Porsche Taycan 2020 : un missile électrique civilisé
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HAMBOURG, Allemagne – Quatre années après avoir présenté l’étude Mission E et annoncé la création de sa première voiture électrique, Porsche a dévoilé sa version de série sur trois continents, simultanément. Longue, large, basse et racée, la Taycan 2020 est presque identique à cette maquette et tient toules promesses faites au salon de Francfort. Elle fait même mieux, dans certains cas.
Les présentations faites, il était temps de la connaitre mieux et surtout de la conduire. S’étant juré de ne rien faire à moitié, Porsche a organisé le Taycan Road Show, un road trip qui allait mener 11 groupes de journalistes à travers neuf pays différents dans un convoi libre qui a compté jusqu’à 18 voitures.
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Ce périple de 6 400 kilomètres s’est amorcé à Oslo, en Norvège, pour se terminer trois semaines plus tard à Stuttgart en Allemagne, près de l’usine neuve où sont fabriquées les Taycan. Durant cette randonnée, les Turbo et Turbo S ont été ravitaillées en électrons grâce aux bornes de recharge rapide du réseau Ionity, dont Porsche participe au développement et à l’expansion rapide. Chez nous, un réseau semblable portera le nom Electrify Canada.
Croisement réussi
Le Guide de l’auto s’est retrouvé dans le troisième groupe qui allait relier la capitale danoise Copenhague et la ville portuaire de Hambourg, au nord de l’Allemagne. La première de ces deux journées de conduite nous a placés au volant d’une Turbo S, la plus puissante des Taycan, avec les 751 chevaux et 774 lb-pi de couple qui se déploient en mode Départ-canon. Sinon c’est 617 chevaux prêts à galoper dans les moteurs avant et arrière.
En trois dimensions, cette Turbo S couleur blanc Carrara métallisé ressemble beaucoup au croisement d’une Panamera et d’une 911, avec le profil allongé de la première et les parties avant et arrière épurées de la seconde. Nos deux journées de conduite vont confirmer que la Taycan se rapproche de la svelte berline par son comportement et de la légendaire 911 par ses performances.
Après avoir déposé les bagages dans le coffre, qui avale facilement deux valises et deux sacs à dos, on « descend à bord » d’une Taycan plus que l’on y monte. Elle est effectivement plus basse qu’une Panamera de 5,5 cm et plus courte de 23,6 cm. Elle est toutefois plus large de 28 mm et ses roues plus espacées en largeur, sur un empattement plus court de 19,9 cm. Pas étonnant que Porsche présente la Taycan comme étant une voiture sport et rien d’autre.
Pendant que l’on y est, l’accès aux places arrière va tonifier vos abdominaux puisque l’assise des sièges est plus basse et creusée, dans le but d’offrir suffisamment de dégagement pour la tête d’un adulte moyen. Grandes tailles, s’abstenir. Le dossier se replie en sections pour allonger le coffre et une banquette à trois places est en option.
Les bonnes manières
À l’avant, les sièges « sport plus » sont bien sculptés et la position de conduite est très juste, avec un bon repose-pied et trois jeux de réglages à mettre en mémoire. Le volant sport est quasi-identique à celui de la 918 Spyder, avec une grande molette à droite pour choisir l’un des cinq modes de conduite. Il est flanqué d’une paire de leviers classiques - dont le plastique sonne creux pour une voiture de ce prix - et coiffé de touches et de boutons fort utiles.
Droit devant, le tableau de bord en est entièrement dépourvu, à l’exception du minuscule sélecteur de la boîte de vitesses. Ce tableau de bord minimaliste est composé de quatre écrans numériques dont trois sont tactiles. L’ensemble est clair et lisible, avec des touches de contrôle haptiques bien placées, à défaut d’être la splendeur futuriste que l’on attendait. Pas facile, quand même, de trouver son chemin, à froid, parmi les multiples menus. Il est sage de passer quelques minutes à identifier les icônes qui mènent aux menus enfouis dans l’interface multimédia avant de prendre la route.
