régénération manuellement, nous aurions cependant préféré que le débattement de la commande soit plus grand. La poignée ne bougeant que sur quelques millimètres, il n’est pas toujours facile de doser la décélération adéquatement.
L’Origin sur l’asphalte et hors route
Au guidon de l’Origin, les suspensions rehaussées font en sorte que l’on perçoit davantage le poids de la batterie. Les performances sont légèrement inférieures (0 à 100 km/h en 4,3 secondes) mais demeurent amplement suffisantes. Très maniable également, cette Can-Am plus haute sur pattes absorbe mieux les irrégularités de la route grâce à des suspensions au débattement allongé. Comme la Pulse, l’étroitesse de la selle nous laisse penser que le confort pourrait être un enjeu sur les longues distances, mais nous n’avons pas roulé assez longtemps pour pouvoir l’affirmer hors de tout doute.
Une fois arrivés sur la piste du complexe de Saint-Élie, nous avons pu mettre à l’épreuve l’Origin sur une piste en terre, plus ou moins meuble selon les virages. Dans ces conditions, la livraison immédiate du couple demande un peu d’habitude par rapport à une moto équivalente à essence. Au départ, on a tendance à accélérer trop fort à la sortie des virages, ce qui déséquilibre la moto. Par contre, une fois le mode d’emploi assimilé, nous avons trouvé la moto efficace, même si le poids de la batterie se faisait davantage sentir qu’à bord d’un modèle à essence équivalent.
Lors de notre essai, la consommation d’électrons a tourné autour des 6 à 7 kWh/100 km en étant sage avec la commande d’accélérateur. Cela nous aurait théoriquement octroyé une autonomie de 120 à 130 km. En étant plus enthousiaste avec la poignée droite, tablez plutôt sur une centaine de kilomètres entre chaque recharge.
Combien ça coûte?
Pour conclure cet essai, il reste aussi la question du prix. Celui de la Pulse oscille entre 18 299 $ et 20 999 $ selon la version retenue. De son côté, l’Origin de base est facturée 18 999 $ tandis que le modèle haut de gamme coûte 21 699 $. Une somme tout de même élevée, qui ne sera pas à la portée de tous. Au moment où sont écrites ces lignes, BRP communique avec le gouvernement du Québec afin que les deux motos soient intégrées au programme Roulez vert et bénéficient du rabais de 2 000 $. Ça devrait normalement être le cas l’année prochaine lorsque les motos seront commercialisées. Cela dit, même en retirant ces 2 000 $, le prix reste élevé. Contrairement aux voitures, les tarifs des motos à essence demeurent beaucoup plus compétitifs pour le moment.
Pour vous donner une idée, quand on met la Pulse face à une moto à essence de moyenne cylindrée comme la Yamaha MT-07, son prix de 9 999 $ pour des performances équivalentes est beaucoup plus bas.
Cela pourrait être moins pénalisant en Europe où beaucoup d’usagers utilisent leur deux-roues au quotidien et peuvent accéder à certains endroits uniquement avec des véhicules électriques. Au Québec, l’utilisation des motos davantage tournées vers le loisir pourrait coûter des ventes aux Pulse et Origin…
Pour être juste et prendre en compte tous les coûts associés, soulignons le fait que les Pulse et Origin coûteront moins cher à être plaquées qu’une moto à essence aux performances équivalentes. Le duo de BRP développant 35 kW de puissance, cela fait en sorte que la plaque coûte 498,95 $ au lieu de 712,31 pour une Yamaha MT-07 si l'on reprend le même exemple. Cela n’annule pas la différence de prix initiale, mais disons que cela contribue à la diminuer si vous pensez conserver le véhicules longtemps.