Buick Rendezvous, la normale?
La beauté et le dédain sont parfois inséparables. À partir d'une même plate-forme, les ingénieurs de chez GM ont réalisé deux véhicules aussi différents que le joli Buick Rendezvous et le vilain gros canard Aztek. On sait que ce dernier cache une mécanique quand même assez compétente sous cette robe d'un goût douteux, mais en ce qui a trait au Buick, la beauté a-t-elle seulement l'épaisseur de la tôle ?
À première vue, l'observateur tente vainement de deviner à « qui » il a affaire. Le Rendezvous n'est pas à proprement parler une fourgonnette puisque ses portières classiques à l'arrière ne coulissent pas, non plus un véhicule utilitaire sport, car son groupe motopropulseur est emprunté à la Pontiac Montana et parce qu'il ne possède pas de boîte de transferts pour sa version intégrale. En fait, on a encore affaire à un véhicule hybride, ou « multiusage », à qui on a donné la périlleuse mission de plaire à tout le monde et à son père, et à la mère de famille, et surtout à une clientèle qui serait moins âgée que l'achalandage typique qui défile de plus en plus péniblement dans les concessions Buick. Mais, trêve de définition, et examinons plutôt en détail cette espèce de créature androgyne.
Avantage Buick
Le Rendezvous et l'Aztek ont sensiblement la même taille même si l'empattement et la longueur hors tout du Buick s'étirent sur à peu près 10 cm de plus. Ce dernier se distingue aussi par une suspension arrière indépendante même en version traction, mais ils partagent le même groupe motopropulseur. On retrouve en effet l'omniprésent tandem formé par le V6 3,4 litres, couplé impérieusement à une automatique à 4 rapports. C'est la boîte qui réussit la meilleure prestation, car elle fonctionne avec douceur et efficacité. Le moteur ne réussit plus à camoufler ses cheveux blancs et s'essouffle au-delà de 4 000 tr/min, bien qu'il fonctionne adéquatement en deÇà de ce régime pourtant bien modeste. Les reprises satisfont dans l'ensemble, sauf à pleine charge où pépé devrait pouvoir compter sur une pompe pour lui dilater les bronches.
L'acheteur a le choix entre trois agencements des places assises puisque le Rendezvous qui se décline en CX et CXL offre à la base des baquets à l'avant et une banquette 50/50 amovible dans la rangée médiane, avec la possibilité d'avoir des baquets pour la 2e rangée et une banquette complètement à l'arrière. Le dossier de cette dernière se replie pour augmenter la capacité de la soute à bagages qui n'est pas très imposante sans cette mesure. Le mobilier diffère complètement de celui de l'Aztek en ce sens qu'il fait dans le classique. Les tissus assez cossus ne heurtent pas le regard et le cuir deux tons, offert dans le CXL, semble de qualité honorable. La planche de bord plus conventionnelle est attrayante, mais le fond des instruments réalisé en plastique peint de couleur aluminium détonne un peu. Les contrôles et les touches au dessin et au toucher agréables redonnent confiance envers les designers de GM.
L'habitacle plus vaste et aussi plus haut que celui de l'Aztek dégage un environnement aéré dans lequel il est agréable de rouler. Les fauteuils à l'avant vous assurent un confort appréciable, malgré la platitude de leur assise, et les passagers de la 2e rangée sont assez bien lotis. Le bât blesse davantage pour les perdants à la loterie qui échouent à l'arrière. Les espaces de rangement de bonne dimension abondent et un lecteur de CD/DVD avec écran à cristaux liquides est offert en option pour captiver les jeunes pendant le voyage. Le moins que l'on puisse dire, c'est qu'on s'éloigne de la gériatrie.
Bien garni et compétent
Parlant de l'équipement, la version CX embarque entre autres des freins à disque partout, des roues de 16 pouces, l'antipatinage toutes vitesses, un lecteur CD, la climatisation, le régulateur de vitesse et les principales assistances électriques. Le CXL ajoute principalement le groupe freins ABS/coussins de sécurité latéraux, (qui étaient de série en 2002), l'antipatinage, le système OnStar, la climatisation à deux zones, une galerie de toit, les sièges, rétroviseurs et radio avec mémorisation, ainsi qu'un indicateur de gonflage des pneus. Le Rendezvous peut aussi recevoir le système de traction intégrale VersaTrak dont l'intervention s'accomplit de faÇon complètement transparente. Lorsque les capteurs de l'ABS détectent un patinage des roues avant, la puissance est répartie vers le train arrière grâce à un différentiel autobloquant et à deux pompes de type gérotor. Simple, et efficace dans la plupart des circonstances.
Le comportement routier du Rendezvous demeure un peu une énigme. Le véhicule de presse à traction intégrale essayé au Québec pendant une semaine avait une suspension tellement molle qu'il engendrait le mal de mer sur les grandes ondulations des autoroutes. Par ailleurs, un modèle 2003 à simple traction conduit peu après au Michigan (sur des routes aussi défoncées qu'au Québec) semblait beaucoup mieux contrôlé même s'il manquait encore de retenue. Un ingénieur responsable des suspensions chez Buick m'assure pourtant que les ressorts et les amortisseurs sont identiques dans tous les modèles. Dans tous les cas cependant, les limites de l'adhérence sont rapidement atteintes avec un centre de gravité assez haut perché et des pneumatiques bien ordinaires en taille 70. Le mieux est de l'essayer vous-même si vous envisagez d'en faire l'achat.
Il n'est pas surprenant que les ventes du Rendezvous dépassent et de loin celles de l'Aztek. En offrant un véhicule original et compétent s'adressant à une clientèle plus jeune mais aisée, dont l'archétype est représenté jusqu'à un certain point par Tiger Woods, la division Buick enregistre une progression de son chiffre d'affaires, et peut maintenant compter sur une clientèle « élargie » vers le bas. Beau coup ! On pourrait même compter un oiselet.