Allard J2X 2013: « Made in Boucherville »
Un jour, alors qu’il est en Angleterre pour faire l’acquisition d’un roadster des années 50, Roger Allard fouille dans une pile de magazines et de livres pour trouver de l’information sur la voiture convoitée. Il tombe alors sur un nom de voiture qui lui est familier… c’est le sien! Cependant la voiture, elle, lui est parfaitement inconnue.
Roger Allard n’est pas homme à faire les choses à moitié. Il apprend à connaître la marque britannique Allard, dont la réputation en course automobile durant les années 50 avait gagné les États-Unis. Après tout, les moteurs qui animaient ces puissantes montures étaient américains! Roger Allard achète les droits et commence la production à l’unité de ces superbes voitures, ici même à Boucherville.
Le véritable nom de la voiture qui nous intéresse aujourd’hui est Allard J2X MKII. J2X est identique au nom utilisé à l’époque et le MK II vaut pour « Mark 2 », ce qui veut dire qu’il s’agit de la deuxième version, très fidèle à l’originale. Allard est 10 cm plus longue que la première, question d’aménager plus d’espace pour le pilote et son passager, les portières sont plus hautes, etc. Mais le design original est préservé de telle façon que cette voiture est reconnue par le Allard Registry (répertoire Allard) comme étant une véritable J2X. D’ailleurs, chaque MK II reçoit une plaque attestant son authenticité.
Originale, artisanale, pas banale
Même si la J2X MKII est de fabrication artisanale, on est loin du kit car. La qualité d’assemblage est très, très relevée. La carrosserie est faite de matériaux composites et la peinture des quelques exemplaires vus était parfaite. Et que dire de ce tableau de bord et de sa plaque d’aluminium d’une seule pièce découpée au laser? Et de ces instruments de mesure qui rappellent à ce point les originaux que les propriétaires de la première génération veulent en acheter pour leur Allard « vintage »?
Cette année, il y aura du changement sous le capot! Le populaire Mopar 5,7 Hemi devrait être remplacé dès novembre 2012 par la version Eagle à injection. Une variante Apache du 6,4 Hemi sera sans doute proposée. Le 5,7 Ramjet de General Motors, de son côté, sera remplacé par deux versions du nouveau E-Rod de 6,2 et 7,0 litres. La transmission demeure une manuelle Tremec à cinq rapports mais une automatique sera éventuellement offerte.
Un rapide essai de cette voiture hors du commun dotée d’un 5,7 Hemi est, croyez-moi, une expérience… hors du commun. On ne s’assoit pas dans une Allard, on s’y glisse comme dans une voiture de course, les genoux en premier. L’habitacle est spartiate mais pas inconfortable. Pour les jours de pluie, Allard Motor Works offrira (c’est peut-être même déjà fait au moment où vous lisez ces lignes) un toit rigide.
Le grand volant en bois au boudin un peu mince, comme « dans l’temps », se prend bien en main et le levier de vitesses est placé au bon endroit. Il se manie facilement et sa précision étonne. Le pédalier est parfaitement disposé pour plaire aux amateurs de pointe-talon, cependant un repose-pied serait apprécié. Il n’y a pas suffisamment d’espace pour un tel luxe. La direction est plutôt vague à basse vitesse, toutefois elle devient plus précise à mesure que la vélocité augmente. En passant, une version avec conduite à droite est en développement. Bien utile pour conquérir certains marchés. Quant aux freins, ils demandent un effort plus grand que la normale sur la pédale mais, selon ce que mon confrère Lachapelle rapportait dans le Guide 2012, cela se corrige.
Ce qui enchante le plus dans cette voiture, c’est la puissance et les décibels qui viennent avec lorsqu’elle se déchaîne. Oh my God… Même avec le moteur le moins puissant, la Allard J2K MKII n’est pas à laisser entre toutes les mains. Il s’agit d’une brute. D’une brute dans le bon sens du terme puisqu’elle respecte à la lettre la J2K originale. Comme un diamant à l’état, justement, brut et que seul un pilote aguerri peut peaufiner. D’ailleurs, il n’y a aucun système électronique de contrôle de traction ou de stabilité latérale. Tout comme il n’y a aucun coussin gonflable. Juste des ceintures de sécurité à trois ou, en option, à quatre points d’attache.
Une voiture d’exportation
Jusqu’à présent, Allard Motor Works a vendu une quinzaine de ses bijoux qui se retrouvent à peu près partout sur la planète. AMW possède des points de vente en Californie, au Massachusetts, en Floride, au Royaume-Uni, au Moyen-Orient (Liban) et, depuis peu, en Chine (Shanghai). Et avec les ajouts qui s’en viennent (toit rigide et conduite à droite), la production pourrait bien passer à deux unités par mois à six ou même huit. Quoi qu’il en soit, l’exclusivité sera toujours assurée!
Du fond de son atelier de Boucherville ou dans un bureau en Chine en train de négocier un contrat, Roger Allard est l’un des rares survivants de la race des constructeurs indépendants. On peut déjà mettre son nom à côté de celui des DeLorean, Noble, Panoz, Pagani ou Gumpert. Des hommes avec un rêve fou. Tellement fou, qu’ils l’ont réalisé.