Suzuki Aerio, bien plus qu'un courant d'air...
« Une Aero ? » me demandait un amateur de chocolat. « Une Alero ? » s'inquiétait une amie. « Ah, tu veux parler de la Kia Rio ! » proclamait un « connaisseur » tandis que Roger Taillibert pensait à la RIO? Eh bien non ! Il s'agit de l'Aerio qui, sur le marché européen, s'appelle Liana, un nom autrement plus joli. Pour Suzuki, réputé pour ses motos et ses mignons 4X4, la nouvelle voiture doit faire oublier les tristes Forsa, Swift et Esteem ! Le plus petit constructeur d'automobiles japonais a concocté sa nouvelle Aerio en tenant compte de trois principes de base qui font vendre de la bagnole en terre américaine et qui manquaient cruellement aux premières créations : accessibilité, fiabilité et, surtout, un look accrocheur. L'Aerio, cette nouvelle sous-compacte, se décline en deux modèles : berline et hatchback (que les dirigeants de Suzuki se plaisent à appeler fastback. Mais n'ayons pas peur des mots, il s'agit d'un hatchback, ou d'une familiale, tout simplement). Ces considérations sémantiques étant finalement de bien peu d'importance, précisons que l'Aerio 2003 est offerte en deux niveaux de présentation : GL et GLX pour la berline et S et SX pour la familiale.
Les versions les plus dépouillées, lire GL ou S, ne sont pas si dépouillées que Ça et offrent, de série, une radio AM-FM-CD, un chauffe-moteur, les lève-glaces électriques, un tachymètre et d'autres éléments. J'espère que quelqu'un de chez Honda ou Toyota prend des notes? Les niveaux SX et GLX ajoutent le climatiseur, le régulateur de vitesse, des roues d'alu de 15 pouces, quelques babioles purement esthétiques et j'en passe. On ne peut pas accuser Suzuki de « chicherie ». Une seule option au catalogue, le climatiseur pour les versions de base. Point. Fait à noter, il est possible de trouver une berline à moins de 16 000 $ tandis que la familiale la plus dispendieuse se vend moins de 23 000 $. Ces prix se révèlent fort réalistes et s'alignent directement sur ceux des Honda Civic Coupe, Toyota Matrix et Mazda Protegé5. Suzuki cherche la guerre?
La familiale, d'abord
Mais on ne part pas combattre l'ogre avec un cure-dents, c'est connu. Dès la première salve, côté présentation, la Suzuki Aerio berline se fait planter royalement, surtout la version de base, dépourvue des « babioles purement esthétiques ». On dirait une Toyota Echo avec des phares de Ford Focus. Admettez que, comme compliment, on a déjà entendu mieux ! À l'opposé, la familiale représente une arme de plus grande puissance et se vend déjà presque trois fois plus que la berline. Certes, on aime ou on n'aime pas mais, au moins, on ne peut nier qu'avec sa partie arrière vitrée qui descend bien bas et ses feux stylisés, cette partie accroche l'?il. Parlant de design automobile, celui de l'Aerio a été basé sur la lettre « A ». On retrouve donc le triangle du « A » un peu partout, des phares aux feux arrière en passant par les vitres placées en amont des glaces latérales avant. Ces petites vitres ne sont pas sans rappeler celles de la Ford Aerostar (Dieu ait son âme et qu'Il la garde le plus longtemps possible).
Tout comme la carrosserie du hatchback, l'intérieur fait assez différent merci. Et là, les détracteurs se pointent en grand nombre? Le tableau de bord, en forme de long triangle aplati, renferme des cadrans digitaux de couleur ambre, un gadget qui n'intéressera pas grand monde. Les plus vieux seront déroutés et les plus jeunes, élevés au Nintendo, trouveront la présentation graphique simpliste et démodée. Pour la précision, on repassera. Il n'est pas rare que la voiture soit parfaitement immobilisée et que le cadran indique encore 4 ou 5 km/h. Vive les bonnes vieilles aiguilles ! Ce bizarroïde tableau de bord ne renferme pas assez d'espaces de rangement, ce qui est surprenant en cette ère de disques compacts, de téléphones cellulaires et de lunettes de soleil. Quant aux plastiques, ils proviennent sans doute des rejets d'une usine de fabrication de Taiwan ayant cessé ses opérations depuis les années 60. Les sièges sont confortables (même à l'arrière), les principes de base de l'ergonomie sont respectés et, autant dans la berline que dans le hatchback, l'espace disponible est surprenant, gracieuseté d'un design en hauteur comme la tendance le désire depuis quelques années. Le bébé de Véronique et de Louis (Morrissette, pas Butcher !) ne se sentira pas à l'étroit. Et que dire de la visibilité qui ne cause vraiment pas de problèmes. Mais qui parle de grandes surfaces vitrées parle aussi de chaleur et le climatiseur, par temps de canicule, peine à la tâche.
