Bertrand Godin : l'artiste insoupçonné
On ne compte plus les tours de piste qu’a roulé ce pionnier de la vitesse du Québec jusqu’en Europe. De l’écurie Mygale en Formule Ford à la formule Atlantique en passant par les séries Indy Lights, un de nos plus grands géants de la course automobile sonne un 25 ans de carrière bien tassé, pour apporter.
En plus de l’automobile, Bertrand Godin cultive une solide passion depuis plus de vingt ans maintenant, un dada encore inconnu du grand public : la photographie.
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Sa toute première exposition baptisée « Bertrand Godin pilote et… photographe » nous plonge dans une mer surprenante laissant surgir des clichés de mouvement, de couleurs et d’action empreints d’une grande sensibilité. Le vernissage du pilote de course nous réserve donc de belles surprises.
En plus de prendre connaissance de son talent pour la photographie sportive, le public peut également admirer des scènes animalières et des paysages capturés avec intelligence. Évidemment, une section rétrospective nous fait voir un cheminement de carrière immense via des portraits touchants où l’on peut constater la force de concentration qui anime le regard du coureur automobile.
En entrevue avec Le Guide de l’auto, Bertrand raconte ses débuts en expliquant qu’il y a un lien direct entre le sport automobile et la photographie. « Il faut saisir le bon moment pour être dans l’action ». Une des situations les plus téméraires dans laquelle il s’est retrouvé pour chasser LA photo du siècle est celle d’un avion en marche d’où sautent des parachutistes en action. Bertrand n’avait jamais sauté en parachute de sa vie. Armé de son petit sac à dos de tissus, il décolle en Cessna et se retrouve à 10 000 pieds dans les airs. Dans sa perspective, l’autre avion dont il doit créer les clichés est plutôt loin.
Fouillant dans son sac pour trouver l’appareil adéquat, il s’avance, sort par l’embrasure de la porte au grand vent, se tient sur la rampe extérieure, un pied sur la roue et prend une série de photos en mitraillette pendant que son Cessna descend une courbe abrupte pour se rapprocher… Personne ne le tenait, quel sang-froid!
Que ce soit derrière un volant au Grand Prix de Trois-Rivières à 51 ans ou dans une carlingue près des cieux, l’adepte de sensations fortes qu’incarne Bertrand Godin est un athlète aimé des Québécois.
Un prof pas comme les autres
En plus d’être un artiste insoupçonné, Bertrand Godin est également un pédagogue d’exception. Instructeur de conduite à l’École nationale de police du Québec, il inculque des techniques de vigilance bien précises à ses élèves. Bertrand nous parle de l’importance du facteur humain. « Dans les stratégies de déplacement d’urgence, la communication et le contrôle de soi sont extrêmement importants. Il y a 40% de ta conduite qui dépend de tes connaissances directement reliées à ton sens de l’observation. »
Il travaille dans le but de faire des élèves en formation de véritables polices au volant avec tout ce qu’implique le métier : réflexes aiguisés, compassion, rapidité d’intervention, humilité. Bertrand confie être dans son élément et se sentir énormément valorisé par cet emploi particulier. Pouvoir transmettre son expertise au niveau technique et psychologique est un réel privilège pour lui.
Bertrand Godin est également impliqué avec PROCURE, un organisme québécois dédié à la lutte contre le cancer de la prostate. Il est l’instigateur d’une chic collection de mouchoirs de poche créés en collaboration avec l’entreprise Bold & Tailor dont une partie des fonds est versée à la fondation. En plus d’être accessible, il est fièrement entouré. Tous ses proches ainsi que sa famille étaient rassemblés auprès de lui pour l’encourager lorsque celui-ci a pris le micro avec émotion. Le travail acharné de Martine Girard, présidente du groupe À l’infini, et les bénévoles cumulant de nombreuses heures pour monter cette expo photo, qui sera en vigueur jusqu’au premier mai prochain, y sont certainement pour quelque chose.
Le fils de Bertrand, Anthony, est un amoureux des sciences, des mathématiques et étudie en technique d’usinage. Ironiquement, il est à cent années-lumière de s’intéresser au pilotage ce qui ne dérange pas le moins du monde notre coureur. « Ça va juste coûter moins cher ! » lance Bertrand en riant. Son épouse Annie Trudeau s’avère être une femme possédant une belle ouverture d’esprit. Elle a toujours poussé son mari à accomplir ses projets en l’encourageant et en mettant la confiance de l’avant. Il est impossible de passer sous silence la présence du grand-père de l’athlète, violoniste et musicien dans l’âme, fêtant ses 100 ans cette année.
Bref, un rassemblement charismatique qui résume bien la densité de la foule réunie lors de l’évènement. Lorsque le petit garçon de 10 ans a vu son idole Gilles Villeneuve remporter le grand prix du Canada en 1978 et s’est dit : « Un jour ce sera moi, ça. » On constate visiblement que Bertrand Godin a gagné son pari, et le cœur de tout l’monde au passage.
- « Bertrand Godin pilote et…photographe »
- Musée national de la photographie Desjardins à Drummondville
- Du 22 septembre 2019 au 1er mai 2020