Ferrari SF90 - L’étalon du progrès
Mesurer le progrès dans le monde de l’automobile n’est pas chose facile. Regarde-t-on la baisse de la consommation, l’augmentation de l’espace intérieur, la résistance aux chocs? Pour une voiture de sport, c’est plus simple : le temps autour d’un circuit sera un juge de paix factuel et définitif. Une métrique unique permet d’évaluer l’efficacité du moteur, la motricité, les suspensions, les freins, la direction et les pneus. Et Ferrari possède sa propre piste de développement : Fiorano.
Prenez la lignée des supercars Ferrari de route. En 1984, la 288 GTO réalisait le tour du circuit de Fiorano en 1 minute 36 secondes. Suivirent la F40 à 1 m 29,6 s (1987), la F50 à 1 m 27 s (1995), l’Enzo à 1 m 24,9 s (2002) puis la LaFerrari à 1 m 19 7 s (2013). Il s'agissait d'autos à production limitée, rares, inatteignables. Aujourd’hui, un modèle de « série » remet les pendules à l’heure… ou plutôt le chronomètre : 1 m 19 s tout rond. Mais pour en arriver là, il a fallu développer des trésors d’habileté technique.
La fée électricité
La SF90 est en même temps la Ferrari de route la plus puissante de l’histoire et la première traction avant électrique de la marque. Tout cela grâce à l’hybridation. Par rapport à la F8 Tributo, le F154 (ici en version FA) a été largement revu : augmentation de l’alésage (de 86,5 à 88 mm), nouvelles culasses (injecteurs montés au centre, chambres de combustion optimisées), de nombreuses pièces mobiles (vilebrequin, pistons, bielles, arbres à cames) revues, les collecteurs d’admission et d’échappement ainsi que la ligne d’échappement sont nouveaux alors que les turbos révisés élèvent la pression de 7% dans les cylindres. Son poids diminue de 25 kg et sa hauteur totale de 75 mm. Somme toute, la puissance passe de 710 à 769 chevaux… ce qui se rapproche des V12 de la marque.
Ajoutons maintenant les trois moteurs électriques. Le premier est placé entre le V8 et la boîte à double embrayage à 8 rapports (qui effectue ses changements en seulement 200 millisecondes). Appelé P1, il est très compact grâce à sa technologie à flux axial et réalise l’apport principal de puissance électrique, mais peut aussi combler les « trous » pendant les changements de rapports ou la remise en vitesse des turbos. Les deux autres, appelés P4, sont installés dans le train avant et assurent la traction en mode électrique (jusqu’à 135 km/h) ainsi que le contrôle vectoriel du couple et la marche arrière. Ils sont désactivés au-delà de 210 km/h. À eux trois, ils délivrent 217 chevaux. Soit un total de 986 chevaux SAE (1000 chevaux DIN tout rond en Europe).
Le système hybride pèse au total 270 kilos (incluant la batterie de 7,9 kWh permettant de parcourir 25 km sans émissions). Pourtant, la SF90 ne pèse que 135 kilos de plus qu’une F8 Tributo. C’est en combinant l’aluminium, la fibre de carbone (notamment autour de la batterie), un alliage baptisé Inconel et des techniques de moulage creux que le poids a pu être maîtrisé. Le rapport poids/puissance de 2,02 kg/cheval pour la F8 descend à 1,59 pour la SF90. Impressionnant!
Sans maîtrise, la puissance n’est rien
L’aérodynamisme a été particulièrement travaillé : carénage intégral avec générateur de vortex à l’avant, roues forgées intégrant des ailettes (améliorant l’évacuation de l’air), aileron arrière en deux parties (une fixe et une mobile : en conduite rapide, l’air s’écoule des deux côtés de l’aileron, limitant la traînée, alors qu’en virage rapide ou freinage, la partie mobile s’abaisse, obstrue le passage inférieur, forçant l’air à passer au-dessus, générant l’appui). Matteo Biancalana, directeur de l’aérodynamique, précise qu’il s’agit de leur modèle de route le plus efficace sur ce plan après avoir demandé 50% plus de temps en soufflerie que la LaFerrari.
La SF90 offre quatre modes principaux de conduite : eDrive (mode électrique pur), Hybrid (mode par défaut, optimisation de l’efficacité), Performance (charge de la batterie priorisée, optimisation de la puissance) et Qualify (puissance maximale). Ajoutez plusieurs fonctions de gestion dynamique (contrôle de stabilité, de traction et vectoriel du couple), la gestion des moteurs électriques, le freinage à contrôle électronique « by wire » ainsi que la direction à assistance électrique et vous obtenez une expérience de pilotage à la carte.
Et si cela ne suffit pas, vous pouvez demander l’ensemble Assetto Fiorano (tiens…) qui permet de sauver 30 kilos grâce à des amortisseurs Multimatic, des ressorts et un échappement en titane et plus de fibre de carbone. Si cela ne vous contente pas encore, sachez que Ferrari est en train de travailler sur une « Versione Speciale », plus affûtée, à la manière de la 488 Pista. Et si cela ne vous satisfait toujours pas, vous pouvez vous adresser à des maisons comme Mansory ou Novitec, qui pourront faire monter la puissance jusqu’à 1100 chevaux. Vous êtes insatiables…
Feu vert
- Monstre de puissance… apprivoisé
- Lignes superbes
- Technologie avancée
Feu rouge
- Seulement 25 km en mode électrique
- Coût des options
- Espace pour les bagages ridicule