Bugatti Veyron, utopie
Les sociologues, psychologues et autres « ogues » le confirment : l’humain a besoin de rêver. Au Père Noël, au prochain gros lot du 6/49 ou à la copine de son meilleur ami. La Bugatti Veyron a été créée pour nourrir le rêve humain. Tant qu’à ressortir un nom prestigieux des boules à mites, aussi bien le faire en grand ! Pourtant, ce qui devait s’annoncer une belle aventure est rapidement devenu un cauchemar qui a englouti énormément de temps et d’argent. Reste que Bugatti, propriété de Volkswagen, a fini par présenter son bolide de rêve.
Cette voiture de rêve, c’est la Veyron 16.4. Veyron, pour Pierre Veyron, ancien pilote sur Bugatti dans les années 30, 40 et 50, et 16.4 pour seize cylindres, quatre turbocompresseurs. Les ingénieurs de la marque mythique voulaient faire de la Veyron la voiture de route la plus rapide au monde. Mais ils n’y sont pas parvenus en criant « Bugatti ! » Après avoir connu sa part d’ennuis techniques à ses débuts (des « décollages » aérodynamiques qui ont renvoyé designers et ingénieurs à leurs ordinateurs, des pneus Michelin PAX qui ne pouvaient supporter des vitesses si dramatiquement élevées et une fiabilité pour le moins aléatoire), la Bugatti Veyron s’avère désormais techniquement au point. Mais comme tous ces problèmes ont retardé le projet, la super voiture est arrivée sur le marché au moment où les prix de l’essence flambaient et que l’automobile se faisait de plus en plus politiquement correcte. Au début du projet, il était déjà établi que la Veyron ne rapporterait pas de bénéfices à Volkswagen mais plutôt le prestige. Espérons qu’ils aiment vraiment le prestige, car la Veyron a rapporté, jusqu’à présent, beaucoup plus de problèmes que de retombées économiques !
64 soupapes !
Qu’un moteur thermique produise plus de 1 000 chevaux, ce n’est plus une bataille contre la technologie. C’est la réalité, puisqu’il existe. Celui de la Veyron fait même 1001 chevaux ! Nous étions déjà tout excités par le rapport de 107,7 chevaux au litre de la Honda S2000 (2,2 litres pour 237 chevaux). Voilà que le W16 quadri turbo de la Veyron nous arrive avec rien de moins que 125 chevaux par litre (8,0 litres pour 1001 chevaux). Et que dire du couple de 923 livres-pied !dès 2 200 tours/minute. On ne peut être qu’ébahis devant ce déferlement de puissance… et de décibels. Ce moteur, extrapolé du fabuleux W12 que l’on retrouve sur les Bentley de nouvelle génération notamment, est aussi compact qu’un V12 traditionnel. Mais, pour bien s’exprimer, ce qu’il ne demande qu’à faire, il a besoin d’essence. De beaucoup d’essence. Le pied au plancher, comptez environ 80 kilomètres (12 minutes !) pour vider le réservoir de 100 litres. En revanche, vous aurez eu le plaisir d’atteindre les 406 km/h promis par le constructeur. Allo la contravention… Lors des essais des modèles de préproduction, une Veyron a même atteint 415 km/h à Bonneville (Salt Lake City) en Utah. En passant, Bugatti annonce un 0-100 en 3,4 secondes et un 0-300 en 16,7 ! Et croyez-le ou non, Bugatti se contente, sur son site Internet www.bugatti.com, de mentionner que la Veyron est une voiture sport pouvant atteindre des vitesses élevées. C’est bien le comble de la modestie ! Pour faire passer toute cette démence aux roues, Bugatti a choisi une transmission séquentielle à sept rapports à double embrayage, à la manière Audi. Le passage des rapports ne prend que deux dixièmes de secondes. Le rouage intégral est de type permanent et provient de chez Haldex.
Les aérodynamiciens qui ont œuvré sur la Veyron en ont sué une claque ! Les premiers essais, comme mentionné précédemment, se sont avérés catastrophiques, la voiture ayant une fâcheuse tendance au décollage. Je suis convaincu qu’à un certain moment, les gens de Bugatti ont pensé se recycler dans l’aviation ! Désormais, l’aspect aérodynamique est maîtrisé. Tout d’abord, un ordinateur gère constamment la garde au sol de la voiture. À une vitesse régulière, elle est de 125 mm. Puis, à partir de 220 km/h, elle diminue graduellement. Des clapets de diffusion, situés sur les côtés, s’ouvrent et se ferment au gré des décisions des ordinateurs, question de donner plus ou moins d’appui aérodynamique. Mais c’est surtout le gros aileron arrière mobile qui fait coller la voiture à la route. Cet appendice sert aussi d’aérofrein, comme sur une aile d’avion, lors d’un arrêt d’urgence. À noter que la Veyron décélère de 100 km/h à zéro en 31,4 m, une distance incroyablement courte. Il faut dire que la Veyron, malgré toute la technologie dont elle fait preuve (le câblage électrique fait une longueur totale de 2,7 km !), ne pèse que 1 888 kg. Merci tout de même aux freins en céramique à huit pistons à l’avant et six à l’arrière. Pour en finir avec l’aileron, précisons qu’en cas de chaleur trop intense dans le compartiment moteur, il s’incline de six degrés pour une meilleure ventilation. Il s’agit d’une position appelée cool down.
Dans l’habitacle, le meilleur côtoie le maximum ! Les matériaux démontrent une recherche intense et une richesse absolue. L’ergonomie aussi a été finement étudiée. Ce qui est un peu normal puisqu’à plus de 200 km/h, il n’est guère recommandé de commencer à chercher le piton qui active la climatisation ! Le système audio, à lui seul, doit valoir plus cher que bien des maisons. Fabriqué par Dieter Burmester, réputé concepteur allemand, cet appareil vous donne la chair de poule dès les premiers décibels.
Pour 2008, grande nouveauté. Une Bugatti Veyron Roadster serait sur le point d’être dévoilée. Nous écrivons bien « serait » puisque personne chez Volkswagen (Bugatti appartient à Volkswagen) ne nous a confirmé la chose. Si cette voiture voit un jour la production, avant de signer votre chèque de 1,5 million d’euros (à peu près 2 millions canadiens), sachez que si le toit en verre est remisé, il ne sera pas possible d’atteindre plus de 350 km/h. Décevant. En plus, il faut laisser le toit dans le garage caraucun espace de rangement n’a été prévu dans la voiture. Bugatti a au moins prévu une capote en toile pour ne pas se faire prendre par la pluie. Le poids total du bolide devrait augmenter d’environ cent kilos, ce qui nuira terriblement aux performances…
Aussi utile qu’un camion-citerne pour tondre le gazon, la Bugatti Veyron ne devrait même pas être considérée comme une voiture de production. Construite à seulement 300 exemplaires qui ne seront vendus qu’à des milliardaires qui les parqueront dans des musées privés, la Veyron est une non-voiture.
Feu vert
Voiture de rêve par excellence,
performances inimaginables,
bijou de technologie, exclusivité assurée
Feu rouge
Inutilisable sur les routes québécoises, voiture anti Green Peace,
prix ridicule, fiabilité à prouver,
même pas de boule pour une tente roulotte