Dodge Charger 2017 : oubliez Sartorialto, pensez plutôt l’Équipeur!
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À la subtilité d’une Audi RS 7, à l’agilité d’une Porsche Panamera ou à la sobriété d’une Lexus GS F, la Dodge Charger, dans sa livrée Daytona 392, oppose une brutalité à la limite de la bestialité, à la fois décourageante et jouissive.
Décourageante parce qu’elle va à l’encontre de l’industrie automobile et de la société qui respectent de plus en plus l’environnement. À elle seule, une Charger Daytona 392 pollue autant que six Toyota Prius Prime... Mais cette Dodge est aussi jouissive, en ce sens qu’elle procure des plaisirs que bien peu de voitures peuvent encore apporter. Rien n’égale la poussée de son gros V8 lorsque les injecteurs fonctionnent à 100% (autrefois, nous aurions écrit « lorsque les huit barils sont ouverts »), ni la sonorité basse, ronflante et gutturale de l’échappement laissant libre cours à 485 chevaux de trait galopant dans un pré. Prière de vous écarter de leur chemin.
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De 292 à 707 chevaux
Malgré les pleurs et les cris des environnementalistes, au Canada les ventes de la Charger se maintiennent. Il faut toutefois avouer que ces ventes sont dopées par d’importantes quantités vendues à des parcs automobiles (entreprises de location, corps policiers, etc.) et que les versions de très haute performance, comme la 392 et la terrifiante SRT Hellcat ne représentent qu’un infime pourcentage.
Toujours est-il que la Charger se décline en plusieurs versions, à commencer par les SXT à moteur V6 3,6 litres de 292 chevaux aux performances tout à fait honorables mais qui consomme quand même passablement. Viennent ensuite les livrées R/T et Daytona qui empruntent au passé leurs noms, tout comme la Charger d’ailleurs. Leur V8 5,7 litres développe 370 chevaux, ce qui rend les dépassements, tous les dépassements, très faciles. Si l’on grimpe d’un barreau dans la hiérarchie, on découvre les R/T 392, SRT 392 et Daytona 392. C’est cette dernière version que nous avons essayée. Nous y reviendrons. Enfin, tout à fait en haut, il y a non pas le ciel, mais l’enfer avec la Hellcat de 707 chevaux. Du bonbon pour baby-boomer.
6,4 litres = 392 pouces cubes
La Dodge Charger Daytona 392, c’est d’abord un V8 de 6,4 litres atmosphérique, comme à l’ancienne. Pas de turbo ni de surcompresseur, ni d’arbres à cames ou de système de calage variable des soupapes. Juste la bonne vieille technologie des tiges-poussoirs (pushrods). Si la technologie du moteur date du paléozoïque, celle de la boîte de vitesses est beaucoup plus récente. Il s’agit d’une automatique à huit rapports, parfaitement au point et se mariant agréablement au moteur. Les roues motrices sont situées à l’arrière, ce qui est idéal pour des shows de boucane à n’en plus finir. Cette Charger excelle à ce futile, mais ô combien agréable, exercice.
Espérer s’en tirer avec une consommation moyenne de moins de 12 litres aux 100 kilomètres avec ce 6,4 litres relève de l’utopie. Ou d’un pied droit d’une infinie délicatesse seyant fort peu au caractère de la bête. En réalité, on parle davantage de 14 L/100 km. Avec un peu de mauvaise volonté, il est possible d’engloutir 16 ou 18 litres à tous les 100 kilomètres. Bien que de l’essence super soit recommandée, le moteur s’accommode très bien d’essence ordinaire. Pourquoi dépenser pour un scotch Macallan Sienna quand une bonne 50 tablette peut faire l’affaire?
Des kilos de plaisir
Une fois l’oreille interne rassasiée par les poussées intempestives des forces G et l’ouïe repue de la sonorité exquise du moteur, que reste-t-il? Une tenue de route saisissante. La Charger n’a pas la délicatesse d’une Porsche Cayman, on s’entend, toutefois, on se surprend à avoir du plaisir à la pousser dans les courbes. Ses dimensions hors normes et son poids d’Airbus A380 (pas celui du A330, j’ai vérifié) jouent évidemment contre elle, mais malgré tout, la direction est suffisamment vive pour permettre de placer l’imposante berline avec justesse dans les courbes et la suspension gère étonnamment bien les transferts de poids. À très haute vitesse, par contre, la voiture a tendance à devenir plus légère, contrairement à une Porsche Panamera, par exemple, aussi lourde, mais nettement mieux plantée sur la route.
Les pneus, d’immenses Pirelli P Zero 275/40ZR20 qui vont coûter le prix d’un condo au 85e étage d’un gratte-ciel dans Manhattan lorsque viendra le temps de les remplacer, sont certes durs, mais ils gardent le contact avec la chaussée avec une rare ténacité, même en virage rapide. Il convient toutefois de réserver le mode Sport aux pistes de course, ou aux pilotes possédant leur super licence de la FIA. Avec 485 chevaux menés par un accélérateur assez nerveux, l’arrière peut très vite se retrouver en avant…
Car il n’y a pas que les accélérations dans la vie…
Le pilote d’une Charger Daytona 392 a droit à davantage d’égards que celui qui conduit les versions plus basiques, une nécessité quand on est rendu à près de 65 000 $, une fois de nombreuses options ajoutées... Les sièges, qui m’ont semblé les mêmes que dans la Hellcat, sont très confortables et retiennent bien en virage. Le tableau de bord est bien agencé et ergonomique, mais les jauges principales, celles de l’odomètre et du compte-tours, mériteraient un graphique plus facile à lire.
Parmi les surprises, le système multimédia Uconnect, pourtant encensé par l’univers et par votre humble serviteur, m’a quelquefois fait dire de gros mots. Tout d’abord, y brancher mon iPhone a été beaucoup trop long. Puis, comme ça, en plein trafic, le système s’est fermé tout seul et n’est revenu à la vie que deux ou trois minutes plus tard. Enfin, brancher un appareil dans une prise USB une fois assis au volant n’est pas une sinécure puisqu’il faut se contorsionner le bras et le poignet droit pour accéder au fond de la console. Et je ne parle même pas de le faire en conduisant : c’est déjà compliqué à l’arrêt! Tant qu’à récriminer, j’aurais préféré un volant à la circonférence réduite de quelques millimètres, question de mieux respecter la vocation sportive de la voiture.
La Dodge Charger, surtout dans sa livrée Daytona 392 (et encore plus en Hellcat), n’est qu’un gros jouet pour baby-boomer qui a de l’argent à dépenser. Même si elle ramène l’automobile 40 ans en arrière, elle demeure des plus désirables. Elle sait faire appel à la nostalgie comme bien peu de voitures le font. Sauf, peut-être, sa sœur, la Challenger.