SEMA 2018 : l'overdose
LAS VEGAS (Nevada) - En tant que passionnés de l’automobile, il est commun pour nous de s’injecter une surdose de bolides dans les veines. Que ce soit en gaspillant une soirée entière à consulter les petites annonces de Kijiji ou en se laissant emporter par les images virtuelles de Gran Turismo, notre passion est réellement une drogue qui nous force à la consommer régulièrement, des fois de manière un peu trop intense...
Pour tous les adeptes de moteurs, le SEMA est le summum des salons automobiles. Se concentrant uniquement sur le tuning, et accessible seulement aux gens travaillant dans l’industrie, il est l’endroit où l’on retrouve les projets les plus fantastiques que l’humanité soit en mesure de concocter avec l’acier, le plastique et un peu de créativité.
J’y suis allé cette année, pour la première fois de ma vie. Mon cerveau y a été mis en compote!
À l’image de Vegas
Si Vegas est la capitale du vice et de l’excès, le SEMA est son équivalent dans l’automobile. Plus de 6 000 kiosques se spécialisant en pièces et composantes à haute performance y sont, sans oublier la tonne de bolides exposés soit à l’intérieur, soit à l’extérieur des trois immeubles formant le Las Vegas Convention Center.
Mais le SEMA n’est pas qu’un endroit où on peut se magasiner de nouvelles jantes pour notre Lamborghini Huracán. On y retrouve aussi plusieurs constructeurs qui présentent leurs propres petites folies. Cette année, on a eu droit au Hellephant, un monstre de 1 000 chevaux, produit par Mopar, que les accros aux chevaux-vapeur pourront installer dans une vieille Dodge de leur choix, pourvu que celle-ci fût commercialisée avant 1976. Chevrolet, de son bord, a discrètement dévoilé une Camaro entièrement électrique. Même Honda s’est amusé avec un Ridgeline converti en véhicule hors route spécialisé, sièges de Civic Type R inclus!
Une seule journée au SEMA, ce n’est pas assez. On doit s’y promener quelques jours pour bien absorber son immensité et ses subtilités. On passe devant une camionnette RAM – une parmi tant d’autres – et on l’ignore, car notre regard est immédiatement attiré vers un autre projet automobile plus fluorescent, ou plus éclairé, pour ensuite se rendre compte que le pick-up que l’on a négligé est en réalité un poste de commande articulé rempli d’outils et de pièces pour mettre au point une voiture de course!
Comme journaliste, c’est intense, car il serait facile de se concentrer sur un seul bolide et de réaliser un reportage entier sur ce dernier tellement les projets sont cinglés. Une vielle Porsche 911 alimentée par un moteur électrique Tesla? Pas de problème, on l’a! Une BMW M3 propulsée par un moteur V8 de Dodge Challenger Hellcat? Tout à fait légitime. On est au SEMA, tout est permis!
Toutefois, c’est dehors que ça se passe
Certes, on peut rapidement se perdre parmi les kiosques vendant des pare-chocs, des phares, des chaînes audio ou des accessoires de camping, mais les véritables bijoux du SEMA sont à l’extérieur.
C’est en me promenant sous un soleil torride que j’ai fait ma surdose de passion. Mes oreilles saignaient en raison du vacarme qu’émettaient la Ford Mustang Roush de drift ET le Ford F-150 Raptor qui s’exerçaient à faire des acrobaties en tandem, sans arrêt, en plein centre du stationnement – boucane dans les ailes et tout le tralala.
Des camionnettes surélevées au point que je pouvais m’asseoir en dessous! Des Jeep sortant tout droit de l’enfer. Une Lamborghini, deux Lamborghini, une Porsche, une Ferrari – toutes modifiées comme si elles s’apprêtaient à être les vedettes de Rapides et dangereux 15.
Ensuite, il y a avait les hot rods. Des machines conçues dans des granges par des passionnés barbus et tatoués, encore plus drogués que moi. Des bolides rouillés de type rat rod, aplatis, élargis, allongés, collés au sol comme des limaces, il y en a plein.
Et que dire des incontournables classiques : les Ford Mustang Shelby, Cobra, GT40, Mercedes-Benz 300SL, Lamborghini Miura, Ford RS200, Jaguar E-Type, et même quelques camionnettes antiques Dodge Power Wagon possédées par Lucifer en personne!
Mes yeux chauffaient. Mon appareil photo n’en pouvait plus de capter tout ce qu’il voyait. Mes pieds étaient meurtris. J’avais mal. J’avais soif. Mais je m’en foutais. J’étais au paradais, complètement « buzzé » et dominé par ma drogue.
Aujourd’hui, une semaine plus tard, j’écris ce texte comme un toxicomane qui tente de reprendre un rythme de vie normal. Assis au bureau, un peu déprimé, observant la réalité froide et pluvieuse par la fenêtre, j’ai une insupportable soif de revivre la montée d’endorphine que j’ai ressentie au SEMA. Je veux m’acheter un vieux « bazou » que je pourrais personnaliser à ma guise, un projet tout aussi capoté que ceux que j’ai vus à Vegas.
Le SEMA, c’est le salon du diable. Une mauvaise influence. L’ami contre lequel ma mère m’avait prévenu étant plus jeune. C’est le show automobile le plus fou de la planète.