Peugeot… si ancienne et si méconnue
Peu connue au Québec et anonyme ailleurs en Amérique, la marque française Peugeot vient d’annoncer son retour sur notre continent d’ici 2026. Rappelons que Peugeot a importé des véhicules en nos terres entre 1958 et 1991, se retirant alors à cause de ventes décevantes. Mais quelle est donc l’histoire de cette marque?
(N.D.L.R. pour des raisons d’espace et de compréhension, cet article se concentrera sur l’aventure automobile de Peugeot. Nous ne tenterons pas d’expliquer la généalogie complexe de la famille ni toutes les ramifications impliquant des industries ou des membres de la famille Peugeot dans d’autres domaines que celui de l’automobile de tourisme.)
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Les débuts à Hérimoncourt
Il faut remonter jusqu’en 1810 pour avoir le portrait global de Peugeot, une famille d’entrepreneurs. Cette année-là, le moulin familial de Hérimoncourt, en Bourgogne-Franche-Comté, est transformé en aciérie par les frères Jean-Pierre II et Jean-Frédéric Peugeot. Dès lors, une foule de produits est fabriquée dans cette usine, des ressorts pour l’industrie de l’horlogerie aux armatures de parapluies et de corsets en passant par les moulins à café et, plus tard, les bicyclettes.
En 1885, les cousins Eugène et Armand Peugeot annoncent vouloir se lancer dans la production de bicyclettes, ce qu’ils feront dès l’année suivante. En 1890, la firme sort un modèle qui séduit les femmes, la Lion. D’où la tête de lion du logo que l’on retrouve toujours sur les voitures Peugeot, 130 ans plus tard.
Peugeot, Daimler, Panhard et Levassor s’associent
Armand Peugeot est un visionnaire et il anticipe le raz-de-marée que l’automobile naissante entraînera. À l’Exposition universelle de Paris, en 1889, Peugeot présente quatre prototypes du Type 1, une voiture tricycle à vapeur dont la chaudière est fabriquée par Léon Serpollet, un nom qui n’est pas inconnu aux amateurs d’histoire automobile. Dans la même exposition, un certain Gottlieb Daimler présente lui aussi une voiture, mais dotée d’un moteur à essence. Peugeot et Daimler s’associent et, en 1891, dévoilent une voiture à quatre roues munie d’un moteur à essence Daimler – fabriqué par Panhard et Levassor – sur un châssis Peugeot.
En 1892, Peugeot Frères devient Les Fils de Peugeot Frères. Coup de théâtre en 1894, alors qu’une automobile Peugeot remporte le concours Paris-Rouen, organisé par un journal local. Deux années plus tard, Armand se sépare d’Eugène, qui n’a jamais été entiché de la chose automobile, et fonde la Société des Automobiles Peugeot. De son côté, Eugène conserve les bicyclettes, motocyclettes, outils, articles ménagers, etc.
Une marque Peugeot concurrente
En 1905, les enfants d’Eugène, après la mort de ce dernier, reçoivent le feu vert de tonton Armand pour la production d’automobiles. Pour éviter la confusion, leurs voitures doivent porter le nom de Lion-Peugeot. En 1910, les deux firmes s’unissent sous le nom Société Anonyme des automobiles et cycles Peugeot. Jusqu’au début de la Première Guerre mondiale, Peugeot produit la moitié des voitures françaises. Après le conflit, l’arrivée de Citroën dans le décor jette une douche froide sur le bonheur des Peugeot en devenant le plus important constructeur automobile français.
Devant conjuguer avec un adversaire tenace, Peugeot vit des années difficiles. Contre toute attente, elle traverse la crise économique des années 30 sans trop perdre de plumes, merci au modèle 201 qui se vend très bien. C’est en 1928 que Peugeot commence à désigner ses véhicules avec une dénomination à trois chiffres, celui du centre étant invariablement un zéro (pour la petite histoire, rappelons qu’en 1963, Peugeot obligera Porsche à changer le nom de sa nouvelle sportive, la 901. Qui deviendra aussitôt la 911…). À partir de 2005, à cause de la complexité des gammes, Peugeot passe à un système parallèle à deux zéros centraux.
Peugeot devient PSA
Durant la Seconde Guerre mondiale, comme tous les autres manufacturiers automobiles, Peugeot transforme ses usines pour produire du matériel de guerre. Après les hostilités, la production reprend, mais la concurrence vient alors de Renault. À partir du milieu de l’année 1966, toutes les activités de Peugeot sont réunies sous le holding Peugeot Société Anonyme, PSA.
En 1971, Peugeot s’associe à parts égales avec Renault et Volvo – PRV – pour la création d’une gamme de moteurs révolutionnaires. Un V6 PRV voit le jour en 1974. On le retrouvera dans le coupé 504, dans la Volvo 264, dans quelques modèles Lancia et dans une certaine DeLorean. Un V8 est prévu, mais il ne verra pas le jour.
L’Aventure Peugeot racontée
Les années 70 sont constituées de hauts et de bas pour l’industrie automobile française. En 1974, Citroën déclare faillite tandis que Peugeot connaît beaucoup de succès. Cette dernière se porte donc à la rescousse de Citroën. Aujourd’hui, PSA est à la tête de Peugeot, bien sûr, et aussi de Citroën, DS Automobiles (la marque haut de gamme de Citroën), Vauxhall et Opel. En 1988, Peugeot s’approprie la filiale européenne de Chrysler (Rootes en Grande-Bretagne et Simca en France). Et, depuis 1992, PSA s’est associée avec la firme chinoise Dongfeng Motor Corporation.
Les années 80 sont prolifiques pour Peugeot qui semble faire flèche de tout bois, ce qui l’amène à développer de plus en plus de modèles. En 1988, la prolifique marque ouvre son musée, l’Aventure Peugeot.
Des hauts et des bas avant le retour en Amérique
Dans les années 2000, les ventes et les profits de PSA baissent dramatiquement, victimes des coûts de développement grimpants et d’une concurrence plus féroce. En quelques années, PSA supprime pas moins de 11 000 emplois. Suite à un redressement quasi spectaculaire, les profits sont de retour dès 2010. Durant les années suivantes, Peugeot renforce sa présence en Chine et en Amérique du Sud. Dans cette même veine, le 6 avril 2017, Peugeot annonce la création de PSA Amérique du Nord pour évaluer son retour de notre côté de la flaque, retour officialisé le 26 février 2019.
Depuis les débuts de la marque, il y a toujours eu un membre de la famille Peugeot à sa tête. Aujourd’hui, on n’en retrouve qu’un, Xavier, directeur de produit, d’abord chez Peugeot et maintenant chez Citroën. Armand serait fier de sa marque. Serait-il heureux du retour de Peugeot en Amérique? Seuls les chiffres de vente dans quelques années nous permettront d’imaginer l’aïeul se retournant dans sa tombe ou reposant paisiblement…