Kia Borrego, le soleil se lève en retard
Alors que l’auteur s’apprête à écrire ce texte, General Motors vient d’annoncer des mesures drastiques destinées à rehausser les ventes qui sont en chute libre. Ford de son côté, voit ses ventes chuter de façon verticale. Chrysler coupera dans le nombre de modèles et Toyota a réduit la production de son énorme Tundra. Toutes ces actions sont prises pour une seule raison : les 4x4 et VUS ne se vendent plus, les prix de l’essence étant trop élevés. Et comme ces manufacturiers (sauf, peut-être Toyota qui possède une gamme beaucoup plus complète) se sont spécialisés dans les 4x4 et les VUS, ils se retrouvent le bec à l’eau.
C’est dans ce contexte que Kia lance son Borrego, un VUS intermédiaire construit sur châssis à échelle, comme sur un camion et mû par deux moteurs, un V6 et un V8. Dans ces conditions, le Borrego ressemble à une danseuse à dix dans un couvent… Ce qui ne veut pas dire que le véhicule se comporte mal. Oh que non. Mais il arrive à un bien mauvais moment.
Le Kia Borrego (borrego signifie cornes de bélier -big horn sheep- en espagnol), le Borrego, donc, est un véritable utilitaire. Ses dimensions le rapprochent du Sorento, un autre VUS intermédiaire de Kia mais plus urbain. Les compétiteurs directs du Borrego sont les Toyota 4Runner, Nissan Pathfinder et Jeep Grand Cherokee même si Kia le compare aussi aux Ford Expedition et Dodge Durango, plus gros et plus dispendieux.
Moteurs et motricité
Le Borrego de base propose un V6 de 3,8 litres développant 276 chevaux et 267 livres-pied de couple. Ce moteur est relié à une transmission automatique à cinq rapports. On retrouve aussi un V8 de 4,6 litres de 337 chevaux et 323 livres-pied de couple. Cette fois, c’est à une automatique à six rapports qu’il s’adresse. Alors que les Américains ont le choix entre le modèle deux roues motrices (propulsion) et 4x4, les Canadiens ne peuvent se procurer que cette dernière version.
En fait, il ne s’agit pas d’un rouage 4x4 pur et dur mais plutôt d’une intégrale assez sophistiquée. Dans la version de base (LX), le rouage intégral permet de rouler en mode deux roues motrices (2HI) et quatre roues motrices (4HI et 4LO). La version EX, plus luxueuse, reçoit un rouage qui ajoute un mode auto. Sur ce mode, le rouage se comporte comme une intégrale qui distribue le couple selon les besoins. Une virée dans un sentier boueux et accidenté nous a prouvé l’extrême rigidité du châssis à échelle, comme sur un vrai camion, et les capacités impressionnantes du Borrego en hors route. Notons cependant que le mode 4LO est loin d’être aussi démultiplié que celui d’un Jeep Wrangler, par exemple (2,4 :1 contre 4,0 :1).
Le V6
Le V6 nous est apparu très juste dans le Borrego. Ses prestations ne sont pas vilaines mais on sent qu’il peine à tirer les 2100 kilos du véhicule. D’autant plus que la transmission ne donne pas l’impression d’être très rapide. Nous n’avons pu vérifier la consommation d’essence moyenne mais les 13,0 litres au cent que donne Kia nous semblent assez près de la réalité. Mais prévoyez environ 1 ou 1,5 litre de plus tous les cent kilomètres, au cas où! Lors du lancement, Kia a eu la bonne idée de nous faire remorquer un bateau d’environ 4 000 livres avec le V6. Même si la capacité de remorquage du V6 est de 5 000 livres (2 268 kg), nous avions l’impression de tirer le pont Champlain tant le moteur était débordé. La transmission demeurait beaucoup plus longtemps sur les rapports inférieurs pour compenser, ce qui devient franchement désagréable. Il est vrai que nous étions dans une région montagneuse (Banff en Alberta) mais les 21,9 litres au cent alors enregistrés ont de quoi décourager même un président de pétrolière. Les rétroviseurs extérieurs n’ont pas été conçus en fonction du remorquage et on n’y voyait qu’un bateau!
Le V8
Le V8, malgré son poids nécessairement plus élevé, semble plus agile puisque les accélérations et reprises s’avèrent plus enthousiastes. Encore là, les 14,4 litres annoncés par Kia nous semblent un brin optimistes. Les modèles V8 peuvent remorquer jusqu’à 7 500 livres (3 400 kilos). La transmission à six rapports fonctionne avec douceur mais, lors d’un départ arrêté avec l’accélérateur au plancher, le passage entre le premier rapport et le deuxième a semblé prendre une semaine. Autre constat. On s’attend d’un V8 aussi puissant une sonorité riche en accélération. Or, rien. Trop d’isolant, sans doute.
Sept places
Le Kia Borrego est un véhicule sept places. D’ailleurs, l’espace habitable ne manque pas. Celui dédié aux bagages, lorsque les trois rangées de sièges sont relevées, par contre… À l’avant, le tableau de bord des versions LX est invariablement noir et immanquablement tristounet. Les EX, elles, ont droit à un gris souris plus joyeux. Les espaces de rangement sont nombreux et on compte, sur la console, des prises auxiliaires et USB. Peu importe la version, on ne retrouve aucun système de navigation, même en option, ce qui se justifie par des prix qu’on a voulus le plus bas possible. Les sièges avant sont confortables mais j’ai eu un peu de difficulté à trouver une bonne position de conduite. Si le volant avait été ajustable en profondeur, peut-être n’aurais-je pas connu ce désagrément…
Les places de la deuxième rangée aussi sont confortables malgré leur dureté initiale. L’espace pour les jambes, la tête et les coudes est bon. Cependant, même dans la version la plus huppée, on ne retrouve aucun contrôle pour la température aux places arrière. Juste deux buses de ventilation. Quant à la troisième rangée, elle fait preuve de beaucoup de générosité envers ses passagers… pour une troisième rangée, s’entend! Le hayon lève haut mais pas trop, ce qui permet aux petites personnes de pouvoir le refermer aisément. Lorsque les dossiers 50-50 des sièges de la troisième rangée sont baissés, on se retrouve alors avec une surface en plastique dur et facilement égratignable. Lorsque tous les sièges sont baissés (celui du passager avant ne se replie pas vers l’avant pour le transport de très longs objets), on note un vide de 1045 litres.
Le Kia Borrego est un très bon véhicule qui arrive, malheureusement, au mauvais moment. Si Chevrolet ou Ford, maîtres dans l’art du 4x4 et du VUS ne peuvent vendre leurs véhicules, on voit mal comment Kia pourra écouler au Canada les 200 unités mensuelles prévues. Dans ces conditions, il est évident que, malgré ses qualités, le Borrego ne pourra aider la cause de Kia en sol nord-américain… ou même ailleurs dans le monde.