Un espion dans ma voiture!
Non, je n’ai pas fait l’objet d’écoute électronique ou de tout autre forme d’invasion de ma vie privée. L’espionnage dont j’ai été la victime « volontaire » s’est fait au moyen d’un mouchard électronique qui, pendant un mois, a épié mon comportement au volant afin de déterminer si je suis un bon conducteur. Cela implique le respect des limites de vitesse, l’observance rigoureuse de la signalisation routière et, somme toute, la pratique de tout ce qui concoure à une conduite sécuritaire. Le but de l’exercice? Inciter les jeunes de 16 à 24 ans à conduire prudemment afin de réduire leurs primes d’assurance traditionnellement très élevées. La compagnie d’assurance Industrielle Alliance fait partie des assureurs offrant ce genre d’incitatif et l’on m’a gentiment invité à en faire l’essai pendant un mois.
Destiné à contrer la vitesse au volant et la conduite dangereuse, ce programme nommé Mobiliz est basé sur la méthode « pay how you drive » ou, si vous aimez mieux, « payer selon votre conduite ». Roulez comme un père tranquille et vous économiserez sur vos primes d’assurance. En revanche, conduisez comme si vous étiez sur un circuit de vitesse et vous serez pénalisé. À vous de choisir.
Le cobaye
L’Industrielle Alliance m’a donc proposé d’installer dans mon auto ce que l’on appelle un appareil de télématique et de m’ouvrir un compte fictif pour les besoins de ce reportage. Et pourquoi pas? Le principal avantage de ce programme pour les jeunes est qu’ils peuvent obtenir une prime d’assurance déterminée non pas par leur historique de réclamations ou leur groupe d’âge, mais sur leur propre façon de conduire.
Disons tout de suite que je n’ai pas été le meilleur cobaye. Mais, pour s’amuser, voyons un peu ce qu’a révélé cette surveillance électronique à mon endroit. La première semaine, je me suis vraiment appliqué à conduire sagement afin de bien tester le système. Or, quelle ne fut pas ma déconvenue de constater qu’entre le 22 et le 28 avril, je n’ai récolté qu’une note « normale » sur les 386 km parcourus. J’avais commis 4 excès de vitesse, 4 accélérations « forcées » et 3 freinages brusques. Bilan, ma prime pourrait varier de 5 % dans un sens ou dans l’autre.
Trop pressé, M. Duval!
Ma seconde semaine (483 km) a été pire avec un score entrainant une surprime de 10 à 15 %. Raison de cette « amende » : 9 excès de vitesse et 3 freinages brusques résumés par un implacable jugement de « conduite imprudente ». À ma décharge, j’avais prêté l’auto à ma femme sans lui dire qu’elle serait espionnée. Comme elle a l’habitude de freiner à la dernière minute, brusquement, elle a bousillé ma fiche.
Le système est à mon avis fautif sous ce rapport en ce sens qu’il ne connait pas les conditions routières existantes au moment où il capte les données. Exemple : je freine subitement pour éviter un piéton surgi de nulle part et on me pénalise d’avoir sauvé une vie. À l’inverse, si j’accélère comme un damné pour compléter un dépassement soudain devenu risqué, là encore je passe à la caisse.
La semaine suivante, ma facture a fait un saut de 52 $ à 84 $ pour un excès de vitesse qui ne prêchait pas par l’exemple, je m’en excuse. En revanche, ma dernière semaine, longue de 1 434 km, m’a fait renouer avec une conduite plus calme (« normale » dans le langage de Mobiliz) qui a ramené ma prime mensuelle au niveau où elle était précédemment.
Voilà donc un programme intéressant pour aider les jeunes à abaisser à des niveaux plus acceptables des primes d’assurance qui sont trop souvent fixées selon des barèmes qui ne tiennent pas compte de l’individu, mais d’une collectivité généralement à risque élevé. M’étant soumis à ce petit exercice, je dois dire qu’il faut vraiment pratiquer une conduite très vigilante pour bénéficier des économies offertes. En somme, la moyenne n’est pas facile à battre.