Buick Allure, un péché classique
La direction de General Motors, Bob Lutz en tête, a eu la surprise d'apprendre lors d'une visite au Canada à la fin de 2003, que la Buick LaCrosse portait un nom qui était loin d'être politiquement correct dans la Belle Province ! En effet, si le terme LaCrosse sert à identifier un sport très populaire sur les campus américains, au Québec, ce mot sert souvent à désigner un acte généralement pratiqué en solitaire et banni par l'Église ! C'est ce qui explique pourquoi cette berline est maintenant appelée Allure au Canada et non pas « vous savez quoi ».
Peu importe le nom choisi, cette nouvelle Buick est appelée à remplacer les Century et Regal qui tirent leur révérence cette année. Les responsables de cette division nous parlent avec enthousiasme de l'Allure, une voiture qui fait peau neuve. Selon ces personnes, le stylisme est passé de conservateur à audacieux. Sans vouloir être trop sévère, soulignons que les photographies de cette voiture rendent son allure plus agressive qu'elle ne l'est en réalité. Mais compte tenu du fait que cette Buick cible une clientèle quand même assez conservatrice, c'est un compromis acceptable. La partie avant arbore la nouvelle grille de calandre qui sera la signature visuelle de Buick, tandis que des blocs optiques ovoïdes montés sur les ailes et flanqués de phares circulaires sont un signe évident de renouveau dans cette division. C'est moins réussi de profil alors que la ceinture de caisse se relève à l'arrière. Par contre, la partie arrière est plus dynamique avec un coffre surélevé
se terminant abruptement.
Une fois à bord, l'habitacle est spacieux et les places avant ne se prêtent à aucune critique particulière. Elles sont confortables, le dossier est haut et le siège supporte bien les cuisses. Par contre, le support latéral laisse encore une fois à désirer. Une autre faiblesse de cet environnement est la planche de bord dont le design est sage, archi sage. Je veux bien croire que les acheteurs de voitures Buick sont plutôt conservateurs, mais un peu plus d'imagination serait appréciée. Ici, tout semble avoir été dessiné afin de ne choquer personne. Tout est en demi-tons bien que l'agencement des éléments soit
correct : les appliques de bois se retrouvent à la bonne place, les boutons sont de type rotatif, faciles à localiser et manipuler. Bref, à défaut d'imagination, les concepteurs ont choisi la carte de l'efficacité et de la sobriété. Quant aux places arrière, elles sont correctes, mais une ceinture de caisse plutôt haute ne sera pas appréciée des personnes de petite taille.
Cette Buick est tout ce qu'il y a de plus classique en fait de présentation. Heureusement, sa mécanique est plus moderne, du moins en partie.
Deux V6?
Lorsque j'ai parcouru le communiqué de presse remis au dévoilement de cette berline dans le cadre du Salon de l'auto de Toronto en février 2004, la première chose qui m'a sauté aux yeux est l'utilisation du moteur V6 3,8 litres de 200 chevaux. Depuis des années, ce « vieux » V6 est utilisé à toutes les sauces par Buick et ce n'est pas nécessairement un signe d'évolution. Mais il faut prendre le temps d'analyser la situation. Ce moteur remonte dans la nuit des temps, mais cela ne l'empêche pas d'offrir de bonnes performances, une fiabilité supérieure à la moyenne et une consommation de carburant vraiment rassurante. En fait, son seul défaut majeur est d'utiliser des soupapes en tête. Cette configuration mécanique assure des accélérations initiales très nerveuses. Mais passé les 50 km/h, le moteur s'essouffle et les performances s'amenuisent. En conduite urbaine et moyennement sportive, ce V6 constitue un choix logique.
Pour ne pas être accusés de toujours avoir recours à des technologies d'une autre époque, les ingénieurs de cette division se sont payé la traite en adoptant le moteur V6 3,6 litres, le même que celui utilisé sur les Cadillac STS par exemple. Ce moteur est non seulement tout en en alliage, mais sa culasse abrite des arbres à cames doubles permettant d'actionner quatre soupapes par cylindre. Il est difficile de trouver un moteur V6 plus sophistiqué que ce dernier. En passant, vous serez heureux d'apprendre que ces deux moteurs s'abreuvent à l'essence régulière. Il aurait été sans doute commercialement viable d'offrir une boîte automatique à cinq rapports ou même à six rapports comme sur la Ford 500, mais la transmission à quatre rapports jouit d'une excellente réputation en fait de fiabilité et d'efficacité.
Comme il s'agit d'une Buick, l'insonorisation a été l'objet d'une attention toute particulière. Pour ce faire, les communiqués font mention du terme "QuietTuning". Contrairement à ce que vous seriez porté à croire, la division Buick ne s'est pas laissée emporter par la vague du "Tuning" qui a déferlé sur toute l'industrie. C'est surtout sur la partie "Quiet" que porte cette caractéristique alors que de multiples éléments ont été raffinés afin de mieux insonoriser l'habitacle.
Plus raffinée sous tous les aspects, cette nouvelle Buick chastement baptisée Allure compte également sur une suspension qui isole bien des aspérités de la route, mais sans nécessairement être d'une mollesse exagérée. Les amateurs de conduite rapide apprécieront pour leur part la version CXS avec sa suspension Touring, son moteur V6 3,6 litres et une direction moins assistée. Pour les acheteurs plus conservateurs, les modèles CX et CXL ont une suspension plus bourgeoise. Et si vous croyez que cette Buick a complètement renoncé au passé, il est possible de la commander en version cinq ou six places ! Dans ce dernier cas, l'accoudoir central peut être relevé pour accommoder un troisième occupant à l'avant...