Malgré tout, il n’est pas évident de régler la climatisation, sur l’écran de la console, en appuyant sur des flèches. Une fois que c’est fait, par contre, on n’y touche plus. Bravo pour les buses d’aération dont on modifie le souffle et l’orientation du bout de l’index. En espérant que ces multiples systèmes électroniques soient fiables.
L’écran du passager s’est d’ailleurs révélé utile lorsque l’image du système de navigation a figé. On s’est débrouillé en y affichant le parcours complet en plus de profiter des instructions vocales et des graphiques affichés dans un des cadrans du mode Pur sur l’écran de 16,8 pouces, droit devant. On peut aussi afficher la carte au centre, sur l’écran entier, ou alors choisir le mode Classique avec les trois cadrans traditionnels.
Personnalité double
Dès les premiers instants de conduite, on sent l’aplomb et la solidité des Taycan. La qualité de roulement est impeccable et les mouvements de caisse superbement maîtrisés par la suspension à ressorts pneumatiques et amortissement variable, même si les routes danoises et allemandes parcourues n’étaient jamais aussi tortueuses que certaines des nôtres. Les sensations et le comportement des Turbo et Turbo S se sont révélés très semblables, malgré les pneus plus larges, aux flancs nettement plus bas de cette dernière.
Les Taycan sont maniables, avec des roues arrière directrices qui réduisent le diamètre de braquage et la servodirection plus rapide qui les accompagne. Des atouts optionnels sur la Turbo, dont notre voiture d’essai était dotée. Elles sont étonnamment agiles aussi, surtout pour des voitures de plus de deux tonnes métriques, un poids qu’elles portent cependant très bas, avec leur batterie de propulsion de 93,4 kWh, intégrée au plancher, sous l’habitacle. Pour atteindre ou même approcher leurs limites en virage, il faudra un circuit.
Pareil pour l’accélération. À la moindre poussée énergique de la pédale droite, la Turbo S vous enfonce dans votre siège. En départ arrêté, pédale enfoncée sec, le patinage est nul et l’accélération stupéfiante vous coupe carrément le souffle. Sur les routes du Danemark, l’idée ne nous est même pas venue de tenter un départ-canon en mode Sport + qui invoque brièvement la puissance maximale.
La Turbo est tout aussi exceptionnelle en accélération. Juste un peu moins violente. Conduite la deuxième journée, nous avons quitté les belles routes danoises pour gagner les mythiques autoroutes allemandes, que nous allions être les premiers journalistes à parcourir en Taycan.
Malgré le trafic, nous avons pu atteindre une vitesse affichée de 269 km/h sur une section dégagée de l’Autobahn 7, tellement la Taycan accélère et réaccélère avec force. Une sensation extraordinaire, littéralement.
Même à plus de 260 km/h, la Taycan Turbo est impeccablement stable et inspire une totale confiance. La puissance de ses freins est tout aussi remarquable, avec leurs étriers avant à dix pistons et leurs grands disques métalliques de 415 mm. Les disques en carbone-céramique de la Turbo S, optionnels sur l’autre version, sont encore plus grands. Dans les deux voitures, la modulation du freinage était superbe en toute circonstance, ce qui est rarissime, de nos jours.
Le silence de roulement est hors du commun : à 260 km/h, on peut se parler dans une Taycan sans hausser la voix, chose impossible à 100 km/h dans certaines autos sport. C’est de l’inédit et du jamais entendu, bien sûr.
Cette Taycan aux deux personnalités si fortes et tranchées plante très certainement un nouveau jalon dans l’histoire de l’automobile. Comme le drôle de fardier à quatre moteurs-roues électriques qu’a créé le patriarche Ferdinand Porsche, il y a plus d’un siècle. Et ce n’est que le premier acte du projet d’électrification de la marque qui porte son nom. La suite ne risque pas d’être ennuyante.