Monarch : la reine canadienne de la route

Bien que le Canada soit un marché 10 fois plus petit que celui des États-Unis, il possède suffisamment de particularités pour avoir justifié des marques spécifiques. Monarch est l’une d’entre elles.

On coupe en deux!

Au lendemain de la Deuxième Guerre mondiale, Ford est en plein chaos. Son nouveau patron, Henry Ford II (le petit-fils du fondateur) doit tout réorganiser. Afin de préserver la marque Mercury, lancée par son père Edsel Ford, il décide de créer des divisions : Ford d’un côté, Lincoln et Mercury de l’autre. Les réseaux commerciaux sont aussi séparés.

Ce qui a du sens aux États-Unis, mais pas vraiment au Canada, qui est un plus petit marché avec un territoire plus largement disséminé. Qu’à cela ne tienne, on suit les ordres du patron! Mais les concessionnaires Ford demandent des modèles de moyenne gamme et les concessionnaires Mercury des modèles de gamme basse.

Pour le millésime 1946, Mercury Canada reçoit la 114, une Ford avec une calandre de Mercury (le nom 114 provient de l’empattement) alors que le réseau Ford a droit à une nouvelle marque, Monarch, à partir du 23 mars 1946.

Chronologie de la marque

1946 : Les Monarch sont essentiellement des Mercury restylées. Cinq carrosseries sont offertes (berline 2 et 4 portes, coupé, familiale et cabriolet). Elles reposent sur un empattement de 118 pouces. À l’intérieur, on retrouve une planche de bord de Ford. Un seul moteur est proposé : le V8 Mercury de 239 pouces cubes (po³) développant 97 chevaux.

Production : 3 858 exemplaires (année calendaire)

1947 : Pas de changements majeurs si ce n’est la disparition de la berline 2 portes.

Production : 6 670 exemplaires (année calendaire)

1948 : Pas de changements majeurs si ce n’est la disparition de la familiale et du cabriolet. Une période de vente courte et un calcul de la production non plus par année calendaire, mais par millésime expliquent le chiffre de production très bas.

Production : 723 exemplaires

1949 : Le 1er mai 1948, de toutes nouvelles Monarch sont présentées. Deux carrosseries proposées (berline 2 et 4 portes) avec finition deux tons en option. Elles reposent toujours sur un empattement de 118 pouces. Le V8 Mercury passe à 255,4 po³ et développe 110 chevaux. La planche provient dorénavant de chez Mercury (parce que les autos sont plus larges que les Ford). La marque bat son record de ventes grâce à l’effet nouveauté et un millésime plus long.

Production : 11 317 exemplaires

Photo: Ford

1950 : Changements esthétiques mineurs et apparition d’une familiale deux portes et d’un cabriolet.

Production : 6 056 exemplaires

1951 : Toute nouvelle calandre. Une transmission automatique optionnelle est introduite en cours d’année. La familiale deux portes disparaît.

Production : 7 682 exemplaires

1952 : Toute nouvelle carrosserie, toujours sur un empattement de 118 pouces. Le V8 de 255,4 po³ développe maintenant 125 chevaux. Apparition d’une gamme supérieure, baptisée Monterey (un nom apparu chez Mercury aux États-Unis en 1950). Les Monterey sont disponibles en coupé hardtop (une première pour Monarch) et cabriolet. Les Monarch « de base » viennent en berline 2 ou 4 portes.

Production : 4 553 exemplaires

1953 : Changements esthétiques mineurs. Pas d'évolution de la gamme. Pour la première fois, les ventes de Monarch dépassent celles de Mercury au pays. Cela se reproduira encore une fois en 1954.

Production : 7 852 exemplaires

1954 : Toute la gamme est revue avec trois lignes de modèles : Custom (berline 2 ou 4 portes), Lucerne et Custom Lucerne (berline 4 portes, coupé hardtop, coupé hardtop SunValley et cabriolet). La Sun Valley est une variante à toit en Plexiglas transparent (légèrement teinté vert). Un nouveau V8 à soupapes en tête de 256 po³ développant 161 chevaux est le seul choix pour tous les niveaux.

