Rabais pour véhicules électriques : un retour raté
Le gouvernement canadien, dans son budget 2019, a confirmé ce que plusieurs soupçonnaient depuis un moment : le retour des rabais pour les véhicules électriques après 11 ans d’absence.
Il est écrit en page 97 du budget qu’« Afin d’encourager plus de Canadiens à acheter des véhicules zéro émission, le budget de 2019 propose de fournir 300 millions de dollars sur trois ans, à compter de 2019-2020, à Transports Canada pour mettre en place un nouvel incitatif fédéral pouvant atteindre 5000 $ pour l’achat de véhicules fonctionnant grâce à des batteries électriques ou à des piles à hydrogène dont le prix de détail suggéré par le fabricant est de moins de 45 000 $. Les détails du programme suivront. »
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Ce court passage révèle plusieurs problèmes :
- Le gouvernement n’a donné aucun détail quant à la date d’entrée en vigueur de ces rabais, ce qui pourrait signifier qu’ils pourraient débuter en mai, juin… ou plus tard, risquant ainsi de freiner les ventes de véhicules électriques pendant plusieurs semaines, voire des mois puisque les consommateurs attendront avant d’effectuer leur achat. Grave erreur. Les concessionnaires risquent donc de voir leur inventaire de véhicules électriques ramasser la poussière d’ici là.
- Je ne connais aucun véhicule à hydrogène disponible à moins de 45 000 $.
- Si nous faisons un calcul rapide, on peut d’ores et déjà affirmer qu’à 300 M$ sur trois ans, on sera budgétairement limité à environ 20 000 véhicules électriques par année. Considérant que près de 2 millions de véhicules neufs ont été achetés par les Canadiens en 2018, on parle donc de 1% des ventes pour les trois prochaines années. Or, le Canada vise 100% de ventes de véhicules zéro émission d’ici 2040, dont 10% d’ici 2025 et 30% d’ici 2030 en cours de route. C’est ce qu’on appelle ne pas avoir les moyens de ses ambitions.
- De plus, ces cibles seront volontaires, c’est-à-dire que les constructeurs n’auront aucune obligation de les atteindre. Ayant déjà été témoin de la totale inefficacité des cibles volontaires d’émission des véhicules mises en place par l’ancien ministre de l’Environnement Stéphane Dion il y a plus de 10 ans, on ne peut s’attendre à aucun miracle.
- En limitant les rabais de 5000 $ aux véhicules de moins de 45 000 $, le gouvernement fédéral élimine de facto tous les véhicules électriques à 300 kilomètres d’autonomie et plus: Hyundai Kona Électrique, Kia Niro Électrique, Tesla Model 3, Nissan Leaf PLUS, etc. De plus, pour un acheteur potentiel de Bolt EV qui est offerte à 44 800$ + 1795$ de frais de transport et préparation + 100$ de taxes pour la climatisation, cela mène à un PDSF total de 46 695 $. Comme le PDSF au Québec doit inclure le tout, la Bolt sera-t-elle ou non admissible au rabais de 5000 $ au Québec alors que dans les autres provinces, le PDSF ne comprend que le prix du véhicule? Ainsi, tous ceux et celles qui se sont vus rassurés par la possibilité de se procurer une voiture électrique à grande autonomie, mais qui les trouvaient un peu chères se voient découragés de passer aux véhicules 100% électriques.
- Par ailleurs, qu’en est-il des véhicules hybrides rechargeables? ZÉRO détail. À suivre, nous dit-on.
- Bonne nouvelle par contre du côté des entreprises et des travailleurs indépendants. Le gouvernement propose que ces véhicules soient admissibles à une déduction fiscale complète l’anneée où ils sont mis en service. Les coûts en capital associés aux voitures de tourisme zéro émission seront déductibles jusqu’à un plafond de 55 000 $, plus la taxe de vente.
Bref, on peut vraiment dire que le gouvernement a raté le retour de l’aide financière aux véhicules électriques… après quatre ans de tergiversations. Disons que ça s’est passé pas mal plus vite lorsqu’il était question de soutenir les pétrolières.
N’est-ce pas ce même gouvernement qui nous disait qu’on pouvait faire les deux en même temps?