Chevrolet Corvette E-Ray 2024 : l'électrification au service de la performance
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Denver, Colorado – La Chevrolet Corvette a soufflé ses 70 bougies cette année, un âge que très peu d’autos sport peuvent se targuer d’avoir franchi à travers l’histoire. Même la mythique Camaro sera envoyée à la retraite après l’année modèle 2024.
La Corvette, elle, est sauve. En fait, depuis l’avènement de la C8 - la première à avoir relocalisé son V8 small block derrière les occupants - le modèle renaît et attire aussi une clientèle plus jeune. Le constructeur au nœud papillon a gagné son pari. L’usine de Bowling Green, au Kentucky, tourne à plein régime, mais Chevrolet ne doit pas relâcher ses efforts.
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Dans le créneau des voitures exotiques, l’électrification fait petit à petit son apparition. On l’a vu il y a quelques années avec le trio composé de la Porsche 918 Spyder, de la Ferrari LaFerrari, et de la McLaren P1. Puis, la cohabitation de l’énergie électrique et d’une mécanique thermique s’est transportée à bord de bolides comme l’Acura NSX ou, récemment, chez Ferrari avec certains modèles hybrides.
La Chevrolet Corvette n’avait jusqu’ici rien à offrir à cette clientèle intriguée par le mélange essence-électricité. Mais tout ceci a changé en janvier 2023 lorsque le constructeur américain a levé le voile sur cette E-Ray 2024. Plus tôt en septembre, Chevrolet avait convié quelques journalistes automobiles pour un premier contact avec la nouvelle Corvette électrifiée.
« Comme pas une »
La voiture est décrite par les stratèges du marketing comme étant une voiture « Comme pas une » ou One like none si vous préférez le slogan officiel de Chevrolet.
D’emblée, la robe de la Corvette E-Ray 2024 adopte quelques traits distinctifs qui vont même jusqu’à altérer l’écusson Stingray sur le coffre arrière. Cette troisième version de la « Vette » reprend également les ailes élargies de la Z06, mais avec une allure « un peu plus effacée » avec plusieurs grillages assortis à la coloration de la carrosserie.
En revanche, les appendices aérodynamiques (aileron avant, bas de caisse et becquet arrière) sont installés d’office, tout comme les freins en carbone-céramique qui confirment les performances rehaussées du bolide à moteur central. Sur les flancs, l’écusson « E-Ray » s’assure que les passants ne la confondent pas avec la Z06, l’autre option vitaminée de la gamme. Les jantes en aluminium (20 pouces à l’avant et 21 à l’arrière) sont d’ailleurs spécifiques au modèle assisté par l’électricité. Il est bien entendu possible d’opter pour des jantes en fibre de carbone à des tarifs dignes d’une voiture sous-compacte... Sachez que ces jantes retranchent 19 kg au poids total de la bête.
Le niveau d’exclusivité de cette E-Ray permet à Chevrolet d’élargir son carnet d’options. La voiture peut ainsi être commandée avec le toit rigide (qui peut encore être enlevé manuellement) ou le toit rétractable. Le nombre de couleurs disponibles s’allonge à 14, dont quatre sans frais supplémentaires. Pour cette première journée sur la route, la voiture essayée portait fièrement le Gris loup de mer triple couche, un nouveau coloris en 2024. Chevrolet offre aussi une belle sélection de bandes décoratives uniques à cette variante.
La seule Corvette à motorisation hybride au monde se démarque surtout de ses pairs par la présence d’un très petit moteur électrique sur l’essieu avant. Ce dernier confère non seulement à l’auto un rouage intégral, mais en fait la Corvette la plus rapide à l’accélération de l’histoire. Selon Chevrolet, le 0 à 96 km/h prend 2,5 secondes, soit un dixième de moins que le temps requis à la Corvette Z06 pour le même exercice.
Outre le V8 LT2 de 6,2 litres de la Corvette Stingray qui, à lui seul, livre 495 chevaux, la voiture compte sur ce moteur électrique de 160 chevaux. Ce dernier est quant à lui alimenté par une batterie lithium-ion d’une capacité de 1,9 kWh, installée entre les occupants - dans le tunnel de transmission. Résultat : la Corvette E-Ray 2024 génère 655 chevaux et 595 lb-pi!
Sur la route
Nous avons conduit la Corvette E-Ray sur les belles routes sinueuses de la région de Denver au Colorado. Le constructeur a d’ailleurs testé sa mouture à quatre roues motrices dans cet État américain où les conditions hivernales ont permis aux ingénieurs de parfaire l’efficacité du rouage intégral. Heureusement, le beau temps a fait en sorte que le toit escamotable reste caché dans son compartiment pour cette première excursion.
Précisons que la monte pneumatique Michelin de la Corvette E-Ray est de type quatre-saisons, un choix discutable étant donné les capacités incroyables de la voiture. Les consommateurs peuvent toutefois opter pour les mêmes pneus à hautes performances que la Z06 pour plus d’adhérence.
