Porsche 911 Carrera 4S, boîte PDK et chronos de Turbo
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La version 2009 de la mythique 911 a été lancée il y a plusieurs mois et mes collègues l’ont déjà présentée et décrite en détail. Je vous épargnerai donc l’exercice de prononciation du mot allemand complet qui se cache derrière le sigle PDK et me contenterai de souligner que la boîte de vitesses à double embrayage automatisé qu’il désigne est la nouveauté la plus remarquée de cette nouvelle série, mais certainement pas la seule.
La plus récente variation de ce grand classique de la voiture sport, qui en est à sa 45e année, profite effectivement aussi d’une version toute neuve du six-cylindres à plat de la 911, maintenant doté de l’alimentation par injection directe. Ce moteur plus compact, plus frugal et plus rigide est malgré tout plus léger d’environ 6 kg et monté plus bas, ce qui abaisse aussi le centre de gravité et profite à la tenue de route. Il est également plus souple et plus puissant. Le groupe de la Carrera 4S est un 3,8 litres qui produit 385 chevaux
La version Carrera 4S mise à l’essai profite également d’un rouage intégral à pilotage électronique dérivé de celui de sa sœur la 911 Turbo en remplacement du rouage à contrôle hydraulique du modèle précédent. Les réactions et transferts de couple de ce nouveau rouage sont plus rapides et il peut faire varier la distribution du couple à l’infini entre les roues avant et arrière. En conduite normale, les deux tiers du couple passent par les roues arrière et la C4S se comporte essentiellement comme une propulsion.
Les nouvelles Carrera 4 ont également des freins à disque plus grands et plus puissants, dont les rotors ont maintenant un diamètre de 330 mm et qui sont pincés par des étriers à quatre pistons, comme sur la 911 Turbo.
Par contraste, les modifications apportées à la carrosserie des 911 sont très discrètes. À l’avant, on remarquera des phares de jour à DEL et des prises d’air plus grandes pour refroidir les freins. À l’arrière, tous les feux sont à DEL sauf les lampes blanches de marche arrière. Même avec de nouveaux rétroviseurs plus grands et des pneus plus larges, Porsche affirme que le coefficient de traînée (Cx) est de seulement 0,29 pour la Carrera 4S et 0,30 pour la Carrera 4. L’habitacle a lui aussi eu droit à des retouches, notamment un écran plus clair et plus grand (16.5 cm) pour la sono et le système de navigation optionnel, désormais doté d’un disque dur de 40 Go.
Boîte surdouée
Porsche n’a pas été le premier constructeur à installer une boîte séquentielle à double embrayage sur un modèle de série mais il en a néanmoins été le créateur et le pionnier. Porsche a effectivement utilisé une première version de sa boite PDK en course d’endurance sport-prototype dès 1983, dans une de ses fameuses 956. Les premières victoires sont venues les années suivantes, avec la 962. La plupart des marques qui utilisent la boîte à double embrayage doivent d’ailleurs verser des royautés à Porsche pour les brevets qu’elle détient sur cette technologie.
La boîte PDK remplace donc la boîte Tiptronic dont la 911 avait été la pionnière au début des années 90. Elle est également plus légère que la Tiptronic S de 10 kg même si elle compte sept rapports, donc un de plus. Le double embrayage de la PDK remplace le convertisseur de couple traditionnel et chacun est placé sur un des arbres qui se partagent les 7 rapports de la boîte. Grâce à l’électronique, la boîte alterne de l’un à l’autre en une fraction de seconde, ce qui produit des passages de vitesses ultrarapides et sans presque d’interruption de motricité, puisque le prochain rapport est toujours enclenché.
La PDK est dotée d’un mode entièrement automatique très efficace qui passe les rapports instantanément, à très bas régime, en conduite normale. Son seul défaut : une secousse au démarrage qui trahit la présence d’embrayages multidisques qui ne peuvent avoir la même douceur qu’un convertisseur de couple, même s’ils baignent dans l’huile eux aussi. L’intensité de cette secousse dépend de celle de la pression de votre pied droit sur l’accélérateur.
On peut évidemment passer les rapports à la main, avec le sélecteur à la console ou avec les manettes installées au volant. On a critiqué la petite taille des manettes placées de part et d’autre du volant. Je trouve, au contraire, qu’on peut passer les rapports avec l’intérieur de la paume sans relâcher la jante du volant le moindrement. Le hic, c’est que la PDK fait les choses à l’envers : on devrait ‘monter’ les rapports en tirant et rétrograder en poussant, ce qui correspond au mouvement du corps en accélération et au freinage. Porsche devrait s’inspirer de BMW et Mazda, à ce chapitre.
