Pontiac G6, il était temps
L'entrée en scène de la Pontiac G6 sonne le glas pour la Grand Am qui ne pouvait plus soutenir la concurrence. Il faut dire, malgré des chiffres de vente encore surprenants, que cette dernière était devenue une espèce de caricature roulante, avec ses panneaux de carrosserie tourmentés, son habitacle étriqué et Mickey Mouse, (on pense entre autres à la petite casquette au-dessus du tableau de bord qui imitait ridiculement les oreilles du célèbre personnage), et ses performances peu reluisantes.
D'année en année, les constructeurs américains voient leur « pointe de tarte » grignotée par les étrangers, et cette situation devient économiquement intolérable. Finalement, GM a réagi en tenant compte de toutes les doléances exprimées, et la nouvelle berline intermédiaire, tout simplement nommée G6, représente l'aboutissement de longs efforts placés sous la gouverne du fameux Bob Lutz, tiré de sa retraite après avoir si bien fait chez Chrysler. De prime abord, on peut affirmer sans ambages que ses lignes sont réussies. Dotée de porte-à-faux relativement courts, et de la calandre associée depuis si longtemps à Pontiac, cette nouvelle venue présente un aspect épuré qui ne manque pas d'intérêt, et qui vieillira sans doute avec grâce.
Des choix judicieux
GM pouvait s'en remettre à ses nombreux bureaux d'études répartis un peu partout dans le monde, et c'est la plate-forme européenne Epsilon qui a été retenue. Extrêmement rigide et légère, elle sert aussi de fondement à l'Opel Vectra, à la nouvelle Saab 9.3, et plus près de nous, à la Malibu dernière génération. Rappelons que cette dernière s'étire sur deux empattements différents, soit 270 cm pour la berline, et 285 cm pour la Maxx. Les concepteurs de la G6 ont retenu le plus long des deux, une solution plus onéreuse lorsqu'on veut conserver une bonne rigidité, mais aussi particulièrement avantageuse. Les deux versions présentement disponibles (base et GT) disposent d'un périmètre de sustentation plus étendu, favorisant le confort des occupants, un comportement routier supérieur, et un habitacle plus volumineux.
Lors d'essais menés à son lancement, j'ai d'abord été agréablement surpris par l'espace qu'elle offre. Confortables et de grand format, les fauteuils avant procurent aussi un bon support latéral. Le conducteur et son passager profitent de cotes extrêmement généreuses, autant en largeur qu'en hauteur, et les places arrière permettent à des adultes de grand gabarit de prendre toute leur aise. De plus, ils peuvent facilement glisser les pieds sous les assises antérieures. Ils ne disposent cependant pas de registres particuliers pour leur ventilation, ni de prise 12 volts, et ils devront se contenter de deux porte-verres incommodes. Bien que moins hospitalière, la troisième place demeure assez confortable. On accède par une large ouverture au coffre de forme régulière et de bonne dimension, et le dossier de la banquette se replie 60/40 pour les objets les plus encombrants. La Grand Am est battue sur toute la ligne !
De même, le style sobre mais accueillant de l'habitacle tranche avec celui de sa devancière. Les matériaux apparaissent de meilleure qualité, bien accostés pour des exemplaires de première production, mais les représentantes des japonaises font encore mieux à cet égard. On regrette la présence de plastiques durs dans la partie inférieure des contre-portes, mais ceux bien moussés de la planche de bord donnent une rassurante impression de solidité. Même les appliques de faux bois apparaissent assez convaincantes. La planche de bord d'une agréable simplicité renferme des instruments de lecture aisée, et l'ergonomie obéit aux canons actuels. Le conducteur n'aura vraiment aucune difficulté à trouver une bonne position car il peut ajuster son volant dans les deux sens, le pédalier longitudinalement, et son siège verticalement. Les tissus agréables à l'oeil et au toucher semblent résistants, et lorsque présent, le cuir ventilé apparaît de bonne qualité.
