Acura 3,5RL, vieillir dans l'indifférence
Pendant que les voitures européennes et japonaises de luxe se modernisent, le vaisseau amiral de la gamme Acura, la RL, se contente de garder le fort en attendant la relève? Si relève il y a ! Si l'on se fie à la lenteur d'Acura à renouveler sa berline, on peut s'interroger sur les véritables intentions des généraux de la filiale Honda. En effet, on peut se demander si la compagnie-mère est vraiment intéressée à investir les capitaux nécessaires pour relancer les ventes de ce modèle qui ne demanderait pas mieux que de prendre la poudre d'escampette. À vrai dire, la RL doit montrer beaucoup de cran pour demeurer au front et se mesurer à des concurrentes mieux équipées et plus puissantes. Pour rester aussi impassible face à l'ennemi, elle mise essentiellement sur une fiabilité à toute épreuve et un prix compétitif. Mais il ne faut pas être dupe. Les seuls combats que cette Acura peut gagner se jouent sur le terrain des américaines où, espère-t-on, certains conducteurs délaisseront le drapeau de l'oncle Sam pour épouser le volant de cette japonaise.
Dévoilée en 1997 en remplacement du modèle Legend, la RL avait pour mission de détrôner les voitures européennes de luxe en sol nord-américain (de marque Mercedes pour ne pas les nommer). Toutefois, Acura a été prise à son propre jeu par ses congénères japonaises. En effet, en plus d'être incapable de damer le pion à ses rivales allemandes, la RL fut éclipsée par une autre japonaise de luxe : la Lexus LS 400. Contrairement au produit vedette de Toyota qui a forcé Mercedes-Benz à se retrancher pour élaborer de nouvelles stratégies, la RL n'a jamais été en mesure de se démarquer. Qui plus est, comme en témoignent les chiffres de ventes, cette Acura vit sur du temps emprunté : 65 modèles vendus au Québec en 2002 et 253 dans l'ensemble du Canada. C'est très peu pour prétendre que ce modèle fera encore long feu dans les salles de montre.
Une mercedes de 10 ans
Dès le départ, les stylistes ont manqué d'audace en concoctant une carrosserie trop calquée sur celles des voitures Mercedes-Benz des années 1990. Il ne fallait pas être devin pour prophétiser que cette silhouette de l'ère de Mathusalem serait destinée à vieillir un peu trop rapidement. Mais qu'importe, puisque même si elle est le clone d'une allemande vieillissante, la RL a une feuille de route impeccable en matière de fiabilité. De plus, à l'instar des Acura TL et MDX, et de la nouvelle TSX, la RL offre l'un des rapports prix/équipement les plus intéressants de sa catégorie.
À l'image de la carrosserie, l'habitacle de la RL avait été inspiré de celui des anciennes Mercedes. Le design du volant et de la console, la forme et la couleur des cadrans, l'aspect des matériaux et des boiseries semblaient sortis tout droit de l'imagination des stylistes du constructeur de Sindelfingen. Fatigués d'être victimes de ces quolibets (pourtant bien mérités), les stylistes d'Acura ont revu l'habitacle de la RL en 2004. Ainsi, le tableau de bord, les cadrans, la console centrale et le volant ont été redessinés. De même, pour rappeler aux passagers qu'ils montent bel et bien dans une Acura, on retrouve sur le seuil des portières des plaquettes en aluminium brossé signées Acura. Par ailleurs, il sera enfin possible de charger le lecteur de six CD à même le tableau de bord. Croyez-le ou non, mais en 2003, l'accès au chargeur de CD se faisait encore via le coffre arrière. Comme quoi la conception de la RL était complètement dépassée pour une voiture dont le prix excède tout de même les 50 000 $.
Toutefois, il faut rendre à César ce qui appartient à César, et il ne faut pas croire que la RL n'a que des défauts. Au contraire. La RL est une voiture qui ne demande qu'à rouler des milliers de kilomètres pour être appréciée à sa juste valeur. Si les ingénieurs ont négligé le design extérieur et intérieur, ceux-ci ont fait des efforts pour concevoir une voiture silencieuse dotée d'une direction précise. Par ailleurs, les sièges avant et la banquette arrière, très confortables, ne demandent pas mieux qu'à chouchouter les occupants.
Un moteur tranquille
De même, la souplesse et la douceur de la suspension vous feront oublier le mauvais état de nos routes. Et si vous faites des excès dans les courbes, n'ayez crainte, la RL restera solidement ancrée au bitume grâce au bon réglage des suspensions et au système d'assistance de la stabilité (VSA). Comparativement à ce qui est le cas dans les autres produits de la gamme Acura, la sonorité de la chaîne audio est exceptionnelle et n'aura aucun mal à vous transporter sous d'autres cieux.
Mais là où le bât blesse, c'est sous le capot. Réputé pour être l'un des meilleurs moteurs V6 de l'industrie, le 3,5 litres de la RL ne développe que 225 chevaux contre 260 dans la MDX et la TL Type S (V6 de 3,2 litres). Qui plus est, seule une boîte automatique à quatre rapports peut lui être assignée. Un autre coup bas pour la RL puisque ses s?urs MDX et TL sont pourvues d'un cinquième rapport.
Au jeu des comparaisons, il est difficile pour la RL de se frotter aux moteurs V8 des Lexus LS 430 et Infiniti Q45. Toutefois, compte tenu de l'écart de prix qui sépare celles-ci de la RL (plus de 20 000 $), ce parallèle s'avère une injustice envers le vaisseau amiral d'Acura. Si l'on veut être équitable, la RL doit être comparée aux BMW Série 5, Lincoln LS, Mercedes Classe E et Volvo S80 à moteur six cylindres. La RL n'a aucune difficulté à tenir son bout par rapport à ces modèles beaucoup plus dispendieux.