Suzuki SX4 2014: La jungle a eu le dessus
Lorsque les historiens de l’automobile feront un retour sur l’année-modèle 2014, ils auront matière à réflexion en découvrant la triste histoire de la fin de Suzuki dans la vente d’automobiles en Amérique du Nord. Pour l’instant, il est sans doute trop tôt pour bien cerner l’ensemble du problème. Parmi les nombreux « symptômes », comment se fait-il que la Suzuki SX4, une compacte avec rouage intégral, n’a pas connu le succès auquel elle aurait pourtant droit?
La SX4 est une compacte, une catégorie très populaire, au Québec du moins. Elle offre un modèle à hayon, une catégorie prisée des Québécois. Ce modèle propose une version à rouage intégral, un autre élément apprécié dans notre contrée nordique. Et à 21 000 $ (au moment d’écrire ces lignes), il s’agit d’une des voitures à rouage intégral les moins chères sur le marché. La fiabilité n’est pas mauvaise du tout et la conduite, somme toute agréable. Alors, où est le problème?
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Ne pas savoir tirer profit de ses avantages
Le problème, il est dans la perception, forcément, puisque pour nombre de personnes, Suzuki n’est bon qu’à faire des motos, des moteurs hors-bords et des VTT. D’autres, plus perspicaces, vont plus loin et avouent que Suzuki est très populaire dans certains pays africains ou asiatiques là où les micro camionnettes et les petits 4x4 sont très prisés. Et les petits 4x4, c’est l’affaire de Suzuki. On se souvient encore avec bonheur des rustres, mais increvables, Samouraï et Vitara. Mais l’entreprise n’a pas su tirer profit de cet avantage. Sans doute parce que, selon ce que je peux comprendre de la situation, les dirigeants n’ont jamais bien cerné les besoins des Américains, incluant la tribu au nord du 45e parallèle. D’un autre côté, le réseau de concessionnaires n’a jamais été très élaboré, ce qui n’a pas aidé pas les ventes. Ah oui, et les prix sont rarement parmi les plus bas de la catégorie. Par exemple, une Subaru Impreza de base coûte, à quelques dizaines de dollars près, la même chose. Le choix n’est pas très difficile à faire…
Quoi qu’il en soit, la SX4 n’est pas une mauvaise voiture, loin de là. Elle n’est pas parfaite, on le verra, mais elle n’est pas non plus un déchet à la Lada. Tout d’abord, notons que cette voiture se décline en deux modèles, berline et hatchback. Cette dernière, avec sa capacité de chargement accrue et ses lignes plus dynamiques, est à privilégier. C’est aussi la seule à offrir le rouage intégral.
Peu importe le modèle, le moteur est un quatre cylindres de 150 chevaux à 6 200 tr/min et de 140 lb-pi à 4 000 tr/min. Ce n’est rien pour impressionner les filles sur la Principale un beau vendredi soir, mais c’est suffisant pour les besoins quotidiens de la plupart des gens. Une transmission à variation continue (CVT) transfère, assez bruyamment, la cavalerie aux roues avant ou, selon le modèle, aux quatre roues.
À la fin de notre dernier essai (comme un couple qui se sépare, il y a récemment eu des « dernières » avec Suzuki), notre SX4 JLX iAWD a consommé 9,4 litres tous les 100 kilomètres, ce qui est beaucoup, d’autant plus que nous avons toujours roulé en mode deux roues motrices. En fait, c’est au moins deux litres de plus que bien des concurrentes.
Heureusement, il y a le rouage intégral
En accélération franche, le bruit du moteur envahit l’habitacle mais, une fois la vitesse de croisière atteinte, on peut engager une conversation avec son passager. J’exagère voyons! La transmission manuelle manque de conviction et on ne la choisit que parce qu’elle coute moins cher. La CVT, de son côté, est plus agréable même si elle n’est pas des plus dégourdies. La version la plus désirable de la SX4 est dotée du rouage intégral baptisé iAWD (traduction libre : rouage intégral intelligent). Aussi intelligent soit-il, c’est le conducteur qui choisit son mode. Sur surface sèche, il laissera le bouton de la console sur 2WD (roues avant motrices). Quand les conditions deviennent précaires, il suffit d’enclencher le mode AWD et, lorsque c’est l’apocalypse, il est possible de verrouiller le rouage pour une répartition 50/50. Il y a quelques années, pris dans une tempête de neige en plein Montréal, Dieu que j’avais apprécié ce rouage intégral. Suzuki s’y connait en la matière!
L’habitacle, tout en hauteur, offre beaucoup d’espace pour la tête, qu’il s’agisse de la berline ou du hatchback. L’assise très haute des sièges, combinée avec une surface vitrée importante, assure une excellente visibilité. Les matériaux sont, pour la plupart, de bonne qualité et l’assemblage est bien réalisé, même si dans une des nombreuses SX4 essayées au cours des dernières années, le tableau de bord laissait entendre des craquements suspects. La berline possède un très grand coffre pour la catégorie. Bien entendu, celui du hatchback est plus grand mais, à l’inverse, est loin d’être le plus vaste de la catégorie.
Il y a deux ans, lors d’un match comparatif entre quatre compactes à rouage intégral de moins de 25 000 $, la SX4 avait terminé bonne dernière, devancée par les Mitsubishi Lancer AWD, Toyota Matrix et Subaru Impreza. Pourtant, prise séparément, elle n’est pas « si pire que ça ». Sauf que, depuis l’annonce de Suzuki de se retirer de la vente d’automobiles, la valeur des véhicules arborant le « S » chute verticalement. C’est dommage. Mais c’est la loi de la jungle et Suzuki n’avait de toute évidence plus envie de se battre pour sa survie.