Comportement routier compétent
Autre surprise des plus agréables : le travail des suspensions indépendantes. Nos essais s'effectuaient sur des routes de qualité dans les environs de Detroit, et sur certains secteurs qui auraient mérité le label "Made in Québec", tant le revêtement était bosselé. La version de base filtrait avec compétence les bruits de roulement et de l'air, et démontrait un comportement routier compétent, malgré de médiocres Uniroyal Tiger Paw P215/60R16 94S. Les pattes du "Tiger" étaient probablement dégriffées, puisque leur piètre adhérence les faisait hurler de douleur à chaque courbe amorcée un peu rapidement. Les amortisseurs réagissaient (heureusement) assez énergiquement, autorisant le châssis à encaisser avec sérénité les accidents du revêtement, et à conserver un aplomb rassurant dans les virages. La direction assistée électriquement semblait un peu déconnectée au centre sur la version de base, mais télégraphiait plus clairement les messages reçus de la route sur la GT. On enregistrait sur cette déclinaison plus fermement suspendue, une légère hausse du niveau sonore, mais elle démontrait encore de meilleures aptitudes sur les routes sinueuses. Le confort demeurait très satisfaisant, le long débattement des ressorts n'arrivait jamais au bout de sa course, et le roulis mieux contrôlé ajoutait à la sensation de sécurité. Les pneus de meilleure qualité, des Continental de format P225/50R17 93V, (oui! des 17 pouces, et oui! des « V ») prodiguaient une adhérence supérieure, même sous la pluie. Le freinage, compliment de quatre disques régulés par l'ABS sur la GT seulement, ralentissait avec puissance et endurance la masse quand même importante dont il assurait la responsabilité, la nouvelle accusant près de 150 kilos supplémentaires par rapport à la Grand Am. Un antipatinage assez rudimentaire arrive dans la version de base, mais la GT dispose d'un système plus sophistiqué.
Groupe motopropulseur satisfaisant
En dépit du qualificatif « nouveau », employé dans la documentation, le V6 3,5 litres avec arbre à cames central et poussoirs, demeure une extrapolation des anciens V6 à 60 degrés. Son arbre généalogique remonte donc jusqu'au V6 2,8 litres des années quatre-vingt, mais il a fait l'objet de travaux incessants. Soyons quand même magnanimes envers lui car en général, ses prestations demeurent satisfaisantes. Il procure des accélérations honnêtes, tourne avec une relative douceur, mais supporte très mal les régimes supérieurs à 4 500 tours/minute. Son architecture très conservatrice lui procure par contre des avantages évidents au niveau du coût de fabrication, de la simplicité, et de l'encombrement. Son couple assez costaud permet aussi des reprises énergiques, sans qu'il faille le cravacher vers les régimes supérieurs. Une boîte automatique à quatre rapports lui est exclusivement assignée, et elle se montre heureuse de cette association. La version GT y ajoute un mécanisme séquentiel, remarquable par sa douceur et sa rapidité d'exécution.
Comme toute américaine qui se respecte, la dotation de base de la G6 vous en donne pour votre argent. On y retrouve entre autres les principales assistances électriques, la climatisation en une seule zone et sans thermostat, une radio potable avec lecteur CD, le régulateur de vitesse, et des antibrouillards.
Bien que satisfaits (à juste titre) de leur réalisation, les ingénieurs de chez Pontiac planchent actuellement sur la mise au point de deux autres versions, et de deux autres configurations. S'ajoutera en effet à la gamme, dans quelques mois, une déclinaison plus dépouillée, tractée par un quatre cylindres Ecotec 2,2 litres de 170 chevaux. À l'autre extrémité, au cours de la même période, se dévoilera une GTP tractée par un V6 3,9 litres de 240 chevaux, lié à une boîte manuelle à six rapports. Son équipement plus riche, et son allure plus agressive la rendent encore plus attrayante. J'ai eu l'occasion de faire quelques tours de piste au volant d'un modèle de préproduction, et elle n'aura pas à rougir devant la concurrence. Son moteur plus performant, sa boîte bien échelonnée et facile à manier, ainsi que ses pneumatiques tenaces en taille 18 pouces, lui procurent un comportement équilibré et de haut niveau.
Au cours de la même période, GM procédera au lancement d'un coupé aux lignes vraiment réussies, qui ne sont pas sans rappeler celles de l'Infiniti G35, ainsi qu'à celui d'une décapotable à toit rigide articulé, qui promet de faire tourner les têtes. Le respecté Bob Lutz a donc réussi à insuffler à cette division de GM, l'inspiration et l'énergie nécessaires pour faire de la G6 une proposition très intéressante, si vous êtes à la recherche d'une intermédiaire compétente, et probablement à bon prix.