Cependant, la mission première de cette Corvette quatre-saisons est davantage celle d’une authentique GT. Il y a donc cette « approche confort », qui n’a rien à voir avec celle de la Z06, plus aiguisée dans son exécution. Même si Chevrolet nous a assuré qu’un ensemble hivernal était déjà en préparation pour les téméraires qui oseront conduire la E-Ray douze mois par année, les pneus Michelin Pilot Sport quatre-saisons 4+ profitent d’une gomme optimisée (à l’intérieur de quelques rayures) pour les températures froides. Nous n’avons pas pu tester ces pneus dans des conditions hivernales, mais il est clair que d’authentiques pneus d’hiver seront plus pertinents pour le climat particulier du Québec.
Heureusement, dame Nature s’est montrée clémente avec un bitume suffisamment réchauffé pour illustrer ce dont est capable la voiture, surtout lorsque poussée dans ses derniers retranchements. L’apport des deux roues motrices supplémentaires vient sécuriser le conducteur dans les virages en épingle, et ce, malgré les pneus quatre-saisons. En fait, la nouvelle Corvette E-Ray rappelle la défunte Acura NSX sur ce point : les deux supervoitures donnent vraiment l’impression de rouler sur des rails. Des trois déclinaisons disponibles, la Corvette E-Ray est sans contredit celle qu’il faut choisir pour les longues virées.
En piste, mais…
Le lendemain de ce premier contact sur la route, Chevrolet a voulu nous donner un meilleur aperçu du potentiel de sa nouvelle voiture. Le hic, c’est que quelques troubles techniques sont venus miner l’organisation de l’événement au PPIR (Pikes Peak Intenational Raceway). Nous n’avons pas pu pousser la voiture en ligne droite, l’exercice d’accélération ayant été annulé avant même que nous puissions faire l’essai du système de départ-canon sur la ligne droite.
En revanche, le circuit fermé était disponible pour quelques tours où nous avons pu en apprendre un peu plus sur la Corvette hybride. Malgré son poids supérieur, la nouvelle variante, aidée par ses pneus à hautes performances, n’a pas montré de signes inquiétants au niveau de la tenue de route. En poussant davantage dans les virages à basse vitesse, il est possible de faire crisser les pneus. On sent également qu’il y a un peu plus de poids à l’avant, mais pas suffisamment pour nuire à la tenue de cap. Et même si, à quelques reprises, le train avant cherchait à sous-virer, le rouage intégral se chargeait de ramener la voiture dans le droit chemin.
Encore une fois, nous avons senti que les organisateurs de l’événement ne voulaient pas que nous poussions trop fort dans les portions à haute vitesse. Les distances de freinage étaient très longues par exemple. Pourtant, les freins en carbone-céramique se sont montrés très mordants durant toute la matinée.
Les ingénieurs nous ont aussi permis d’utiliser le mode Charge+ qui priorise la recharge de la batterie, plutôt que les performances de la voiture. Avec ce mode sélectionné durant notre session en piste, nous avons senti qu’il manquait un peu de puissance sous le pied droit. Rien de bien grave, mais tout de même, il est rassurant de savoir que la batterie peut regagner son énergie très rapidement. À ce sujet, les ingénieurs nous ont assuré que l’unité conservait toujours une réserve d'électricité en banque, ne serait-ce que pour offrir au conducteur le plein potentiel de la mécanique en tout temps.
Une Corvette en drift?
L’autre exercice au programme consistait à conduire la Corvette E-Ray sur un petit circuit d’auto-cross avec comme plat de résistance un immense cercle de dérapage au centre. Ici, nous nous sommes vite rendu compte que la nouvelle variante n’était pas trop difficile à faire décrocher lorsque tous les systèmes d’aide à la conduite étaient désactivés. Là où la voiture se distance des autres bolides exotiques, c’est dans la manière dont elle se comporte pour garder le dérapage contrôlé.
En effet, cette manœuvre oblige souvent le conducteur à constamment doser la pression sur la pédale droite. Dans le cas qui nous intéresse, la pédale doit plutôt être enfoncée — ou à plus de 50% de son débattement — dans le plancher pour que la drift soit maintenue. Remarquez, après quelques essais, la voiture s’est avérée très facile à maîtriser à l’intérieur de ce parcours gommé.
Le poids et le prix de l’électrification
Malgré les efforts des ingénieurs pour épargner chaque kilogramme possible, la Chevrolet Corvette E-Ray 2024 n’échappe pas à cette dure réalité : le poids de toute cette technologie embarquée se fait ressentir, mais pas au point de gommer les prestations du bolide.
Le constructeur américain a désormais deux Corvette très performantes pour ce public avide de sensations fortes. Si la Z06 s’adresse aux puristes, la Corvette E-Ray vise plutôt une clientèle qui préfère les longues balades sur de jolies routes sculptées dans l’arrière-pays. Sa présence en circuit fermé n’est pas déplacée, mais disons que l’autre enfant terrible de la gamme semble mieux outillée pour survivre au stress d’une journée en piste.