Cadillac Seville, adios Seville
La Cadillac Seville 2004 tire sa révérence après quelque 30 années d'existence. Sa place dans la gamme Cadillac sera en effet occupée dès l'an prochain par la nouvelle STS, une propulsion qui sera construite sur le châssis Sigma, et qui pourra être équipée de la traction intégrale.
Compte tenu de cette mort annoncée qui, rappelons-le, suit l'enterrement de l'Eldorado il y a deux ans, et celui plus lointain de la Fleetwood, il ne restera plus que la De Ville, dont l'appellation remonte à 1949, pour assurer la continuité historique chez Cadillac. Les arguments (au final, essentiellement commerciaux, bien sûr) expliquant cette décision se défendent parfaitement, mais il n'en reste pas moins regrettable, par principe, que le plus doué des deux modèles soit sacrifié.
La Seville se distingue en effet de la DeVille par ses performances légèrement plus pointues, même si les deux modèles, il faut le souligner, ont beaucoup en commun, à commencer par leur V8 tout aluminium Northstar. Ce bel engin au grondement suave procure à la lourde masse de la Seville une vivacité certaine, en accélération comme en reprise. Sa puissance progressive se déploie sur une large plage d'utilisation, sans effet de couple outrancier qui exigerait qu'on se batte avec le volant pour en garder la maîtrise. Le même Northstar, lorsqu'il équipe la Seville STS à vocation plus sportive, subit quelques modifications qui lui permettent de libérer, essentiellement à haut régime, 25 chevaux supplémentaires, pour un total de 300. L'un ou l'autre est couplé à une boîte automatique dont l'onctueuse efficacité arrive à faire oublier les maigres quatre rapports qui dévalorisent sa fiche technique. Celle de la STS est munie d'un système qui sélectionne automatiquement l'algorithme des changements de rapports convenant le mieux à votre style de conduite.
Un certain magnétisme
Il importe ici d'ouvrir une parenthèse. Habituellement déclinée en versions SLS et STS (plus sportive), la Seville n'offrira que la SLS pour son dernier tour de piste sur le marché américain, les consommateurs étant plus enclins à acheter les versions moins chères des modèles en fin de cycle, croit-on chez GM. La STS devrait toutefois continuer à être vendue au Canada, selon les derniers communiqués de GM Canada, et là encore pour des raisons éminemment mercantiles : elle représente traditionnellement 75 % de toutes les Seville vendues au nord du 45e parallèle.
C'est là une bonne nouvelle pour ceux qui s'intéressent à la Seville, entre autres parce que c'est dans la version STS que se trouve la technologie de suspension magnétique à réglages continuellement variables. L'ingénieux système fait appel à des capteurs qui mesurent le déplacement des roues et de la carrosserie, et y répond en durcissant ou en relâchant l'amortissement à une vitesse proche de la milliseconde. Ce résultat est obtenu par l'entremise d'impulsions électromagnétiques qui font instantanément réagir les particules ferreuses circulant à l'intérieur du liquide servant à réguler la détente et la compression des amortisseurs. Joliment trouvé ! On en arrive ainsi à améliorer le compromis entre tenue de route et confort, le mot compromis étant bien sûr une faÇon de parler dans un contexte où l'un des éléments (le confort) n'a sûrement pas eu grand-chose à céder, tant il apparaît outrageusement favorisé.
La Seville tient bien la route pour une grosse traction américaine, mais il n'y a aucun risque de confondre son comportement routier avec celui d'une berline sport européenne. On se contentera, pour faire monter l'adrénaline un tant soit peu, de négocier les longues courbes de l'autoroute à 118 km/h, en ignorant sagement tout ce qui ressemble à un chemin en lacets, et en exerÇant une respectueuse surveillance des forces de l'ordre. Du reste, le comportement prévisible de la Seville laisse entrevoir clairement ses limites. Dans le cas contraire, un antipatinage aide à corriger les petites erreurs, sans oublier le système StabiliTrak qui applique sélectivement les freins ou réduit l'admission d'essence pour mettre fin à tout écart entre la direction imprimée par le volant et la trajectoire de la voiture. Les freins effectuent des arrêts rectilignes et aussi courts pour une telle masse, mais leur endurance n'est que moyenne.
Moins « Caddy » que la DeVille
L'intérieur de la Seville est bien aménagé, le design conservateur plaît à l'?il, et la finition satisfait même si elle demeure perfectible. La dotation de base n'est pas aussi étoffée que celle d'une DeVille, mais elle comprend sa part d'accessoires de luxe : sièges chauffants à l'avant, commandes de mémorisation pour deux conducteurs permettant de rappeler les réglages d'un grand nombre d'accessoires, système OnStar, sonar de recul, etc.
En plus de bénéficier d'un excellent confort de roulement, les occupants ont droit au soutien douillet des fauteuils garnis de cuir. À l'arrière, seules deux personnes feront le parcours en toute aise, car l'espace manque un peu pour les jambes. Le coffre, bien qu'il soit avantagé par sa large ouverture, pourrait lui aussi en donner davantage (100 litres de moins que celui de la DeVille).
On le constate, la Seville courbe l'échine devant la DeVille en matière d'espace et de commodités, deux points auxquels l'amateur traditionnel de Cadillac attache une grande d'importance. Même histoire pour sa silhouette, dont l'élégante discrétion soutient mal la comparaison avec l'impériale dégaine d'une De Ville pourtant moins raffinée. Et c'est ainsi que la Seville entrera bientôt dans les limbes de l'Histoire.