Production : 8 566 exemplaires

Photo: Ford

1955 : Présentation d’une nouvelle génération sur un empattement de 119 pouces. La gamme est à nouveau revue : Custom (berline 2 ou 4 portes, coupé hardtop), Lucerne (berline 4 portes ou coupé hardtop) et Richelieu (berline 4 portes, coupé hardtop ou cabriolet). Le V8 passe à 292 po³ et est disponible en 2 niveaux de puissance : 188 ou 198 chevaux (sur les automatiques). Les coupés Sun Valley ne sont pas reconduits (ils sont encore proposés chez Mercury au Canada).

Production : 6 151 exemplaires

1956 : Nouvelle calandre et décorations latérales modifiées. Une nouvelle 4 portes hardtop, baptisée Phaeton, est disponible avec les trois finitions alors que le coupé hardtop Custom disparaît. Le V8 passe à 312 po³ de cylindrée et est offert en 3 niveaux de puissance : 210 (Custom), 215 (Lucerne et Richelieu) ou 225 chevaux (tous modèles avec boîte automatique).

Production : 10 156 exemplaires

1957 : Les Monarch sont entièrement redessinées et l’empattement passe à 122 pouces. Trois niveaux de finition sont proposés : Lucerne (berline 4 portes, hardtpop 2 ou 4 portes, cabriolet), Richelieu (berline 4 portes, hardtop 2 ou 4 portes) et Turnpike Cruiser (hardtop 2 ou 4 portes). Le nom Phaeton est généralisé aux versions hardtop, 2 ou 4 portes. Deux V8 sont dorénavant disponibles : 312 po³ (255 chevaux, pour tous les modèles) et 368 po³ (290 chevaux, en option sur les Turnpike Cruiser).

Production : 8 468 exemplaires

1958 : Pas de Monarch cette année-là. Ford vient en effet de lancer l’Edsel, qui est positionnée exactement sur le même créneau que la Monarch. De plus, contrairement aux États-Unis, elle ne bénéficie pas d’un réseau de vente séparé au Canada et est offerte chez les concessionnaires Ford.

1959 : L’Edsel est un échec et, en proportion, c’est encore pire au Canada. Les Canadiens réclament le retour de la Monarch. Ce qui est fait (pourtant, l’Edsel est toujours vendue au Canada). Dénommée Mark II, la gamme Monarch s’étoffe. On retrouve trois niveaux de finition : Lucerne (empattement de 126 pouces, V8 383 po³ de 280 chevaux), Richelieu (empattement de 126 pouces, V8 383 po³ de 322 chevaux) et Sceptre (empattement de 128 pouces, V8 430 po³ de 345 chevaux). Trois carrosseries sont proposées : berline 4 portes (pas sur la Sceptre) et hardtop 2 ou 4 portes (baptisé Cruiser).

Production : 4 979 exemplaires (année calendaire)

1960 : Le style est assagi et la dénomination Mark II disparaît. Un motif de couronne apparaît sur les ailes avant et le coffre. Le choix des carrosseries est le même que celui de 1959, mais il y a des évolutions mécaniques. Un seul empattement (126 pouces) est disponible et il n’y a plus que deux variantes de moteur : 383 po³ (280 chevaux, pour la Lucerne) et 430 po³ (310 chevaux, pour les Richelieu et Sceptre).

Production : 4 494 exemplaires

Photo: Ford

1961 : Les Mercury rapetissent et les Monarch aussi. L’empattement passe à 120 pouces. Il n’y a plus que le niveau de finition Richelieu, disponible en trois carrosseries (berline 4 portes et hardtop Cruiser 2 ou 4 portes). Le moteur de base est un 352 po³ de 220 chevaux alors qu’un 390 po³de 300 chevaux est offert en option.

Production : 3 723 exemplaires

Une fin programmée

Le retour de Monarch en 1959 n’a pas eu le succès escompté. Il faut dire qu’entre temps, Ford était régulièrement monté en gamme (Fairlane en 1956, Fairlane 500 en 57, Galaxie en 59 et Galaxie 500 prévue pour 62).

Enfin, le lancement en 1962 des intermédiaires Ford Fairlane et Mercury Meteor, mieux adaptées au marché canadien, ne justifiait plus l’existence d’une marque séparée. Monarch aura écoulé un total de 95 248 exemplaires sur 15 millésimes.

Le nom reviendra, aux États-Unis comme au Canada, de 1975 à 1980 sous la forme d’une Ford Granada rebadgée Mercury. Mais ceci est une autre histoire…

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