Suzuki Kizashi 2011: Le verre à moitié vide
Il est difficile pour nous, Nord-Américains, de concevoir que Suzuki est un très important manufacturier qui distribue ses produits à travers le monde. En 2009, par exemple, l’entreprise japonaise employait pas moins de 14 000 personnes. Suzuki est surtout reconnue pour ses scooters, motos, VTT, moteurs de bateaux, petites voitures et tout aussi petits 4x4. On ignore qu’elle produit aussi des fauteuils roulants motorisés, de l’équipement industriel et, depuis peu, des voitures intermédiaires, dont la nouvelle Kizashi !
La Kizashi se mesure à des vedettes établies telles les Honda Accord, Toyota Camry, Subaru Legacy, Hyundai Sonata et autres Ford Fusion et Chevrolet Malibu. Cependant, ses dimensions plus réduites que celles de ses « amies » la placent plutôt entre les intermédiaires ci-haut mentionnées et les compactes que sont les Honda Civic, Toyota Corolla, Subaru Impreza ou Ford Focus. Mais, comme nous le verrons plus loin, son comportement routier la rapproche effectivement des intermédiaires.
La Kizashi, contrairement à toutes ses rivales, n’est offerte qu’en une seule version, nommée SX. Aucune option n’est même proposée. Très bien équipée, on n’y retrouve toutefois pas de GPS. Selon Suzuki, cet accessoire aurait trop fait augmenter le prix de vente. De plus, les manufacturiers ne peuvent rivaliser, en termes de prix, avec les fournisseurs indépendant que sont les TomTom et Garmin, par exemple. L’idée de n’offrir qu’une seule version « full au bouchon » peut être débattue, mais toujours selon Suzuki, les Canadiens préfèrent les versions ainsi équipées.
Alors, ça s’en vient ?
Au-delà d’un nom bizarre qui, en français, veut dire « quelque chose de grandiose s’en vient », traduction libre de « something great is coming », il faut avouer que la Kizashi affiche une robe dynamique… à défaut d’être très originale. En fait, elle ressemble beaucoup à une Volkswagen Jetta, surtout à l’avant. La partie arrière se montre toutefois plus inédite avec un dessus de coffre arrondi qui fait penser à une queue de canard. Les gens rencontrés lors de nos différents essais menés au volant de cette nouvelle Suzuki ont tous apprécié son look. Un look qui ne devrait pas se démoder demain matin.
L’habitacle, on n’en sera pas surpris, n’est pas des plus vastes. Cependant, les designers de Suzuki ont réussi à créer un milieu qui ne rebute pas les claustrophobes. Pour autant que le noir intégral ne leur donne pas le cafard… Le tableau de bord est réussi, tant au niveau des jauges au design un tantinet rétro, que des boutons et commandes faciles à comprendre et à manipuler, même en hiver. Un bémol par contre pour certaines commandes du système audio Rockford Fosgate, à la sonorité au demeurant fort agréable, qui sont un peu trop éloignées du conducteur. Heureusement, ces commandes sont dupliquées au volant. Les espaces de rangement sont nombreux et le coffre à gants peut contenir plus que des gants, une rareté de nos jours.
Les sièges avant font preuve de confort, celui du conducteur possédant même trois mémoires ! Néanmoins, les très grandes personnes ou celles possédant une enveloppe corporelle exagérée pourraient trouver que le siège du conducteur manque de recul. La position de conduite se trouve en un clin d’oeil, mais au fil des kilomètres, j’ai trouvé le repose-pied inconfortable, n’étant pas suffisamment incliné vers le conducteur. Le volant se prend bien en main… Heureusement, car le cuir de son boudin est un peu trop glissant à mon goût, signe d’un cuir de qualité sans doute assez ordinaire, merci. D’ailleurs, le pommeau du levier de vitesses, recouvert du même matériau, était passablement égratigné dans une de nos voitures d’essai qui n’avait même pas 3 000 kilomètres. Autrement, la finition intérieure s’avère fort relevée et les matériaux sont de belle qualité.
Les places arrière proposent un espace correct, autant pour les jambes, les coudes que la tête. Le même qualificatif s’applique au confort général de cette banquette dont les dossiers se replient pour agrandir un coffre ma foi fort logeable, compte tenu des dimensions extérieures. Et comble d’anachronisme dans une voiture moderne, son ouverture est suffisamment grande !
