Maserati Ghibli 2018: Heureusement, il y a la nostalgie…
Il y a deux Ghibli. Une qui avale les kilomètres sur une autoroute, et une qui rouspète quand la chaussée se dégrade.
Il y a deux ans, la vie m’a donné le privilège d’écrire un livre sur les cinquante premières années du Guide de l’auto. Ces quelques mois, parmi tous les éditions du Guide et en communication quasi constante avec le fondateur, Jacques Duval, ont réveillé en moi des centaines de souvenirs alors que, tout jeune, je m’imprégnais de chaque mot de ce petit livre « de chars ».
Revisiter l’édition 1969 du Guide de l’auto a été particulièrement émouvante pour moi qui, à l’époque, avais tripé sur l’essai de la Maserati Ghibli. Presque 50 ans plus tard, Jacques Duval me remettait les photos originales de cet essai pour que je les incorpore au livre 50 ans de passion.
J’aurais dû refuser…
Inutile de vous dire que lorsque l’on m’a offert de conduire la plus récente Maserati Ghibli, je n’ai pas refusé!
Admettons que le charme est intact. Il s’agit d’une question éminemment personnelle, mais le style de la Ghibli est bourré de caractère. De caractère italien, ce qui nous amène à des lieux de la froideur allemande.
Dans l’habitacle, ça se gâte un peu. Beaucoup même. Tout d’abord, malgré de belles touches de luxe et des matériaux de bonne qualité, les initiés détecteront immédiatement un air de déjà-vu… De déjà-vu chez FCA. Les différents boutons et commandes sont les mêmes que dans une vulgaire Dodge Charger. Même la clé et l’écran central proviennent de la prolétaire américaine. Mais il ne faut pas virer fou non plus. L’important, c’est que ces boutons fonctionnent et c’est le cas ici. L’écran tactile de 8,4 pouces recèle l’un des systèmes multimédia les plus conviviaux qui existe, le Uconnect.
Ce n’est toutefois pas suffisant pour excuser une construction lâche, facilement détectable aux nombreux bruits de caisse qui envahissent l’habitacle et l’absence de plusieurs équipements dont sont dotées des voitures pourtant bien moins chères et prestigieuses. Pas de volant chauffant dans un véhicule qui vaut, au bas mot 85 000 $, c’est plutôt dur à avaler...
Plus de 400 chevaux
Suprêmement déçu, on appuie sur le bouton de départ. Et la magie refait surface! Précisons tout de go que la Ghibli peut recevoir un de deux moteurs. Celui du modèle de base est un V6 3,0 litres biturbo développant 345 chevaux et un couple de 369 livres-pied. Il procure à la voiture des accélérations correctes, mais pas aussi excitantes que l’on serait porté à le croire. Après tout, la Ghibli de base pèse quand même plus de 1 800 kilos. Une boîte automatique à huit rapports expédie la cavalerie aux roues arrière.
L’autre moteur (en fait c’est le même 3,0 litres double turbo) est plus populaire et libère dans les 404 chevaux, ce qui ajoute au plaisir de conduire… et à la facture à l’achat. Baptisée S Q4, cette Ghibli fait preuve d’un caractère plus bouillant qui sied mieux à ses origines et à son physique. En pleine accélération, le V6 s’exprime avec volupté, surtout si l’on a pris la peine d’activer le mode Sport. Comme on peut s’en douter, le chiffre 4 qui orne le coffre signifie que le rouage est intégral.
Sur la route, l’on doit composer avec deux Ghibli. Son comportement routier sur une autoroute ou sur une route en parfait état est difficile à prendre en défaut. La tenue de route est solide, la tenue de cap parfaite et le confort n’est jamais altéré, peu importe la vélocité. Le contrôle de la traction n’intervient pas abusivement et aide à garder la voiture dans la bonne voie, pas à diluer le plaisir comme c’est trop souvent le cas. Ne pensez toutefois pas avoir affaire à une sportive à la Ferrari. Que nenni! La Ghibli est davantage une GT qui apprécie bien plus les autoroutes que les circuits. Ou les routes en mauvais état…
Parce que sur une route secondaire en mauvais état, et Dieu sait que l’on en a quelques-unes au Québec, on a plutôt affaire au côté indiscipliné de la Ghibli. Les craquements dans l’habitacle se font plus présents, la suspension est quelquefois trop dure et les bosses sont bien ressenties à travers la direction. Le châssis est en partie responsable de ce comportement fautif.
Si pour vous une voiture est davantage une relation passionnelle qu’un moyen de transport, la Ghibli pourrait fort bien vous plaire. Il vous faudra toutefois passer outre des commandes à la facture peu noble, un châssis vieillissant, un équipement peu relevé, un prix corsé et une fiabilité qu’on imagine peu reluisante.
La Maserati Ghibli actuelle n’a rien à voir avec le coupé qui avait fait le bonheur de Duval, et le mien, en 1969. Elle est devenue une berline balourde qui peut faire preuve de belles manières si la route s’y prête. Heureusement, j’ai la nostalgie facile. Et je me dis qu’un jour, la vie me permettra de faire l’essai de la vraie Ghibli, celle des années 60.
Feu vert
- Comportement routier agréable sur bonne chaussée
- Lignes intemporelles
- Puissance adéquate (S Q4)
- Exclusivité assurée
- Grand coffre
Feu rouge
- Comportement routier décevant sur route dégradée
- Qualité d’assemblage pauvre
- Plusieurs boutons bas de gamme
- Rapport prix / équipement très déficitaire
- Fiabilité douteuse