Les véhicules à trois roues: assurances, économies et décisions
Il suffit de regarder l’évolution du prix de l’essence au cours des 40 dernières années pour s’en convaincre : les hausses sont là pour rester. Cette pression sur les portefeuilles des automobilistes a participé à accentuer le virage vers l’augmentation de l’efficacité énergétique des véhicules mis en marché. Or, la demande des consommateurs pour des véhicules écoénergétiques abordables n’est pas facilement rencontrée : les véhicules hybrides sont onéreux et parfois sous-performants, l’électricité est dispendieuse dans certains marchés. De plus, les voitures 100 % électrique sont souvent plus dispendieuses que leurs sœurs du modèle conventionnel et le retour sur investissement de ce choix écologique est, souvent, que pour des fins environnementales et non pas économiques.
Forcés à sortir des sentiers battus, certains constructeurs – dont Toyota – envisagent un retour à un type de voitures revisité dans les années 70 comme la Reliant Robin, un véhicule à trois roues munis d’une cabine fermée. Les idées qui informent ce design sont évidentes : avec un châssis plus petit, donc plus léger et plus aérodynamique, il est possible de grandement réduire les besoins énergétiques. Hélas, tout n’est pas gagné d’avance, car dans tous les territoires où de tels produits pourraient être mis en marché, ils se butent à un problème fort épineux : leur définition légale.
- À lire aussi: Campagna T-Rex 16S et V13R, deux bolides, deux personnalités
- À lire aussi: Campagna Motors: 20 ans et plus actifs que jamais!
Quelques exemples
Issu de la Louisiane, aux États-Unis, le jeune fabricant Elio tente aujourd’hui de commercialiser sa toute nouvelle « voiture à trois roues. » Distincte, visionnaire et longiligne, la bagnole compte sur deux arguments de vente massue : une consommation d’essence qui se chiffre à 35 kilomètres par litre (la Prius est à 20) et un prix de vente en dessous des 7 000 $! De surcroît, la Elio a obtenu des notes épatantes aux tests de sécurité routière pour automobile.
Bien sûr, avec ses deux places et son absence de coffre, il s’agit d’un modèle qui ne convient pas à tous et à toutes. Par contre, pour les conducteurs qui se promènent surtout seuls, et qui cherchent à réduire leur consommation d’essence, ce pourrait être la voiture parfaite.
Du côté de l’Asie, Toyota s’est aussi penché sur la question. Sa réponse : la voiture à trois roues électrique « i-ROAD. » Encore plus petit que la Elio avec sa cabine qui n’accueille qu’un seul passager, le conducteur, le i-ROAD brouille carrément les cartes au niveau de sa définition : il se comporte généralement comme une motocyclette, avec un axe vertical qui s’incline durant les virages.
La mise en marché
Si les constructeurs ont réussi à surmonter les défis liés à la hausse du prix à la pompe, ils se butent à un mur lors de la mise en marché de leurs nouveaux véhicules : les lois d’immatriculation et les assurances qui en découlent.
Dans le cas de la Elio, par exemple, l’état de la Louisiane – d’où elle est issue – la classe comme une motocyclette et non comme une voiture. Conséquemment, ses conducteurs doivent détenir un permis de motocycliste et conduire en portant un casque! Et, comme ce sont légalement des motos, les propriétaires sont aussi contraints à se procurer une assurance moto!
Il s’agit d’un obstacle monstre au succès commercial de l’entreprise, puisque la décision d’achat doit aussi reposer sur une formation supplémentaire et des primes d’assurance généralement plus élevé pour une catégorisation « moto » plutôt que « auto ». La compagnie est présentement en train de pétitionner le gouvernement de l’état afin que ce dernier modifie ses lois pour permettre à la Elio de répondre aux lois automobiles plutôt qu’à celles qui s’appliquent aux motocyclettes. Toutefois, elle n’est pas au bout de ses peines : ses lois sont du ressort des états, ce qui implique que de telles batailles légales pourraient être nécessaires dans chaque état américain où le fabricant entend commercialiser son véhicule. C’est également le cas au Canada, où ce sont les provinces qui légifèrent sur de telles questions. De quoi vider les coffres d’une compagnie bien avant qu’ils n’aient la chance de se remplir.
Au Québec
Ce genre de débat a déjà eu lieu ici : le gouvernement provincial s’est penché sur la question du T-REX et du Spyder de Can-Am, entre autres. Suite à une pression importante du fabricant du Spyder – BRP, un joueur important de l’économie québécoise –, la SAAQ a dérogé de ses lois établies afin de permettre aux détenteurs de permis de classe 5 de conduire les bolides à trois roues. Cela n’a toutefois pas fait baisser les coûts d’immatriculation, et pour les assureurs, la distinction est relativement sans objet : les frais sont comparables à ceux d’une moto traditionnelle.
Bombardier n’est pas la seule compagnie à avoir profité de l’ouverture d’esprit de la SAAQ par le passé. Par exemple, dans le cadre du projet pilote concernant les véhicules à basse vitesse (VBV), c’est 4 compagnies qui ont conclue des ententes avec elle. Ce projet pilote a permis à la société d’état de faire ses classes et elle travaille actuellement à l’élaboration des normes de sécurité propres au VBV pour leur retour sur les routes en 2014. Il est fort probable que les véhicules à 3 roues suivent le même chemin, mais d’ici là, c’est la règlementation actuelle qui prévaut.
Chose certaine, les automobilistes exercent une forte pression sur les fabricants et les gouvernements afin qu’ils répondent rapidement à la hausse fulgurante du prix à la pompe et améliorer l’impact de l’utilisation des véhicules sur l’environnement. Espérons maintenant que chaque parti sera en mesure de tirer son épingle du jeu pour un résultat gagnant-gagnant-gagnant.