Lincoln MKS 2012: Invisible malgré le clinquant
Cette grande berline qui entame sa quatrième année fut la première à hériter de ce grand sourire chromé plus ou moins carnassier et la première à profiter du V6 Ecoboost à double turbo. La MKS est confortable, spacieuse, stable et on peut lui ajouter la majorité des systèmes et accessoires en vogue. Malgré cela, elle ne fait pas trembler les spécialistes allemands ou japonais du luxe et n’est sans doute la cause d’aucune insomnie chez sa rivale américaine de toujours.
Le porte-étendard de Lincoln est construit sur une version de la plate-forme P2 de Volvo dont Ford a pu disposer alors qu’elle possédait cette marque. La MKS est la presque jumelle de la Ford Taurus. Ce n’est certes pas un mal puisque les deux sont élaborées de cette architecture saine dont le constructeur de Dearborn a finalement su extraire le meilleur, y compris en termes de sécurité active et passive, chromosomes suédois obligent.
Permutations mécaniques
La MKS est une traction dont Lincoln tire aussi des versions à rouage intégral. D’abord lancée avec un V6 de 3,7 litres et 273 chevaux, elle fut la première à profiter du V6 Ecoboost de 3,5 litres à injection directe et double turbo. Un moteur qui lui fournit 355 chevaux et surtout un couple de 350 lb-pi à seulement 1 500 tr/min, jumelé exclusivement au rouage intégral.
Avec un poids identique pour les deux versions à quatre roues motrices, l’avantage en performance du modèle Ecoboost est très marqué. Il expédie le 0-100 km/h en 5,75 secondes alors que la MKS à V6 atmosphérique le boucle en 7,4 secondes. La MKS de base, plus légère de 68 kg, est sans doute un peu plus véloce.
Ironiquement, la version Ecoboost est la plus frugale des trois grâce à l’injection directe et au couple. Ses cotes ville/route officielles sont effectivement de 12,5 et 8,1 l/100 km alors que la MKS intégrale à V6 atmosphérique est cotée à 12,9 et 8,8 l/100 km et la traction V6 à 12,5/8,3 l/100 km.
Note salée sans les épices
Le seul inconvénient du moteur Ecoboost est la prime exigée à l’achat. Pour quelques milliers de dollars de plus, il est livré avec une ribambelle d’accessoires destinés à bonifier le confort et l’esthétique plutôt que le rendement. On peut ensuite ajouter le groupe « décor », qui inclut des jantes chromées de 20 pouces, des sièges de cuir chauffants à toutes les places et ventilés à l’avant, un volant gainé de cuir et une série d’embellissements.
Le groupe « vision » comprend le régulateur de vitesse automatique avec freinage anticollision, un système de navigation, une chaîne audio de 600 watts à 14 haut-parleurs et radio satellite, une caméra de marche arrière et le stationnement automatique. En ajoutant le toit ouvrant, le prix de la MKS Ecoboost dépasse les 75 000 $ et la voiture se retrouve en plein territoire allemand. Ma collègue Nadine Filion souhaitait l’an dernier dans ces pages que le V6 Ecoboost soit offert comme une option autonome sur la MKS. Mais à quoi bon acheter une Lincoln alors que la Taurus SHO offre une version plus puissante du même moteur dans une variation plus affûtée de la même plate-forme, pour un prix de base moindre que celui de la MKS intégrale atmosphérique? Le luxe a des raisons que la raison ignore.
Des devoirs bien faits
À défaut d’être spectaculaire, la finition de l’habitacle est soignée, les matériaux ont un bel aspect et l’écran est net et clair. On est par contre encore coincés avec un levier unique pour clignotants et essuie-glaces à la gauche et il y a encore beaucoup trop de boutons plats et identiques à la console centrale. De même, il faut encore enfoncer un bouton sur le sélecteur pour passer au point mort ce qui demeure incompréhensible et dangereux. La MKS est heureusement épargnée pour l’instant des nouveaux systèmes MyFordTouch et Sync qui connaissent des ratés. Le régulateur de vitesse automatique est superbe et le stationnement automatique optionnel se révèle facile à utiliser.
Les places arrière sont confortables et accueillantes avec une assise haute qui offre un bon maintien aux cuisses. L’espace est par contre juste pour les pieds et oubliez la place centrale dépourvue d’appuie-tête. Le dossier arrière est malheureusement fixe et la trappe derrière l’accoudoir est au mieux un passe-skis et certainement pas assez grande pour une planche à neige. Le coffre est grand, mais son ouverture est trop serrée.
La conduite est fluide et agréable à défaut d’être sportive. La MKS sous-vire légèrement en amorce de courbe, mais pivote aussitôt. Un essai hivernal a permis d’apprécier les vertus du rouage intégral sur la neige, mais surtout la motricité bien répartie entre les roues avant et arrière qui permet de maintenir un équilibre en virage impeccable en dosant simplement l’accélérateur. Le couple et la souplesse de l’Ecoboost y sont pour beaucoup. La MKS n’égale pas la somme de ses parties, aussi intéressantes qu’elles soient. Il lui manque le caractère qui permet à une berline de luxe de se démarquer. Or c’est la raison d’être de ces voitures et la justification première de leur facture corsée. Pour l’instant, ce n’est guère plus qu’une Taurus suréquipée en tenue de soirée dont les garanties sont plus généreuses.