Dodge Nitro- Jeep Liberty, le monde à l'envers
Dans le monde de l'automobile, lorsqu'un véhicule connaît du succès, on s'empresse de l’améliorer, de le raffiner pour continuer de profiter du triomphe. Mais chez Chrysler, on semble avoir fait le processus inverse. En effet, au lieu de nous présenter en premier un Jeep Liberty revu et corrigé, on a quasiment décidé de repartir à zéro et de nous proposer une version concoctée par Dodge, le Nitro. Comme disent souvent nos voisins du Sud, il y a une erreur sur la photo. Même la plus élémentaire règle de marketing exige que l'on fonctionne autrement.
Et le pire dans tout ça, c'est que si le Dodge Nitro en impressionne certains par son apparence, il faut malheureusement conclure que les ingénieurs n'ont pas été à la hauteur de la tâche.
Malheureusement…
Ne croyez pas que je m'évertue à démolir ce modèle qui n'est pas dépourvu de qualités… mais celles-ci sont relativement rares. Pourtant, au premier coup d’oeil, la plupart des gens sont attirés par ses allures de baroudeur avec les porte-à-faux réduits au maximum, des passages d’aile en relief et une forme carrée propre à ce genre de véhicule. Mais toutes les personnes à qui nous avons cédé le volant du Dodge Nitro ont déclaré qu'ils n'avaient vraiment rien à dire de positif suite à leur bref essai routier. En fait, la suspension est très inconfortable, une caractéristique qui ne cadre pas tellement avec les routes de la belle province... De plus, l'expérience de la conduite n'est pas positive, car la direction est plutôt engourdie et le moteur de base, un V6 de 3,7 litres, est rugueux et assoiffé. Pour en remettre, la caisse penche de façon inquiétante dans les virages, ce qui nuit non seulement au plaisir de la conduite mais à son agilité. Quant au conducteur, il est confronté à un tableau de bord d'une certaine élégance, et force est d'admettre que les designers ont réussi à bien marier les pièces en aluminium à certains éléments chromés et à une disposition relativement ergonomique des commandes.
Malheureusement, la qualité des matériaux et de la finition laisse à désirer. Par ailleurs, la banquette arrière est des plus inconfortables tandis que l'espace réservé pour les pieds aux places avant est presque minuscule. Autre bémol, le toit ouvrant en tissu est une source de bruits éoliens qui deviennent rapidement agaçants. Autre irritant, le bouton de déclenchement d'ouverture de la portière qui est difficile d'utilisation.
On pourrait lui pardonner bien des faiblesses s'il s'agissait d'un VUS efficace, capable d'affronter des sentiers similaires à celui du Rubicon en Californie. Mais non, l'acheteur n’a droit qu'à un rouage intégral à temps partiel que l'on enclenche au moyen d’un bouton placé sur le tableau de bord. Et malgré ses airs de costaud, le Nitro ne possède pas de démultipliée afin de pouvoir négocier les parcours accidentés. Somme toute, il est possible de trouver mieux au même prix. Et le pire dans cette histoire c'est que l'un de ses concurrents majeurs est le Jeep Liberty.
Trail Rated
Parfois, je me demande ce que les décideurs ont derrière la tête lorsqu'ils prennent certaines décisions. Avec le Liberty, la division Jeep avait pratiquement le monopole du marché des petits VUS compacts. Mais au lieu de profiter de cette situation fructueuse, on a cannibalisé le produit en développant un concurrent dans la famille, le Dodge Nitro. Vous avouerez avec moi que ce n'est pas très fort.
On retrouve donc dans le Jeep Liberty la plupart des éléments du Nitro à l'exception de pouvoir choisir le système de rouage intégral. Le Command Trac II est un système à temps partiel qui ne peut être utilisé que sur les routes glissantes, enneigées ou glacées. Par contre, une démultipliée permet d'avoir plus d'efficacité que le Nitro à basse vitesse lorsque les conditions se détériorent. Le système Select Trac II lui est préférable car il peut être utilisé en toute condition et il possède également la sélection « Low ». Ce qui explique pourquoi le Liberty obtient la cote « Trail Rated » qu’on ne peut attribuer au Nitro en raison de son rouage intégral relativement simpliste. Les deux rouages du Liberty peuvent être désactivés et ainsi permettre de remorquer le véhicule sans problème Pour économiser du carburant, il est possible, sur les deux modèles, de sélectionner le mode deux roues motrices, les roues arrière étant les seules motrices.
Mais si les ingénieurs ont doté le Jeep d’un rouage intégral décent, ils ont curieusement omis d'intégrer le moteur V6 4,0 litres au catalogue. L'an dernier, ce moteur était offert sur le Dodge Nitro et avec une boîte automatique à cinq rapports en plus. Cette année, peu importe le modèle, seul le moteur V6 3,7 litres de 210 chevaux est disponible. Il vient de série avec une boîte manuelle à six rapports tandis que l'automatique en est une à quatre vitesses.
Ces choix incompréhensibles sont venus nuire à un modèle qui jouissait d'une bonne popularité et qui, avec quelques améliorations de détail, aurait pu continuer à se faire une place au soleil sur un marché de plus en plus encombré. On aurait pu également améliorer la fiabilité de ce modèle qui, tout comme le Nitro, est affectée par une fiche assez peu reluisante.
Et comme si ce n'était pas assez, on a eu l'idée d'introduire deux autres modèles concurrents aux Liberty et Nitro, soit les Compass et Patriot. Le premier est presque exclusivement destiné à une utilisation urbaine ou sur route seulement tandis que le Patriot peut vraiment rouler dans des sentiers assez intimidants.
Donc, au lieu de faire comme plusieurs constructeurs japonais qui se concentrent à développer et améliorer un seul modèle par catégorie, Chrysler — par le biais de ses divisions Dodge et Jeep — a voulu étirer la sauce en profitant de la réputation de la division Jeep avec des résultats contraires.
Feu vert
Rouage intégral efficace (Liberty)
Prix compétitif
Silhouette accrocheuse
Moteur 4,0 litres (Nitro)
Feu rouge
Consommation élevée
Finition étriquée
Boîte automatique 4 rapports (Liberty)
Rouage intégral sommaire (Nitro)
Toit ouvrant bruyant