Ford Expedition / Lincoln Navigator 2013: Un Commodore 64k dans le monde du iPad
N’ayons pas peur des mots : le Ford Expedition et le Lincoln Navigator sont gros. Question d’hormones. Gros et pas très modernes. Un peu comme le bedonnant oncle Robert qui n’a jamais allumé le cellulaire que ses enfants lui ont donné à Noël. Contrairement à tonton Bob qui fut, il y a de plus en plus longtemps, un svelte jeune homme, les Expedition et Navigator sont nés obèses.
À l’époque (1997 en remplacement du Bronco), Ford voulait du solide. Du « capable d’en prendre ». Du « tasse-toi avec ton petit Explorer, laisse travailler les grands ». Bref, on voulait quelque chose de crédible. Et avec le duo Expedition / Navigator, on en a de la crédibilité. Peut-être pas auprès des gens de Greenpeace mais, bon, ils n’ont pas de remorque à tirer, eux.
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Depuis la refonte des Expedition et Navigator pour l’année-modèle 2008, nous avons pu conduire plusieurs exemplaires. Le dernier en lice était un Navigator Limited 2012. Alors, si vous n’y voyez pas d’inconvénients, nous ne parlerons désormais que de celui-ci, question d’alléger le texte. D’ailleurs le Navigator est un Expedition plus luxueux, c’est tout.
Gros, alcoolique et dépassé
Le châssis du Navigator provient de la camionnette F-150, tout comme la mécanique. Sauf que le F-150 a évolué, lui, et possède désormais des moteurs modernes. Le Navigator est moins chanceux et est encore mû par le sempiternel V8 de 5,4 litres. Sans doute conçu du temps où les frères Wright volaient pour la première fois, ce moteur n’est pas très raffiné et, surtout, il consomme comme un alcoolique en rechute laissé seul dans un entrepôt de la SAQ. Lors de notre semaine d’essai, notre moyenne s’est établie à 16,0 l/100 km, ce qui est une bien agréable surprise. Il faut toutefois avouer que nous avons eu le pied droit très conciliant, nous n’avons pas transporté de remorque ou de lourdes charges ni n’avons conduit en mode 4x4. Au niveau des performances, il se débrouille passablement bien, permettant un 0-100 km/h sous les 10 secondes, accompagné par une sonorité que seul un bon vieux V8 américain peut reproduire. Évidemment, tenter de toujours se rendre à 100 km/h en moins de dix secondes n’est pas très écologique ni économique… À quand le V6 3,5 litres Ecoboost?
La transmission est une automatique à six rapports dont les passages ne sont peut-être pas très rapides mais au moins, ils sont très doux. Cette boite comporte un mode Tow / Haul qui permet un passage plus rapide des premiers rapports lorsqu’une remorque est tirée, remorque d’au maximum 3 900 kilos (8 600 livres). Toujours dans le domaine du remorquage, soulignons que les gros rétroviseurs sont très pratiques en conduite quotidienne mais qu’ils devraient être insuffisants quand une remorque imposante suit. Au moment d’écrire ces lignes, Ford ne semble pas proposer de rétroviseurs extensibles, comme ceux offerts en option sur le F-150. Par contre, les marchepieds qui s’abaissent chaque fois qu’on ouvre une portière sont une source intarissable de « wow! », de « ben, j’aurai tout vu! » ou de « ayoye câline! » Dans ce dernier cas, la personne n’était pas suffisamment en retrait et le marchepied s’est déplié… sur son tibia!
Le gros confort
Une fois qu’on est rendu à bord, une tâche grandement simplifiée par les marchepieds électriques, on est impressionné par l’ampleur de la cathédrale. Sept ou huit personnes, selon le modèle, peuvent y prendre place sans aucun problème et même transporter quelques effets personnels. Et ça, c’est dans la version ordinaire. Car imaginez-vous qu’il existe une livrée L (pour Long tandis que chez Ford cette version se nomme Max) qui donne presque 38 cm (15 pouces) de plus d’espace dans le coffre! À l’avant, le tableau de bord en impose. Dommage que plusieurs de ses commandes et jauges, la qualité de certains plastiques et l’absence de repose-pied nous ramènent au moins dix années en arrière... D’ailleurs, dans « notre » Navigator Limited de 75 000 $, on ne retrouvait pas de clé intelligente, pas de bouton Start/Stop, pas de colonne de direction télescopique, bien peu d’espaces de rangement (le coffre à gants est ridiculement petit pour un aussi gros véhicule) et un niveau de finition qui n’a plus rien à voir avec ce que Ford fait maintenant. Au moins, les sièges sont confortables, peu importe leur position dans l’habitacle.
Au chapitre de la conduite, la tenue de route n’est pas exceptionnelle mais pas désastreuse non plus. La direction manque de précision et de retour d’informations (du moins dans le Navi, l’Expedition étant un zeste plus dynamique), les suspensions souples favorisent le confort et imposent un roulis quelquefois prononcé dans les courbes. Toutefois, dans l’ensemble, et pour peu qu’on respecte les lois de la physique, la conduite de ce mastodonte s’avère sécurisante. Quant aux freins, ils sont très puissants mais ils doivent travailler d’arrache-pied pour stopper la masse de plus de 2 700 kilos… allège!
Le Ford Expedition et le Lincoln Navigator sont des anachronismes roulants. Si Ford les propose toujours, c’est qu’il y a une demande pour de tels véhicules même si cette demande est de plus en plus faible et, surtout, bien moindre que celle pour les Chevrolet Tahoe et Suburban. Le duo de Ford/Lincoln est à la veille d’une refonte et, connaissant la marque à l’ovale bleu spécialisée dans les camions, on est en droit de s’attendre à beaucoup de la prochaine génération, si prochaine génération il y a.