Des preuves concrètes
Les données techniques sont une chose mais il fallait voir si cette Carrera 4S allait tenir ses promesses côté performance, avec son moteur à injection directe et sa boîte PDK. Nous n’avons pas été déçus. Sur notre parcours d’essai habituel, la Carrera 4S a inscrit un chrono de 12,45 secondes sur le quart-de-mille avec une pointe de 182,8 km/h. Ces chiffres sont une moyenne des deux parcours, le minimum obligatoire pour annuler l’effet du vent. Pour le sprint 0-100 km/h, la ‘C4S’ a inscrit des chronos identiques de 4,3 secondes dans les deux directions. Et ces chiffres auraient été meilleurs de deux ou trois dixièmes en utilisant le mode ‘1-foot rollout’ de mon appareil de mesure par GPS pour émuler le fonctionnement des systèmes sur pistes d’accélération comme le font les grands magazines américains.
Ces résultats surpassent tout ceux que j’avais enregistrés jusqu’à maintenant avec des 911 à moteur atmosphérique et boîte manuelle. Ils sont même virtuellement meilleurs que ceux d’une 911 Turbo type 996 (la génération précédente) à moteur de 415 chevaux et boîte Tiptronic testée dans les mêmes conditions, soit 12,74 secondes et 184 km/h sur le ¼ de mille et 4,69 secondes au 0-100 km/h.
De plus, les Porsche 911 sont généralement les plus exigeantes et difficiles à conduire en mesures d’accélération à cause de leur moteur arrière qui accentue la motricité par transfert de poids. On risque toujours un sautillement violent de l’essieu arrière pour obtenir le minimum nécessaire de patinage pour un résultat optimal. Or, c’est tout le contraire avec cette Carrera 4S qui était dotée, en plus de la boîte PDK, du groupe optionnel Chrono Sport. Oubliez le chronomètre analogique au tableau de bord qui n’est guère plus qu’une décoration. L’important est que cette option ajoute un mode ‘départ-canon’ (launch control) qui permet d’obtenir des accélérations maximales à chaque tentative.
Contrairement au mode semblable dont disposent certaines rivales, dont la Nissan GT-R, celui de la 911 est d’une grande facilité d’utilisation et Porsche ne se perd pas en mises en garde paranoïaques. Il suffit de sélection le mode ‘Sport +’, d’appuyer sur le frein du pied gauche et d’appuyer sur l’accélérateur pour voir le régime grimper à 6 500 tr/min. On relâche aussitôt le frein et c’est parti. La boîte PDK fait le reste en passant les rapports à environ 7 200 tr/min, au seuil de la zone rouge.
Tel que mentionné plus haut, je n’ai dû faire qu’un seul aller-retour pour obtenir des chronos exceptionnels. Par acquis de conscience, j’ai fait un autre parcours en passant les rapports à la main, mais le chrono était moins bon. De toute manière, la PDK passe le rapport automatiquement si vous tardez trop. Les puristes vont certainement s’offusquer de cette intervention et ils n’ont pas entièrement tort. Il serait bon de pouvoir aller jusqu’au rupteur soi-même, au moins en mode Sport +, mais Porsche n’est pas du même avis, de toute évidence.
Pur-sang pratique
Pas de mesure de freinage avec cette Carrera 4S qui était encore équipée de ses pneus d’hiver. De toute manière, c’est un coupé Carrera 4S qui détient le record de la distance de freinage moyenne la plus courte en freinage d’urgence simulé à 100 km/h (34,2 mètres) parmi les 951 voitures que compte actuellement ma base de données (modèles 1995 à 2009 seulement). Je ne vois aucune raison qu’il en soit autrement avec cette C4S lorsqu’elle chaussera ses pneus ‘d’été’.
Avec l’adhérence plus modeste des pneus d’hiver, impossible également de juger les limites de la tenue de route en conduite sportive. Nous verrons bien plus tard, sur route et sur circuit. En conduite normale, par contre, on goûte malgré tout la précision et les sensations uniques de la direction de la Porsche 911, encore la meilleure de toutes, à l’égal de ses sœurs, les Boxster et Cayman.
Le roulement très ferme est également familier, tout comme les réactions franchement sèches sur les fentes transversales de nos routes au printemps, mais la carrosserie est toujours d’un bloc et d’une solidité remarquable. J’ai été surpris, par contre, du niveau sonore souvent élevé sur l’autoroute.
Malgré sa puissance et ses aptitudes sportives exceptionnelles, la Porsche 911 demeure étonnamment docile et agréable à vivre, à défaut d’offrir un grand volume cargo. La Boxster à moteur central fait certainement mieux, avec ses deux coffres. Contrairement à l’immense majorité des voitures actuelles et la quasi-totalité des sportives, la 911 offre également toujours une visibilité fantastique de tous les angles. Elle est superbement facile à manœuvrer et garer en marche arrière, même sans les sonars de stationnement optionnels. Attention par contre aux roues arrières plus larges le long des trottoirs.
Conduire une nouvelle 911 c’est retrouver une vieille amie qui ne cesse de s’améliorer à tous égards. C’est ce qu’on découvre au fil des jours et des kilomètres. Et lorsque vient le temps de rendre les clés, on songe déjà au prochain essai. Si seulement elle n’était pas si chère.