Une plate-forme inédite
La Kizashi est la carte de visite de Suzuki dans le monde des grands. Pour être pris au sérieux, le constructeur a conçu une toute nouvelle plate-forme, très solide. Côté mécanique, Suzuki a passablement moins dépensé… On s’est contenté du quatre cylindres 2,4 litres du Grand Vitara qu’on a légèrement modifié. Sa puissance est correcte malgré un certain manque d’enthousiasme à bas régime, mais comme la voiture est l’une des plus lourdes de sa catégorie, ses performances sont en retrait.
Comme si ce n’était pas suffisant, on a affublé ce moteur d’une transmission à rapports continuellement variables (CVT), qui semble constamment bouffer une trentaine de chevaux. En usage normal, bien des gens ne se rendront même pas compte qu’ils ont affaire à une CVT. Mais en accélération vive, l’augmentation phénoménale du nombre de décibels en amènera plusieurs à lever le pied, par instinct de survie mécanique ! Un peu plus de matériel isolant ne réglerait pas le problème, mais on se rendrait moins compte des limites de cette transmission. Au moins, son mode manuel, activé par des palettes placées derrière le volant, est agréable à utiliser. Une bonne transmission manuelle à six rapports aussi serait agréable à utiliser… La Kizashi est donnée pour 9,3 litres aux cent kilomètres en ville et 6,8 sur la route. Lors d’un essai hebdomadaire, nous avons obtenu une moyenne de 9,4, mais nous devons avouer que nous avons roulé en grande majorité sur autoroutes. Ce qui ne fait pas de la Kizashi un modèle de sobriété. Mais elle n’est pas, non plus, une alcoolique finie. Cependant, le fait que le réservoir d’essence soit plutôt petit (63 litres) entraîne des arrêts plus fréquents à la pompe, ce qui peut induire en erreur les personnes qui calculent leur consommation en termes de temps, genre « Je fais même pas une semaine avec ma tank ! ».
Là où cette nouvelle Suzuki se démarque de la concurrence, c’est au niveau de son rouage intégral. Dit « intelligent », il anticipe les pertes de traction. Si nos voisins sous le 45e parallèle ont le choix entre une version traction (roues avant motrices) et une autre AWD (intégrale), nous n’avons droit qu’à cette dernière. En revanche, un bouton au tableau de bord permet de rouler en mode traction uniquement. Les éléments se déchaînent ? Le conducteur n’a qu’à activer le rouage intégral. Cependant, il faut noter que même en mode traction, le système envoie une infime partie du couple aux roues arrière. Aussi, même en mode intégral, la majeure partie du couple sera expédiée aux roues avant. Dès que le besoin se fait sentir, le couple est envoyé aux roues arrière jusqu’à hauteur de 50 %. Avec une Kizashi, on ne peut pas suivre un Jeep Wrangler, mais une Subaru Legacy, ça oui !
Le bénéfice du doute C’est sur la route que la Kizashi donne sa pleine mesure. Agréable à conduire à défaut d’être agile, douce, feutrée même, cette chose grandiose qui s’en vient tient très bien en courbes, même en mode traction, ses suspensions conventionnelles mais bien fignolées assurant à la fois confort et lien avec la route. En virage serré, on dénote un certain roulis, mais ce n’est pas dramatique, d’autant plus que la direction électrique étonne par sa précision. Lorsqu’on pousse la machine, il ne faut pas être surpris par l’action très bruyante du système de contrôle de la traction et de la stabilité latérale, qui heureusement pour des nordiques devant quelquefois se sortir d’un banc de neige, se désactive complètement. Les freins sont suffisamment puissants même si la pédale, lors d’un arrêt d’urgence, est trop molle à mon goût.
Les dirigeants de Suzuki ne s’attendent pas, avec la Kizashi, à révolutionner le marché de la berline intermédiaire. Bien leur en prenne, ils ne seront pas déçus…
Feu vert
Lignes agréables
Habitacle confortable
Rouage intégral décent
Conduite dynamique
Équipement complet
Feu rouge
Moteur et transmission dépassés
Valeur de revente sans doute triste
Peinture appliquée
avec parcimonie
Réseau de concessionnaires limité