Jeep Grand Wagoneer 2022 : le grand retour
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Aussi curieux que cela puisse paraître, le segment des grands VUS connaît une hausse de popularité marquée depuis quelques années. À un tel point qu’il s’agissait en 2019 (avant la pandémie) de l’un des segments où l’ascension était, en pourcentage, parmi les plus fortes de l’industrie. On explique cette hausse par l’arrivée du nouveau trio de General Motors qui trône au sommet de la catégorie, mais aussi à la demande de plus en plus grande pour les VUS capables de remorquer, de charger et de trimbaler la famille dans un confort exceptionnel.
Il faut scinder en deux segments le créneau des VUS grand format. Avec d’abord, des modèles plus « grand public » comme les Chevrolet Tahoe, Ford Expedition et Nissan Armada, puis avec des versions de grand luxe (Cadillac Escalade, Lincoln Navigator, Range Rover). Jeep débarque donc pour 2022 avec une nouvelle grande famille de VUS qui vient combler ces deux créneaux, bien que le luxe soit déjà omniprésent dans les modèles pourtant qualifiés d’entrée de gamme. En somme, le Wagoneer se charge de rivaliser avec Chevrolet, Ford et les autres, tandis que le Grand Wagoneer donne la réplique à Cadillac, Land Rover, Lexus, Lincoln, Mercedes-Benz et d’autres.
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Hommage au passé
Fiers de pouvoir affirmer que Jeep a inventé le segment du VUS « de luxe » en 1962 avec l’arrivée du Wagoneer, les stratèges ne cessent de multiplier les parallèles avec l’original. Pour la petite histoire, rappelons que le Wagoneer a été commercialisé de 1963 à 1983, pour ensuite être rebaptisé Grand Wagoneer en 1984, alors que Jeep introduisait le petit Wagoneer sur base de Jeep Cherokee. Le Grand Wagoneer, a longtemps fait carrière sous l’entreprise American Motors, a poursuivi sa route jusqu’en 1991, soit quelques années après le rachat de Jeep par Chrysler.
Aujourd’hui, bien que les designers du nouveau Grand Wagoneer évoquent quelques traits stylistiques inspirés du modèle d’antan, il est néanmoins difficile d’effectuer un réel parallèle. Certes, la vocation en est semblable, puisque le Grand Wagoneer de la fin des années 80 était considéré comme un véritable VUS de luxe, que l’on vendait d’ailleurs à plus de 36 000 $ en 1991. Or, Jeep aura mis beaucoup de temps avant de réintroduire le segment, bien que l’on ait tenté le coup en 2006 avec le Commander, qui débarquait à une mauvaise époque.
Jeep Wagoneer/Grand Wagoneer ou Grand Cherokee L?
Vous l’aurez peut-être constaté, Jeep - qui n’avait pas offert de VUS à trois rangées de sièges depuis 2011 - propose désormais deux gammes de modèles pouvant satisfaire les acheteurs de ce type de configuration. D’abord, le nouveau Grand Cherokee L débarqué depuis quelques semaines chez les concessionnaires, et qui réplique en quelque sorte à des modèles allant du Ford Explorer à l’Audi Q7. Un véhicule dont la vocation est distincte de celle de notre sujet, plus massif et offrant de meilleures capacités. Il faut dire que les Wagoneer et Grand Wagoneer font appel à un châssis à échelle dérivé de celui de la camionnette Ram 1500, ce qui permet notamment de remorquer des charges pouvant atteindre 10 000 lb. Alors oui, c’est la meilleure capacité de remorquage de tous les VUS du marché, bien que l’Expedition suive de près avec 9 300 lb.
Le festival du « best in class » se poursuit également lorsqu’il est question de volume de chargement, de dégagement à la tête, d’espace pour les occupants et de puissance mécanique, en excluant bien sûr les versions suralimentées du grand Range Rover de 575 chevaux. Jeep n’a donc pas fait les choses à moitié, ne souhaitant plus se faire damer le pion par la concurrence, alors que cette marque de VUS demeure l’une des plus reconnues mondialement. Voilà d’ailleurs la raison pour laquelle cette première saucette s’est effectuée à bord de la plus cossue des versions du Grand Wagoneer. Un modèle Series III littéralement équipé au bouchon, et qui en met plein la vue.
Livré à la maison
Pour les fins de ce premier essai, l’équipe de Stellantis allait livrer les véhicules au domicile d’une poignée de chroniqueurs. Le temps de quelques photos et d’une courte vidéo, j’allais donc prendre la route depuis la Rive-Nord direction Sainte-Catherine-de-Hatley, où on nous attendait pour une présentation technique que je jugeais nécessaire. Pourquoi? Parce que ce véhicule est à ce point fardé de gadgets et de technologies qu’il est impossible en quelques heures de faire le tour de tout ce qui s’y trouve. Comme si les ingénieurs avaient eu carte blanche pour lâcher leur fou, sans contraintes.
