Sans avoir tout à fait la même auréole que Ferrari, la marque Maserati, fondée en 1914, a déjà été l'un des fleurons de l'industrie automobile italienne. Qu'on se rappelle le championnat du monde des conducteurs enlevé par Fangio sur Maserati 250 F en 1957 ou simplement la superbe Ghibli GT qui ornait la page couverture du Guide de l'auto 1969. Que ce soit sur les circuits ou sur la route, Ferrari et Maserati ont longtemps été des adversaires redoutables, jusqu'à ce que l'étoile de la marque au trident commence à pâlir au cours des années 80. Rachetée par l'imprévisible Alejandro De Tomaso, la petite firme italienne s'est enfoncée dans la médiocrité avec des voitures banales comme la tristement célèbre Maserati Bi-Turbo. Depuis novembre 1999, c'est Ferrari qui a pris les commandes et qui entend redorer le blason de son ancien concurrent.
Disons tout de suite que les choses sont mal parties si j'en juge par mon essai du Spyder Maserati. En toute honnêteté, il y a longtemps que je n'avais pas conduit une voiture aussi mal en point. Le pire irritant était sans l'ombre d'un doute le manque de rigidité du châssis qui se traduisait par un concert de bruits de caisse et, surtout, par des trépidations du tableau de bord qui m'ont ramené à la pire époque des roadsters anglais. Face à mon étonnement, les gens de Ferrari Québec (également concessionnaire Maserati) m'ont dit qu'il s'agissait d'un des premiers modèles à avoir été construits et que les plus récents Spyder étaient nettement plus solides. Vérification faite, j'ai noté une certaine amélioration, mais il reste que ceux qui envisagent l'achat de ce cabriolet Maserati ont intérêt à faire leurs devoirs en essayant la voiture au préalable. Le coupé serait sans doute un achat plus judicieux, bien que les deux modèles partagent certaines caractéristiques plus ou moins souhaitables.
Une fiche enviable
Un bref coup d'?il à la fiche technique des Maserati Coupé et Spyder nous permet de constater que ceux-ci étrennent un moteur V8 de 4,2 litres à bloc d'aluminium et carter sec développant 390 chevaux à 7000 tr/min, soit seulement 10 chevaux de moins qu'un coupé Ferrari 360 Modena. La puissance peut être exploitée par une boîte de vitesses manuelle à 6 rapports ou encore par une transmission semi-automatique très semblable à celle que l'on retrouve dans les Ferrari 360 et 575. Nommée Cambiocorsa (transmission de course) au lieu de F1, elle propose quatre modes de fonctionnement : Normal, Sport, Automatique ou Low Grip.
Dessinés par Giugiaro, les deux modèles peuvent être équipés d'une suspension active baptisée Skyhook mise au point par la firme allemande Mannesmann-Sachs et offerte en option. Il s'agit essentiellement d'amortisseurs réglables électroniquement dont le niveau de fermeté varie selon les conditions de la chaussée ou le style de conduite. Des roues de 18 pouces et des freins Brembo avec étriers à 4 pistons font également partie d'une fiche tout compte fait assez enviable.
Un châssis déficient
L'expérience au volant est cependant moins heureuse. Les qualités essentielles à une bonne voiture sport sont bel et bien présentes, à commencer par un moteur d'une belle éloquence aussi performant qu'agréable à écouter. La tenue de route saura aussi satisfaire les conducteurs les plus exigeants et le Spyder Maserati est gratifié d'une direction on ne plus précise en même temps que d'un faible diamètre de braquage qui contribue dans une large mesure à la maniabilité de la voiture. Dès la prise en main, on se sent même très à l'aise au volant jusqu'à ce que l'on rencontre un premier trou. Dès lors, les qualités initiales du Spyder se trouvent malheureusement ombragées par un châssis carrément déficient qui résiste mal à la torsion en virage et qui donne lieu à des soubresauts dans le tableau de bord à la moindre imperfection du revêtement. Ajoutez à cela une suspension d'une telle rudesse que le coffret de rangement situé entre les deux sièges s'ouvrait tout seul au gré des bosses et vous aurez une petite idée du désastre auquel je fais allusion. De toute évidence, la suspension active avait décidé de prendre congé tellement la voiture était réfractaire aux mauvaises routes.
En admettant que je sois tombé sur le mauvais numéro, il reste que l'on est en droit de s'interroger sur la présence d'une lunette arrière en plastique sans dégivrage dans une voiture de ce prix.
Ces problèmes ne risquent pas de se manifester dans le coupé qui peut compter notamment sur un empattement plus long. Par contre, quel que soit le modèle choisi, on devra accepter les changements de rapports plutôt brusques de la transmission Cambiocorsa. À haute vitesse, Ça peut toujours aller, mais en conduite urbaine, votre compagne n'appréciera peut-être pas d'être projetée la tête vers l'avant à chaque passage de vitesse. Il m'a semblé aussi que les palettes situées sous le volant qui servent à changer les rapports pourraient être moins rapprochées du tableau de bord.
Si vous vous êtes rendu jusqu'ici dans la lecture de ce texte, vous méritez de savoir que le Spyder Maserati a tout de même certains mérites, dont des sièges merveilleusement confortables, une instrumentation complète, une finition soignée et deux arceaux de sécurité permanents. C'est bien mince pour tirer une conclusion favorable de cet essai du Spyder Maserati. Si Ferrari veut réellement faire revivre la belle époque de cette marque autrefois prestigieuse, elle devra serrer la vis encore un peu plus. En résumé, on s'attendait à beaucoup mieux d'un duo aussi doué.