Jeep Wrangler 2011, il sait parler aux femmes...
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Véhicule militaire, le Jeep est, dès ses premiers tours de roues, l’affaire des hommes. Il faut avouer qu’en ce début des années 40, ce 4x4 donne un nouveau sens au mot rudimentaire… Indiciblement impotent en accélération mais capable de se sortir des pires ornières, le Jeep (d’ailleurs, on se demande encore d’où lui vient ce nom, sans doute de GP - General Purpose - mais on attend encore la preuve), le Jeep, donc, ne possède pas de toit, une suspension supra dure, pas de chauffage et une direction extraordinairement aléatoire.
Inutile, donc, de dire que le Jeep original s’adressait aux soldats les plus endurcis. Après la guerre, on a dû lui trouver d’autres applications et la population a commencé à voir dans ce véhicule « inembourbable » (un nouveau mot créé par le Guide de l’auto, c’est l’Académie Française qui va être fière!) des possibilités fort variées. Ainsi est née la série des CJ, destinée au grand public et, d’améliorations en raffinements, le Wrangler tel que nous le connaissons aujourd’hui.
Un psy, svp
Curieusement, et heureusement, le Jeep contemporain, s’il a gagné en subtilité n’a rien perdu en capacités hors route. Et s’il peut toujours compter sur l’admiration des hommes, il sait rejoindre les femmes comme bien peu de véhicules savent le faire. Est-ce le sentiment d’invincibilité qu’il procure ou son charme, tout simplement? Un psy pourrait sans doute analyser la situation mieux qu’un journaliste automobile!
Toujours est-il qu’il sait y faire avec les dames. Ma collègue Nadine, grande « off-roader » devant l’Éternel, titrait son essai du Wrangler dans le Guide de l’auto 2011 « Mais je l’aiiiiiiiiiime! » traduisant ainsi très bien la relation amour/haine qu’on peut avoir avec ce charismatique 4x4. Car il a les défauts de ses qualités! Nous y reviendrons.
Lors de ma semaine d’essai, ma vieille amie Josée a pu réaliser un rêve, celui de conduire un Wrangler. Elle a été bien servie puisque j’avais le Rubicon, la version 4x4 la plus extrême. Le nom Rubicon vient de « Rubicon Trail », une piste incroyablement difficile du nord de la Californie que seuls les 4x4 les plus doués (et les pilotes les moins nerveux) peuvent franchir. Le Wrangler Rubicon, bien qu’il soit adapté pour la route, peut s'affranchir avec doigté de ce parcours mythique.
Un beau moment de vie
Dès les premiers tours de roues, la désormais quadragénaire n’en revenait pas du sentiment de confiance que donnait ce bloc de métal mobile. Après s’être familiarisée avec le véhicule, Josée attaquait son premier banc de neige, un ti-tas glacé qui n’a même pas fait sourciller le Wrangler, dont seules les roues arrière étaient engagées. Déjà, après quelques ti-tas, mon estrienne amie gagnait en confiance et cherchait des tas de neige de plus en plus gros à attaquer. Voici d’ailleurs ses commentaires dans un courriel qu’elle m’a fait parvenir le lendemain matin : « Cher Alain, tu es l’homme le plus intelligent et le plus séduisant que je connaisse et je ne peux plus… » Oups, désolé, je me suis trompé de courriel. Voici le bon : « J'ai aimé avoir essayé la Jeep Wrangler:) Vraiment génial!!!!! Vive les bancs de neige! Une chance que je ne suis pas téméraire... Pour moi, c'est ça profiter des beaux moments que m'offre la vie! »
Effectivement, Josée, une chance que tu n’es pas téméraire. Mais je sais que tu le deviendrais rapidement! Et c’est là que les problèmes commenceraient. Un Jeep Wrangler, même Rubicon, passe n’importe où, défiant les lois de la physique… jusqu’à ce que ces lois le rattrapent. À force de passer partout, on s’habitue aux prouesses et on finit immanquablement par se prendre, et de royale façon, habituellement très loin de toute civilisation! Il faut toujours, toujours garder la tête froide. Les clubs de 4x4, c’est fait pour ça.