Un p'tit vent du nord?
Dès le contact tourné, on se demande si Suzuki n'aurait pas oublié d'installer un peu de matériel insonorisant? Semble-t-il que non, malheureusement. Et ce n'est encore rien, attendez d'accélérer !. La puissance affichée du 4 cylindres de 2 litres, le seul offert, est de 145 chevaux, quatre de plus que l'an dernier. On le déclare comme étant le plus puissant de sa catégorie, ce qui devrait, normalement, en faire une véritable bombe. Mettons une bombette. Eh bien ! je ne sais pas où ils les ont foutus ces chevaux, je n'ai jamais réussi à tous les trouver ! Je souhaite que Suzuki ne joue pas le jeu dangereux des Mazda (Miata), Ford (Mustang) et, tout récemment, Hyundai, dont les départements de marketing poussaient le crayon un peu fort en ce qui concerne la puissance? Les accélérations ne sont pas vraiment pénibles, mais la seule fois où j'ai pu réaliser le 0-100 km/h en moins de 11 secondes, c'est lorsque j'ai actionné mon chronomètre en retard ! Le passage de 80 à 120 km/h prend plus de 9 secondes avec l'automatique qui fonctionne avec plus ou moins de douceur. Pourquoi ne pas opter pour la transmission manuelle plutôt agréable à manipuler malgré une 5e vitesse quelquefois réticente ?
Contrairement au moteur, les suspensions MacPherson m'ont semblé fort bien étudiées. Elles assurent un confort de bon aloi tandis que la tenue de route se montre relativement saine malgré un roulis important en virage serré et un sous-virage marqué. Demeurons calmes ! De toutes faÇons, si vous êtes trop cow-boy, les freins, avec leurs petits tambours à l'arrière, sauront vite vous rappeler les limites de l'Aerio. Ils perdent rapidement de leur efficacité et dégagent une odeur de chauffé qui n'inspire rien qui vaille? après seulement trois freinages vigoureux ! Les freins ABS, offerts uniquement dans la familiale SX, assurent des arrêts plus rectilignes, plus courts aussi mais leur résistance à l'échauffement ne semble pas meilleure. La direction, passablement précise, offre un « feedback » moyen et n'apparaît pas particulièment agréable. En passant, elle tire un peu vers la droite en accélération. Il s'agit du phénomène de l'effet de couple (y'en a toujours un des deux qui tire sur son bord !).
Quatre roues motrices, c'est dans l'vent !
La mode étant aux quatre roues motrices et Suzuki possédant une belle expertise dans ce domaine, il était logique de concocter une Aerio à traction intégrale. Même si le 0-100 km/h demande une grosse seconde supplémentaire et que le moteur, lui, requiert environ 1 litre de plus d'essence tous les 100 km, le rouage intégral améliore considérablement l'adhérence au pavé. On ne parle toujours pas d'une voiture sport, mais on peut ressentir un peu plus de plaisir à la pousser dans les courbes. Attention, cependant, de ne pas choisir ce mode de traction pour passer à travers nos beaux hivers. La hauteur libre sous le pare-chocs avant devrait rapidement vous inciter à ne pas trop jouer à la déneigeuse? Seule la transmission automatique est offerte avec ce système qui envoie, sur une chaussée parfaite, entre 95 et 100 % de la traction aux roues avant. Dès que les conditions se détériorent, un visco-coupleur répartit la puissance aux roues possédant la meilleure traction, jusqu'à un maximum de 50 % aux roues arrière.
En perspective?
Pour une fois, une automobile conÇue par Suzuki fait tourner les têtes. C'est d'ailleurs l'un de ses mandats. Disons que c'est le mandat de la familiale, pour faire preuve de réalisme. De plus, le hatchback devrait s'attirer nombre d'amateurs de tuning qui ne ménagent pas leurs sous et leurs efforts pour personnaliser leur voiture. Là où le bât blesse, c'est lorsqu'on compare l'Aerio avec ses rivales directes que sont les Protegé5, Pontiac Vibe et Toyota Matrix. Lors d'un match comparatif, dont les résultats sont présentés en première partie du présent Guide de l'auto, il fut brutalement évident que l'Aerio n'offre pas le même niveau de raffinement, ni la même tenue de route, ni le silence de roulement de ses « amies ». Bref, l'agrément de conduite est moins élevé tout comme, sans doute, la valeur de revente. Malgré tout, il n'y aurait qu'à donner un peu plus de chevaux au moteur et à revoir l'insonorisation et le tableau de bord pour que la Suzuki Aerio devienne une redoutable concurrente des japonaises établies.