Une Mercury Lynx 1986 convertie en voiture électrique par un Québécois
Dans un article précédent, je mentionnais que la SAAQ avait des normes sévères pour autoriser la conversion de voiture pour une motorisation électrique. Pourtant, plusieurs québécois ont tenté l’expérience avec succès. Aujourd’hui, commençons par un des premiers véhicules convertis : une Mercury Lynx 1986 convertie par Jean-Marie Dubois, un spécialiste en systèmes électriques de l’automobile.
Vu la nature de sa profession, la fascination pour les véhicules électriques allait de soi. Cependant, en 1993, il n’y en a aucune sur le marché. La solution : construire la sienne, tout simplement!
- À lire aussi: Une Porsche 911 1998 convertie à l'électricité
- À lire aussi: Convertir une voiture à essence à l'électricité : la SAAQ n'est pas toujours d'accord
Après une tentative ratée en 1989 avec une Ford Escort 1986 qui a brûlée à cause d’un relais défectueux, M. Dubois recommence avec une Mercury Lynx de la même année-modèle. Au début des années 1990, les batteries lithium-ion soit trop chères, soit très difficiles à obtenir; idem pour les moteurs à courant alternatif. Ainsi, il a acheté les composants qui étaient disponibles sur le marché : 16 batteries au plomb de voiturette de golf en 6 volts (au début du projet) et un moteur à courant continu. Afin d’optimiser la puissance du moteur, Jean-Marie conserve la transmission manuelle d’origine et ajoute une plaque de couplage.
L’emplacement choisi pour ces batteries au plomb est dans le compartiment à l’arrière. Jean-Marie s’est assuré de bien prendre les mesures sous le hayon et préparer les dessins techniques. La fabrication du boîtier en aluminium est assurée par un sous-traitant. Évidemment, tout le système électrique est conçu et installé par M. Dubois.
L’inspection d’homologation à la SAAQ est un franc succès. L’élément distinctif qui a impressionné les vérificateurs gouvernementaux est justement le détail des dessins détaillés des supports des batteries. En effet, l’analyse technique a démontré qu’en cas d’impact en arrière, le support des batteries descendait en bas du châssis, il n’y avait donc aucune intrusion de composants dans l’habitacle.
Petite anecdote : Jean-Marie se faisait souvent klaxonner lors des départs aux feux verts et des entrées sur autoroutes. Excédé, Il a mis le lettrage « Véhicule à Propulsion Électrique » sur le pare-chocs. À partir de ce moment, les coups de klaxons ont été remplacés par des pouces en l’air! Par la suite, grâce à des modifications subséquentes à la motorisation, la Mercury avançait un peu plus rapidement. D’ailleurs, la dernière itération possédait dix batteries 12V de type « deep cycle » de camion lourd.
Malheureusement, la Mercury Lynx n’est plus de ce monde. La rouille s’est mise de la partie et le cancer s’est propagé rapidement. En 2005, les éléments de valeur ont été extirpés de la compacte électrifiée, puis la carcasse a été mise à la ferraille.
On ne peut que souligner son dévouement dans ce projet : outre tout le temps requis, Jean-Marie y a investi autour de 25 000 $ en 1993 (environ 46 000 $ en 2023)! Malgré tout, il le referait encore : « J’ai tellement eu de plaisir avec ce projet difficile! En plus, j’ai obtenu mes plaques. Selon la caissière, j’étais le premier au Québec à faire immatriculer un véhicule électrique converti, car il n’y avait pas de procédure écrite à la SAAQ à ce sujet! Un directeur a dû m’arranger quelque chose vite fait au niveau administratif. »
Son seul regret? Jean-Marie a déposé deux brevets directement liés à cette conversion en 1997 et 2005. Malheureusement, le peu d’intérêt des manufacturiers envers les VÉ et sans aide financière pour la promotion, ces brevets sont aujourd’hui échus.
Finalement, même si sa voiture électrique actuelle est bien plus performante que la Lynx 1986 électrique, cela ne remplace définitivement pas la fierté de rouler dans un véhicule qu’on a fabriqué soi-même.
Spécifications rapides : |
|
Type de batterie |
Batterie à plomb à électrolyte liquide: 12 V, 100 ampères pendant 57 minutes |
Voltage du système |
120 V (10 batteries mises en série) |
Capacité nominale de la batterie |
17,3 kWh |
Type de moteur |
Moteur DC « Advanced DC » série 203-06-4001A |
Puissance maximale du moteur |
55 hp |
Transmission |
Manuelle d’origine Ford 5 rapports |
Accélération |
« Et mon Dieu Seigneur … » |
Vitesse maximale |
104 km/h |
Autonomie |
48 à 60 km selon les conditions |
Poids du véhicule |
1250 kg |