À titre d’exemple, la possibilité d’obtenir près de 75 pouces d’écran en considérant la présence d’un écran exclusif au passager avant, de l’affichage tête haute, d’un second pavé tactile rétractable ainsi que de deux écrans de divertissement arrière. Ces derniers intègrent les applications comme Netflix et Amazon Fire TV, permettant de visionner des films et séries via une connexion Internet intégrée ou via votre appareil mobile. Naturellement, il y a des sièges chauffants/ventilés avec fonction de massage aux réglages infinis, avec possibilité d’une banquette ou de sièges à la seconde rangée, qu’importe la version. Ajoutez à cela une puissante chaîne audio McIntosh à 23 haut-parleurs et un éclairage aussi riche que personnalisé, afin d’obtenir une ambiance unique. Cela dit, l’immensité de l’habitacle combinée à la richesse de la finition est certainement ce qui impressionne le plus. Jeep ne lésine d’ailleurs pas sur les choix de teintes en créant des harmonies de couleurs riches et originales, toujours de concert avec des matériaux de très belle facture. Pourrait-on dire que la finition est au niveau du Range Rover? Mmm… peut-être pas encore, mais nous y sommes presque.
En empruntant des trajets d’autoroute et de routes secondaires parfois amochées, le Grand Wagoneer a prouvé sa très grande solidité structurelle de même que l’efficacité de sa suspension. Une suspension pneumatique procurant un confort suprême, à hauteur réglable, permettant d’obtenir jusqu’à 10 pouces de garde au sol. Il est cependant clair que les jantes de 22 pouces qui équipaient notre véhicule d’essai composent moins bien avec les routes endommagées que les roues de 20 pouces, livrées de série sur les moutures moins cossues. Cela dit, le Grand Wagoneer fait sentir son poids. Une masse de 2 912 kilos (6 420 lb) qui impacte indubitablement sur la maniabilité générale du véhicule. En effet, le Grand Wagoneer est très confortable, mais peut-être pas aussi passionnant à conduire qu’on l’aurait souhaité. Il va de soi qu’avec des kilos en moins, le plaisir n’aurait été que rehaussé.
Pour mouvoir cette bête, Jeep fait appel à un moteur normalement exploité dans les modèles SRT. Un V8 de 6,4 litres produisant 471 chevaux, de série sur les Grand Wagoneer, alors que le Wagoneer abrite un V8 de 5,7 litres (392 chevaux) avec la technologie d'hybridation légère eTorque. Pas de motorisation électrifiée au menu. Que de gros V8 très puissants et agréables, mais qui ont pour désavantage de consommer à outrance... À un point tel que l’on se demande si la question a été évoquée par les ingénieurs, qui n’ont comme argument que la désactivation des cylindres. Un exercice qui ne se fait d’ailleurs pas en douceur et qui devient même agaçant.
Le V8 de 6,4 litres jumelé à la boîte automatique à huit rapports fait néanmoins de l’excellent boulot, proposant toujours une plage de puissance exceptionnelle. Or, au terme d’un trajet de 430 kilomètres qui n’a pas été trop pénible et ne comportait que très peu de conduite urbaine, la moyenne de consommation enregistrée était de 16,9 L/100 km. Une cote on ne peut plus réaliste puisque Jeep annonce une moyenne combinée de 16 L/100 km. Il s'agit de la plus élevée du segment, 10% de plus que celle du Cadillac Escalade et 14% de plus que celle du Lincoln Navigator. On s'attend à ce qu’un tel véhicule consomme. Sauf qu’ici, on a presque l’impression que Jeep s’est carrément fermé les yeux!
Capable, si vous l’êtes!
Il peut remorquer jusqu’à 10 000 lb, franchir de gros obstacles, accueillir jusqu’à huit occupants et offrir un confort royal. Il est aussi l’un des plus poussés sur le plan de la connectivité, ce qui en fait un véhicule de rêve pour les familles. Or, il faudra que ces familles soient en mesure d’acquitter la facture. Une facture qui choque, parce que plus élevée que celle de la concurrence. Jeep, qui n’appose curieusement aucun emblème de la marque sur le Grand Wagoneer, compte évidemment sur son image de marque pour séduire, souhaitant également faire de ce modèle un produit d’exception. Un véhicule ostentatoire et au design impressionnant, mais pas à la portée de toutes les bourses.
Pour un Wagoneer de base et sans option, l’aventure débute à 69 995 $ (+ 2 495 $ de frais de transport et de préparation). Pour le Grand Wagoneer, la porte d’entrée se situe à 100 995 $, allant jusqu’à 120 995 $ pour un modèle Serie III comme celui mis à l’essai. Puis, en ajoutant quelques options, vous pouvez atteindre 130 000 $, voire 135 000 $, et ce, avant même de tomber dans le catalogue des accessoires du concessionnaire!
Naturellement, il sera intéressant de mettre à l’essai une version un peu moins noble du Wagoneer qui pourrait sûrement impressionner, à 40 000 $ de moins. Cela dit, le succès de ce mastodonte sans complexe est selon moi assuré, bien qu’il ne fasse pas l’unanimité. Un produit polarisant, mais fort différent de ce que proposent Ford et GM, dans un marché qui, contre toute attente, continue de grandir.