Malgré ses aptitudes à côté de la route, le Wrangler n’est plus le roi de l’inconfort qu’il fut un temps. Certes, on est très loin d’une Lincoln mais on n’a plus besoin d’un chiro après deux kilomètres. Ça en prend maintenant cinq. Le véhicule est très haut et accéder à l’habitacle demande une certaine expérience. Bien sûr, des marchepieds aideraient mais ajouter cet accessoire à un 4x4 irait à l’encontre de la plus élémentaire des lois du hors-route, le meilleur dégagement au sol possible.
Sur la route, les bruits éoliens sont omniprésents, la visibilité arrière ne pourrait guère être plus pénible à cause de l’imposant pneu de secours et du moteur de l’essuie-glace, il n’y a pas de repose-pied pour le pied gauche, les sièges, en cuir svp, semblent plutôt recouverts d’un cuirette pris dans les restes d’un rembourreur ayant fait faillite en 1975 et les matériaux recouvrant l’habitacle sont assez ordinaire, merci. Le rayon de braquage est trop grand (mais peut-on exiger mieux d’une direction floue?), la course du levier de vitesse est très longue, peu précise tandis que la pédale d’embrayage possède un point de friction très haut. Un freinage le moindrement appuyé fait découvrir un impressionnant transfert de poids et la pédale est d’une mollesse de crème glacée durant une journée de canicule. Le moindre excès d’enthousiasme en courbe nous rappelle, quelquefois avec des palpitations cardiaques, que le centre de gravité très haut ne favorise absolument pas une conduite sportive.
Et pourtant...
Et pourtant, on se prend à l’aimer, cet alcoolique fini. C’est vrai, j’avais oublié de mentionner qu’il consomme effrontément. Lors de ma semaine d’essai, alors que je ne l’ai pratiquement pas conduit en hors route (je laisse ça aux expertes!), monsieur a englouti une moyenne de 15 litres d’essence tous les 100 km. Sur une autoroute, à une vitesse constante de 100 km/h, on parle d’environ 12 l/100 km. En ville uniquement? 16 ou 17… En hors-route… vaut mieux se concentrer sur l’emplacement des roues que sur l’emplacement de l'aiguille de la jauge à essence. Vivement, le V6 Pentastar 3,6 litres. Pour l’instant, il faut se contenter du vieux V6 de 3,8 litres de 202 chevaux et 237 livres-pied de couple.
Mis à part ces petits détails, le Wrangler a tout pour se faire apprécier… surtout de ceux qui pratiquent le hors-route. Alors là, mes amis, attachez votre tuque avec de la broche! Tous les irritants ci-haut mentionnés deviennent de vraies bénédictions. Le véhicule est haut de terre? Tant mieux. La direction est vague? Une direction trop précise devient un handicap lorsque le volant revient brutalement si une roue frappe une roche. Nous pourrions continuer longtemps ainsi…
En fait, bien peu de gens tireront le maximum des capacités tout-terrain du Wrangler, surtout en version Rubicon. Le rouage Rock-Trak autorise une démultiplication rarement égalée sur un véhicule destiné au public, les deux différentiels peuvent être bloqués et la barre antiroulis peut être désactivée. Et puis, il y a ce petit levier qui permet de passer les différents modes du boîtier de transfert (2H, 4H, N et 4L). Alors que la majorité des 4x4 sont passés à un bouton relié à un moteur électrique, le Wrangler persiste à offrir ce levier, récalcitrant mais tellement viril. Et c’est justement pour ça qu’on aime le Wrangler. À son volant, on se sent en pleine maîtrise de toutes les situations et on sait qu'il ne nous laissera jamais tomber. Parlez-en à Nadine et à Josée!