Porsche 911 Carrera 2017 : plaisirs démodés
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Ferrari et Lamborghini ne font plus de boîtes manuelles. Quand la nouvelle est sortie il y a déjà quelque temps, la communauté internet s’est révoltée. Elle a pourfendu ces deux marques, les a accusées de ne pas respecter leurs clients, la vente de t-shirts à l’effigie des trois pédales a explosé et « Save the manuals » est devenu un cri de ralliement. Pourtant, dans les faits, la boîte manuelle ne se vend pas, point.
Les boîtes automatiques sont devenues tellement efficaces qu’elles font paraître les manuelles comme des reliques de la Première Guerre mondiale. Mais il y a davantage. Dans les villes, le trafic est de plus en plus dense et lent. À part quelques irréductibles de la clutch, personne n’a envie de passer une ou deux heures par jour à appuyer sur un embrayage. Et puis, pourquoi se forcer si une machine, la transmission dans le cas présent, peut le faire pour nous, et mieux?
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Toujours est-il que Porsche n’en fait qu’à sa tête et offre encore une boîte manuelle, à sept rapports svp. Mieux, elle se retrouve sur 13,3% de toutes les 911 vendues au Canada jusqu’à présent cette année. Si l’on enlève les modèles où seule figure la PDK (GT3 et Turbo), il reste 20,8% de manuelles. C’est peu, mais c’est nettement plus que pour d’autres marques. Comme quoi les « porschistes » sont de vrais passionnés.
Avant de partir…
Lorsque l’on s’assoit à bord d’une 911 Carrera de base, on tâtonne inévitablement une ou deux secondes pour trouver un bouton de démarrage inexistant. En désespoir de cause, on tente d’insérer la clé de contact à droite, le temps de se rappeler que le contact, dans une Porsche, est situé à gauche, rappel des courses d’antan. On tourne la clé et rien. On retourne la clé et toujours rien. Heureusement, le pied gauche, rompu aux plaisirs de l’embrayage, depuis près de quarante ans dans le cas de l’auteur de cet essai, appuie comme par magie sur la pédale qui lui est dévolue. On tourne la clé à nouveau et le son caractéristique d’un moteur Porsche se fait entendre.
Un moteur Porsche turbo, faut-il préciser. Car même la version de base a maintenant droit à la turbocompression. Ce six cylindres à plat (ça, ça n’a pas changé) de 3,0 litres déballe pas moins de 370 chevaux à 6 500 tr/min et un couple de 332 livres-pied entre 1 700 et 5 000 tr/min. Pour améliorer l’expérience auditive, notre voiture d’essai était dotée de l’échappement sport, une option de 3 370 $ qui se distingue par une sortie double au centre, plutôt que sur les côtés. Il faut voir l’enchevêtrement des tubulures pour comprendre pourquoi Porsche exige autant de dollars… Cependant, je le soupçonne de faire un excellent profit avec cette option. Et bien d’autres. Mais je m’éloigne du sujet principal.
Notre Porsche était un modèle passablement dégarni dont le prix de base se situe tout de même au-delà de 100 000 $. En termes de performances toutefois, la 911 Carrera ne traîne pas de la patte. Le 0-100 km/h est l’affaire de 5,0 secondes pile d’après mes tests (Porsche annonce 4,6 secondes et je n’ai aucune raison de ne pas le croire) et le 80-120 se fait en 4,9 secondes.
C’est dans ces moments que le pilote se rend compte que la boîte manuelle est moins rapide que l’automatique à double embrayage, baptisée PDK. Selon Porsche, il faut 0,2 seconde de moins pour atteindre 100 km/h avec cette dernière. Là encore, je n’ai aucune difficulté à le croire. Heureusement, la manuelle est un charme à utiliser. L’embrayage affiche une fermeté juste parfaite quoiqu’un peu exténuante dans le trafic dense et le pédalier est superbement disposé pour ceux qui désirent appliquer la technique du talon-pointe. Le levier tombe bien sous la main et n’a besoin que d’une légère impulsion pour s’engager sur le bon rapport. Vraiment, de l’ingénierie de haut niveau.
Sur la console, on retrouve un bouton Sport qui agit sur le moteur en le rendant plus incisif. Sur les modèles dotés de la PDK, ce mode agit aussi sur la boîte. En accélération franche, lors d’un test 0-100 km/h, il n’apporte pas grand-chose, du moins dans la 911 manuelle. Par contre, une reprise entre 80 et 120 km/h, sur le quatrième rapport, abaisse le temps d’au moins trois dixièmes (5,2 à 4,9 secondes). C’est énorme.
La tenue de route, on s’en doute, est supérieure. La direction est d’une précision quasi chirurgicale et les freins de base sont très puissants. En slalom, on dénote un très léger roulis et l’orgueilleux qui avait choisi de débrancher le PSM (Porsche Stability Management) pour prouver à quel point il est bon pilote pourrait avoir besoin de sortir ses talents de « contrebraqueur » très rapidement... En effet, lorsque la limite de l’adhérence est atteinte en courbes, le moindre relâchement de l’accélérateur peut amener l’arrière à décrocher sournoisement. Les pneus Pirelli P Zero 305/30ZR20 n’y pourront rien. Pour votre gouverne, à l’avant on retrouve des 245/35ZR20.
Même si les versions musclées sont plus exclusives, la Porsche 911 Carrera de base constitue une extraordinaire sportive. Une fois passée la surprise d’un équipement très chiche pour le prix (pas d’ajustement électrique avant/arrière ni de mémoires pour les sièges, un Bluetooth doté d’une sonorité qui a déjà été chantée par Lisa Leblanc, pas de clé intelligente, pas de régulateur de vitesse adaptatif, pas d’assistance aux angles morts, etc.), on se dit que l’argent va là où ça compte, dans le moteur, le châssis et dans une superbe boîte manuelle.