Baisse de taxe sur l'essence : Québec estime que les pétrolières seraient trop gourmandes
Par Jean-Michel Genois Gagnon
Contrairement à l’Alberta et l’Ontario, Québec n’a pas l’intention de réduire sa taxe sur l’essence. Le gouvernement Legault laisse sous-entendre que les pétrolières seraient trop gourmandes et en profiteraient pour se remplir les poches.
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« On sait qu’une baisse de taxe de l’essence a tendance à profiter aux entreprises pétrolières plutôt qu’aux consommateurs, car elles augmentent leur marge de profit. C’est exactement ce qu’on veut éviter », a répondu Fanny Beaudry-Campeau, porte-parole du ministre des Finances, Eric Girard.
Devant la flambée des prix à la pompe des dernières semaines à travers le pays, l’Alberta a décidé de suspendre sa taxe provinciale sur l’essence. Cette mesure appliquée depuis le 1er avril se traduit par un rabais au litre d’environ 11 cents en raison de la récente hausse de la taxe fédérale sur le carbone.
Le premier ministre de l’Alberta Jason Kenney, qui a promis de surveiller tous les détaillants, prévoit maintenir cet allègement aussi longtemps que le prix du baril de pétrole brut sera au-dessus de la barre des 90 $ US.
Du côté de l’Ontario, le premier ministre Doug Ford a révélé, lundi, avoir l’intention de diminuer de 5,7 cents du litre la taxe sur l’essence. Elle devrait passer de 14,7 à 9 cents le litre. Si le projet de loi est adopté, il entrera en vigueur le 1er juillet, et ce, pour une période de six mois.
Un exemple en 1984
Malgré les récents records enregistrés au Québec sur le prix du litre d’essence dans différentes villes, comme à Montréal et à Québec, le gouvernement Legault n’a pas l’intention d’emboîter le pas des autres provinces.
En plus de l’argument lié à la gourmandise des pétrolières, le ministère des Finances affirme qu’une telle décision irait à l’encontre des cibles environnementales qu’il désire atteindre en 2030, « dont la composante du transport routier est la plus importante ».
Pour appuyer sa position sur la taxe, le ministère des Finances fait référence au texte « Baisser les taxes sur l’essence, une fausse bonne idée » récemment publié par le chercheur principal à la Chaire en fiscalité et en finances publiques de l’Université de Sherbrooke, Luc Godbout.
Ce dernier note dans son texte que sur 1,97 $ le litre, le consommateur paie 66 ¢ en taxes, dont 19,2 ¢ pour la taxe provinciale. Il évoque qu’en 1983, le gouvernement avait réduit la taxe sur les carburants et que les mois suivants « les prix avaient ensuite presque retrouvé leur niveau d’avant ».
« En conséquence, une bonne partie de la réduction de la taxe n’a pas été transmise aux consommateurs », écrit-il.
Sous surveillance
En mars, le gouvernement Trudeau a demandé au Bureau de la concurrence de mettre sur pied des équipes afin d’éviter qu’il ait de la « collusion et des pratiques déloyales » avec les prix de l’essence.
En début d’année, le président des États-Unis, Joe Biden, avait lancé un avertissement aux pétrolières afin qu’elles ne profitent pas de la guerre en Ukraine pour faire grimper leurs profits.
Pour aider les consommateurs à faire face à l’inflation, le ministère des Finances a réitéré qu’il versera prochainement un chèque de 500 $ aux 6,4 millions de Québécois qui gagnent 100 000 $ et moins.
« Au dernier budget, nous avons agi pour aider les Québécois à faire face à la hausse du coût de la vie en leur remettant de l’argent directement », a souligné Mme Beaudry-Campeau.